Enfin l'annulation de l'arbitrage est prononcée !
Publié le 29 Mai 2015
Le vent est en train de tourner dans l'affaire Tapie : on commence enfin à se rendre compte que l'Etat et que le contribuable ont été honteusement floués dans cette affaire. Il n'est pas trop tôt !
M. Bernard Tapie doit donc rendre l'argent qu'il a indument perçu : c'est la prochaine étape pour que les parties lésées soient pleinement dédommagées.
On a enfin reconnu que l'arbitrage était un simulacre de justice : il ne reste plus qu'à attendre que les juges du fond reconnaissent enfin que les 405 Millions de dédommagement ont clairement été abusifs...
La suite au prochain épisode que l'on espère pour très bientôt.
Un article du journal 'Le Monde' daté du 19 Février 2015
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Arbitrage Tapie : les raisons de l'annulation
Pour l'avocat de l'homme d'affaires, l'arrêt de la cour d'appel ne dit pas qu'il doit rendre les 405 millions d'euros
La cour d'appel de Paris a déclaré recevable, mardi 17 février, le recours en révision engagé contre la sentence arbitrale qui avait accordé, en juillet 2008, 405 millions d'euros à l'homme d'affaires Bernard Tapie dans le cadre de son litige avec le Crédit lyonnais sur la vente d'Adidas.
Dans leur arrêt, les magistrats ordonnent également la rétractation du jugement arbitral, ce qui " correspond à son annulation ", explique Thomas Clay, professeur en droit, auteur du Code de l'arbitrage commenté (éditions LexisNexis, 296 pages, 45 euros). La sentence arbitrale " a donc aujourd'hui disparu de l'ordre juridique français ", poursuit-il. Les magistrats se prononceront dans un second temps, à compter du 29 septembre, sur le bien-fondé de la décision des arbitres. Ils indiqueront alors s'ils estiment que M. Tapie a été lésé ou pas par le Crédit lyonnais.
Le ministre des finances, Michel Sapin, a " pris acte avec satisfaction " de l'arrêt de la cour. Celui-ci " marque un tournant : en reconnaissant l'existence d'une fraude, la justice confirme le bien-fondé du choix d'attaquer cette sentence arbitrale, dans l'intérêt des contribuables ", a-t-il écrit dans un communiqué.
La décision de la cour d'appel n'implique pas, pour autant, que M. Tapie doive rendre les 405 millions d'euros, a déclaré l'un des avocats de l'homme d'affaires, Me Jean-Georges Betto. Il faudrait que " l'arrêt d'appel précise que M. Tapie doit rembourser les sommes, ce que l'arrêt ne fait en aucune manière. M. Tapie n'a pas à rendre l'argent ", a-t-il insisté. Mais, dans un communiqué transmis à l'AFP, le Consortium de réalisation (CDR), l'organisme chargé de gérer le passif du Crédit lyonnais, assure qu'il va chercher à obtenir " la restitution des sommes ", " les sentences ayant été rétractées ".
" On repart à zéro (…). Désormais, il n'y a plus de limites. La révision peut se faire en plus ou en moins. Et j'espère bien qu'elle se fera en plus ", a pour sa part réagi Bernard Tapie dans La Provence, journal dont il est propriétaire.
" Dissimulation "
Le recours avait été déposé le 27 juin 2013 par le CDR. Il reposait sur les investigations lancées au pénal par les juges d'instruction, établissant qu'il y avait eu, selon les propres termes des magistrats, " simulacre d'arbitrage ". Tant Bernard Tapie que l'un des arbitres, Pierre Estoup, ont été mis en examen pour " escroquerie en bande organisée ". L'actuelle directrice du Fonds monétaire international, Christine Lagarde, alors ministre de l'économie, est aussi poursuivie pour " négligence ", pour avoir laissé faire l'arbitrage et ne pas s'y être opposée en temps utile.
La cour d'appel relate que l'intervention litigieuse de Pierre Estoup, l'un des trois arbitres, entache de fraude l'ensemble de la procédure. Elle souligne ses liens avec la partie Tapie : " La dissimulation de ces liens anciens, étroits et répétés participe de l'accomplissement du dessein ourdi par l'arbitre de concert avec M. Tapie et son représentant, de favoriser au cours de l'arbitrage les intérêts de cette partie. "
De fait, dans un rapport de la brigade financière entièrement consacré aux relations étroites entre l'avocat de M. Tapie, Me Maurice Lantourne, et Pierre Estoup, révélé en septembre 2014 par Le Monde, les policiers notaient : " Outre le fait que M. Estoup avait occulté de nombreuses et diverses relations professionnelles le liant à Me Lantourne depuis 1989, il avait également eu à connaître du dossier Bernard Tapie bien avant 2007 et le lancement officiel de la procédure d'arbitrage. Ces éléments sont donc de nature à confirmer un manque d'indépendance de Pierre Estoup à l'égard de Bernard Tapie. " Ils relevaient ainsi que " Pierre Estoup avait fourni à Me Lantourne de nombreuses autres prestations ", non signalées. Ils en dénombraient quinze au total : arbitrages, conciliations, consultations…
Les enquêteurs avaient retracé les flux d'argent entre M. Estoup, Me Lantourne et un autre avocat ayant œuvré pour M. Tapie, Me Francis Chouraqui. Sur la période 1997-2006, détaille la brigade financière, " Pierre Estoup avait facturé 808 987 euros d'honoraires relatifs à des dossiers liés à Mes Lantourne et Chouraqui (…). Ce montant représentait 42,38 % du chiffre d'affaires de Pierre Estoup " sur la période concernée.
La cour d'appel de Paris doit désormais se prononcer sur le fond de la décision arbitrale. En clair, dire si M. Tapie a bien été floué par le Crédit lyonnais. Or, la justice dispose, comme l'a également révélé Le Monde, le 11 septembre 2014, d'un deuxième rapport.Rédigé le 9 juillet 2014, il soutient en 37 pages que l'homme d'affaires n'était pas fondé à réclamer un dédommagement. Sa conclusion est claire : " Les faits ayant pu être établis par les investigations ne permettent pas de donner crédit à la thèse de M. Tapie et aux conclusions des arbitres. "
Gérard Davet, et Fabrice Lhomme
VERBATIM
“Considérant qu'il est démontré que M. Estoup, au mépris de l'exigence d'impartialité qui est de l'essence même de la fonction arbitrale, a, en assurant une mainmise sans partage sur la procédure arbitrale, en présentant le litige de manière univoque puis en orientant (…) la réflexion du tribunal en faveur des intérêts de la partie qu'il entendait favoriser par connivence avec celle-ci et son conseil, exercé une influence déterminante et a surpris par fraude la décision du tribunal arbitral. "
Extrait de l'arrêt de la cour d'appel de Paris.