Quand la Légion d'honneur est décernée vraiment à n'importe qui...

Publié le 27 Mai 2015

Quand la Légion d'honneur est décernée vraiment à n'importe qui...

Tous les récipiendaires de la Légion d'honneur vont avoir des nausées quand ils vont apprendre qu'ils ont eu la même décoration qu'un type qui n'a jamais été un chantre des principes fondamentaux de notre Démocratie...

En effet, il est plus qu'étonnant que M. Abdellatif Hammouchi puisse être distingué comme officier de la Légion d'honneur, alors même qu'il est visé en France par plusieurs plaintes pour torture.

Un bon conseil donc : si on vous décerne la Légion d'honneur, refusez-là, car elle est un peu sale ces derniers temps : en effet, on ne peut pas décerner une décoration avec de tels soupçons. Soit, on innocente la personne et on la décore, soit on ne la décore pas. La France a donc décidé de passer outre ses principes par pur intérêt d'Etat. Les Droits de l'Homme n'en sortent pas grandis.

Je joins deux articles pour être complet dans cette affaire : un article relate la décoration, l'autre, le contexte...

Un article du journal 'Le Monde' daté du 17 Février 2015

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l'histoire du jour
Le patron du contre-espionnage marocain décoré par Paris

Abdellatif Hammouchi pouvait-il rêver plus belle réhabilitation ? Visé en France par plusieurs plaintes pour torture, le patron du contre-espionnage marocain sera bientôt décoré par les autorités françaises de la Légion d'honneur. Le ministre français de l'intérieur, Bernard Cazeneuve, l'a annoncé, samedi 14 février, lors d'une visite à Rabat.

La venue de M. Cazeneuve dans la capitale marocaine était hautement symbolique : il s'agissait du premier déplacement d'un haut responsable français depuis la fin de la crise diplomatique entre les deux pays. En février 2014, le dépôt d'une convocation délivrée par la justice française à la résidence de l'ambassadeur du Maroc et visant M. Hammouchi avait provoqué l'ire de Rabat et la suspension de la coopération judiciaire entre les deux pays. Un an plus tard, presque jour pour jour, l'affront est lavé.

Aux côtés de son homologue marocain, Mohamed Hassad, samedi, Bernard Cazeneuve n'a pas tari d'éloges. Il a loué " l'expertise " et " l'efficacité " du Maroc " dans l'échange de renseignements ", évoquant " un partenaire-clé " et saluant " l'action menée " par la Direction générale de la surveillance du territoire (DGST), dont le " rôle est déterminant dans la coopération contre le terrorisme ".

L'hommage a été particulièrement appuyé pour son patron, Abdellatif Hammouchi. " La France avait déjà eu l'occasion de distinguer M. Hammouchi en 2011 en lui attribuant le titre de chevalier de l'ordre de la Légion d'honneur. Elle saura prochainement lui témoigner à nouveau son estime en lui remettant cette fois les insignes d'officier ", a expliqué le ministre.

Si la nouvelle sonne comme une victoire pour le Maroc, qui avait dénoncé un manque d'égards de la part de Paris et exigé une refonte des règles de coopération judiciaire, les ONG de défense des droits de l'homme, qui soutiennent les plaignants marocains à l'origine des plaintes, ne cachent pas leur amertume. " Nous nous étonnons que la France puisse décorer une personne visée par plusieurs plaintes pour torture faisant l'objet d'enquêtes judiciaires en France ", souligne Hélène Legeay, chargée du programme Maghreb à l'Action des chrétiens pour l'abolition de la torture.

Les ONG s'inquiètent du contenu du nouvel accord de coopération judiciaire franco-marocain signé le 31 janvier et des concessions qui pourraient avoir été faites à Rabat. " Il semble que cette décoration soit l'une des contreparties de la reprise de la coopération, un geste destiné à laver le soi-disant affront de la justice française qui a osé faire son travail en convoquant M. Hammouchi le 20 février 2014 ", poursuit Hélène Legeay. Samedi, l'avocat Patrick Baudouin, président d'honneur de la Fédération internationale des ligues des droits de l'homme (FIDH), avait dénoncé un " véritable scandale, une honte pour la France ", l'accusant de " perdre son âme ".

Charlotte Bozonnet

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Un article de rfi.fr daté du 25 Février 2014

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France François Hollande Maroc Mohammed VI
Publié le 25-02-2014 Modifié le 25-02-2014 à 17:36
France-Maroc: plaintes et vexations en cascade
Par Véronique Moreau

Un véritable coup de froid s'est abattu ces derniers jours sur les relations franco-marocaines, au point de pousser François Hollande à appeler hier, lundi 24 février, le roi Mohammed VI. Tout a basculé il y a quelques jours lors de la visite en France du ministre de l'Intérieur marocain, accompagné pour l'occasion du patron du contre-espionnage Abdellatif Hammouchi.

C'est précisément l'arrivée sur le territoire français du chef de la DGST, la Direction générale marocaine de la surveillance du territoire, qui a mis le feu aux poudres. Selon l'ACAT (Action des chrétiens pour l'abolition de la torture), le centre de détention de Temara, au Maroc, est en effet placé sous la responsabilité d'Abdellatif Hammouchi. L'organisation non gouvernementale a donc profité de sa venue en France pour demander son audition devant la justice, dans le cadre de deux plaintes déposées à Paris contre lui. Ce qui a particulièrement ulcéré les autorités marocaines, c'est que les inspecteurs français n'ont absolument pas respecté les voies diplomatiques habituelles : ils ont profité du fait que le ministre de l'Intérieur marocain donnait une conférence de presse pour débarquer à sept à Neuilly-sur-Seine dans la résidence de l'ambassadeur du Maroc en France et pour notifier à Abdellatif Hammouchi la convocation du juge d'instruction. Du jamais-vu entre les deux pays !

Complicité de torture et torture

Sur le plan du droit, dans un premier temps, Abdellatif Hammouchi faisait surtout l'objet d'une première plainte pour complicité de torture. Elle avait donné lieu à l'ouverture d'une information judiciaire dès la fin 2013 et concerne Adil Lamtalsi, un Franco-Marocain de 33 ans qui affirme avoir été arrêté en octobre 2008 près de Tanger pour détention et trafic de cannabis. Il dit avoir été torturé pendant trois jours à Temara, avant d'être contraint de signer des aveux. Il a ensuite été condamné à dix ans de détention, et a été finalement transféré en France pour y purger sa peine. La deuxième plainte, déposée très récemment, émane d'Ennaâma Asfari, un militant de la cause sahraouie âgé de 44 ans, condamné à trente ans de réclusion en 2013.

Et pendant le séjour en France d'Abdellatif Hammouchi, une troisième plainte a été déposée contre lui, cette fois pour des faits de torture. Le plaignant est un ancien champion de boxe light-contact, qui s'appelle Zakaria Moumni. Il affirme avoir subi des sévices au centre de détention de Temara et y avoir aperçu Abdellatif Hammouchi en personne lors de l'une de ces séances. Zakaria Moumni avait été condamné à trente mois de prison, le Maroc l'accusant d'avoir faussement promis du travail à des compatriotes en échange d'argent, avant d'être finalement gracié par le roi en février 2012. Il affirme avoir signé ses aveux sous la torture, lui aussi.

« Une maîtresse avec laquelle on dort toutes les nuits »

Comme si cela ne suffisait pas, dimanche dernier, la tension est encore montée d'un cran entre Paris et Rabat. Les chancelleries étaient déjà au bord de la crise de nerfs, les téléphones n'arrêtaient pas de sonner, les ambassadeurs étaient tour à tour convoqués pour explications quand on a appris subitement par l'intermédiaire de l'acteur espagnol Javier Bardem que l'ambassadeur de France à Washington avait eu en 2011 des mots plus que malheureux. C'est en tout cas la version de Javier Bardem, producteur d'un documentaire sur le Sahara occidental. Ce dernier prétend que le diplomate en question aurait comparé le royaume à une « maîtresse avec laquelle on dort toutes les nuits, dont on n'est pas particulièrement amoureux mais qu'on sait défendre ». Paris a eu beau nier sur tous les tons, le mal était fait. Le Maroc était vexé pour de bon.

Nicolas Hulot prié de rester chez lui

Depuis, en dépit de tous les efforts déployés par la France pour apaiser le conflit, la tension reste vive. Paris fait profil bas, évoque un « incident regrettable » à propos de l'affaire Hammouchi, promet de faire toute la lumière sur ce dossier. Mais rien n'y fait : le Maroc ne décolère pas et entend bien montrer son mécontentement le plus vif. En mesure de rétorsion, il vient d'annuler unilatéralement la visite de deux jours que l'envoyé spécial du président français pour la planète devait effectuer sur place : Nicolas Hulot a tout simplement été prié de rester chez lui.

Rédigé par Philippe NOVIANT

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