Quand ceux qui jugent... pètent les plombs...
Publié le 24 Juin 2015
La Justice Française manque de moyens, c'est un fait. Mais tout n'est pas question de moyens...
Quand un président de juridiction se conduit de manière abjecte, il faut le sanctionner. Quand des auteurs de discours de rentrée disent que les grossesses des magistrates posent problèmes, on doit aussi les condamner de manière ferme !
Quand on harcèle les magistrats, ce sont les justiciables qui paient les pots cassés ! Quand on passe son temps à essorer l'éponge, on aboutit à une justice bâclée qui ne rend service à personne.
Il faut donc augmenter de manière substantielle les moyens affectés à la Justice. Dans le même temps, il faut virer manu-militari les brebis galeuses qui jettent le discrédit sur l'institution toute entière !
Un article du journal 'Le Monde' daté du 04 Mars 2015
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Sexisme, surcharge, stress… Les conditions de travail de la magistrature se dégradent
Dans un Livre blanc, l'Union syndicale des magistrats dresse un état des lieux inquiétant
Les juges sont au bord de la crise de nerfs – ce n'est pas nouveau, mais la situation ne s'arrange guère, si l'on en croit le livre blanc publié en février par l'Union syndicale des magistrats (USM, majoritaire). Surtout pour les femmes, notamment les femmes enceintes ou avec des enfants en bas âge, qui forment désormais les gros bataillons de la justice.
Ainsi, tel président de juridiction fait preuve " d'un manque de tact qui frise souvent la grossièreté, témoigne un magistrat. Il a pu interpeller une collègue venant lui annoncer sa seconde grossesse en lui indiquant qu'il existait des moyens de contraception, ou une autre, en lui signalant à chaque rencontre qu'elle avait grossi ". Une vice-procureure a encore en travers de la gorge le dernier discours de rentrée " qui a directement mis en cause les magistrates, lesquelles, par leurs grossesses, sont à l'origine de dysfonctionnements graves ", avec toute l'année, " un manque constant de considération et des humiliations publiques en termes choisis pour les femmes ", traitées " d'hystériques " ou de " caractérielles ".
Il n'y a pas que les grossesses. Une magistrate qui allait remettre un certificat médical pour être dispensée des permanences de nuit s'est vue demander " ce qu'elle comptait faire pour alléger ses collègues qui allaient la remplacer ". Elle a répondu : " Je suis au bureau de 7 heures du matin à 19 h 30, je ne vois pas ce que je pourrais faire de plus. " On lui a rétorqué : " Vous n'êtes plus greffier en chef, vous êtes magistrat. " Du coup, elle n'a plus été conviée aux réunions et en a conçu " un profond sentiment d'humiliation et d'injustice ".
Entretien d'évaluation
Une substitut générale ayant appris qu'elle était atteinte d'un cancer s'est vue convoquée par son procureur général. " Il m'a accueillie en hurlant, en me disant notamment que j'avais une allure de spectre et qu'il exigeait que je sois souriante en entrant dans son bureau. " Elle a été convoquée pour un entretien d'évaluation – les magistrats sont notés par leur supérieur – trois heures avant son hospitalisation, et a refusé de s'y rendre. Le procureur général a, du coup, interdit de lui envoyer ses bulletins de salaire chez elle pendant son arrêt maladie.
Les témoignages abondent sur ces chefs de juridiction qui ne disent jamais bonjour, qui évitent certains bureaux de leurs subordonnés. Un procureur, qui se faisait fort de " remettre de l'ordre dans son parquet ", a convoqué ses troupes après son arrivée pour leur annoncer : " Ma conception du parquet, c'est je décide, vous obéissez. Je vais vous mettre au boulot. " A un vieux routier qui lui signale qu'on ne lui a jamais parlé comme ça, il a répondu : " Il faudra vous y faire. C'est moi le patron, c'est tout. "
Tous les chefs de juridiction ne sont évidemment pas de petits tyranneaux, mais la pression est continue, et la machine judiciaire est tenue d'absorber chaque année davantage de contentieux à effectif constant, voire en baisse, faute pour les précédents gouvernements d'avoir anticipé les départs à la retraite. Il manque aujourd'hui 500 postes de magistrats (sur 8 000), et la France est déjà plutôt mal lotie : le pays compte 10,7 juges professionnels pour 100 000 habitants, contre 20,9 en moyenne dans le reste de l'Europe ; les procureurs sont 2,9 contre 11,8. Et tout le monde est débordé. Dans la chambre sociale d'une cour d'appel, une conseillère rend jusqu'à 40 arrêts par mois. " Je ne fais plus que travailler, les semaines et les fins de semaine. Je m'isole. J'ai l'impression de porter des œillères, ouvrir un dossier, allumer mon ordinateur, rédiger, voilà ce que je dois faire et surtout ne pas lever les yeux. "
Elle a eu un infarctus au bureau. " J'avais une charge de travail hebdomadaire de 70 heures, m'empêchant d'assurer les soins nécessaires à mon enfant, explique un juge. J'en ai tiré les conclusions en prenant une disponibilité. Je ne sais pas si je reviendrai un jour. " Tout le monde est lessivé. " Onze heures par jour au palais, tous les jours, et à la maison tous les samedis et tous les dimanches et jours fériés, et la moitié des vacances, énumère une présidente de chambre.
Et le retard qui s'accumule, d'où l'angoisse et la fatigue. " Marylise Lebranchu, alors garde des sceaux, avait signé une circulaire le 6 juin 2011 demandant à ce que la durée des audiences de l'après-midi " n'excède pas six heures " et celle de la journée huit heures, ou dans " des circonstances tout à fait exceptionnelles ", dix heures. Elle n'a jamais pu être appliquée
Franck Johannès