Quand un procureur oublie les notions d'intérêt général (1/2)

Publié le 30 Septembre 2016

Quand un procureur oublie les notions d'intérêt général (1/2)

Petits principes à rappeler : la démocratie est le pouvoir du peuple par le peuple. La défense de l'intérêt général est réalisée par la démocratie. Le droit pénal est là pour lutter contre le trouble manifeste à l'ordre public, in fine, à l'intérêt général.

Le droit pénal est défendu par le procureur dans le sens où il représente la société, toujours chargée par un principe démocratique : le procureur doit défendre l'intérêt général en tous temps et tous lieux.

L'intérêt général commande que les citoyens soient informés des préjudices qu'ils subissent.

Dans un fait pénal, il y a hiérarchie des fautes dans le temps : des actions de défense peuvent être menées si il y a eu agression. En ce sens, le dossier présent est clair : c'est parce que les banques ont oeuvré à l'encontre des citoyens que des citoyens ont agi pour voler des preuves et les montrer aux citoyens pour défendre l'intérêt général !

Le journalisme sert la démocratie ! Pas les banques !

La justice fonctionne toujours avec un mécanisme de principe-exception.

Principe : le vol est punissable car il est un trouble manifeste à l'ordre public. Exception : si le vol sert à informer les citoyens que des banques agissent à l'encontre de l'intérêt général, le vol ne peut plus être punissable !

Le procureur a oublié tous ces principes alors qu'il est un spécialiste du droit. Il a donc requis à l'encontre de l'intérêt général, ce qui est une faute, une trahison d'état.

Dans cette sombre affaire, le Luxembourg dira, par son jugement s'il est un pays démocratique ou non, mais on sait par avance que le procureur a oublié ses notions élémentaires de droit démocratique.

Un article du journal 'Le Monde' daté du 5 Mai 2016

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Au procès de LuxLeaks, le journalisme d'investigation attaqué

Lors de l'audition du journaliste Edouard Perrin, le procureur a mis en cause ses méthodes de travail
L'échange n'a duré que quelques minutes, mais il a marqué une brusque montée de tension dans le procès LuxLeaks. Mardi 3 mai, Journée mondiale de la liberté de la presse, le procureur d'Etat adjoint du tribunal d'arrondissement de Luxembourg, David Lentz, a vivement questionné et mis en cause le journaliste français Edouard Perrin sur ses méthodes de travail.

Le reporter du magazine de France 2 " Cash investigation " est accusé de complicité de violation du secret des affaires et du secret professionnel, pour avoir publié des documents fiscaux secrets obtenus via un ex-salarié du cabinet PwC, Raphaël Halet. Ce dernier est inculpé à ses côtés pour les mêmes faits et pour " vol ", tout comme l'autre source de M. Perrin, l'ex-auditeur Antoine Deltour.

Les deux reportages de M. Perrin, en 2012 et 2013, puis la publication des documents par le Consortium international des journalistes d'investigation (ICIJ), en 2014, ont déclenché un gigantesque scandale sur les pratiques fiscales du Luxembourg. Mais, mardi, devant le tribunal d'arrondissement du Luxembourg, M. Lentz n'a pas voulu reconnaître une quelconque valeur au travail de M. Perrin. Au contraire.

" Vous êtes journaliste d'investigation. Qu'est-ce que le journalisme d'investigation ? ", a demandé avec dédain le procureur. " Je ne sais pas. Pour moi, un journaliste, de base, fait des enquêtes ", a répondu le journaliste, qui s'exprimait pour la première fois dans cette procédure. Il s'abritait jusqu'ici derrière le secret des sources.

" Scandale fiscal "
Le procureur l'a ensuite interrogé sur ses relations avec M. Halet. Responsable de la cellule de scanning des documents chez PwC, celui-ci a pris contact avec le journaliste après la diffusion du premier " Cash investigation ", en 2012, réalisé à partir des rescrits fiscaux fournis par Antoine Deltour, un an plus tôt. Dans son premier courrier électronique, M. Halet, qui a accès à tous les documents les plus confidentiels de par ses fonctions, affirme au journaliste qu'il souhaite, lui aussi, " dénoncer ce scandale fiscal auquel il participe malgré - lui - ".

" Quand M. Halet vous informe qu'il se trouve au saint du saint, vous êtes comme un enfant devant un magasin de jouets ? ", interroge, goguenard, le procureur. " Non, je suis extrêmement méfiant ", rétorque le journaliste.

Les deux hommes correspondent longuement par courriel, avant de se rencontrer physiquement à Metz, en octobre 2012. Ce n'est qu'ensuite qu'ils échangent les documents : en tout seize déclarations fiscales de multinationales. Celles-ci sont transférées via le brouillon d'une adresse de courrier électronique intitulée cent mille dollars au soleil, créée par M. Halet, sur recommandation du journaliste.

La semaine précédente, le policier chargé de l'enquête s'était appuyé sur ce procédé pour assurer que M. Perrin " orchestrait le tout ". " Le système de la boîte morte n'a que pour unique but d'assurer l'anonymat de ma source, cela fait partie des procédés qu'on utilise régulièrement ", a pourtant avancé le journaliste, mardi.

Mais le procureur a surtout voulu démontrer que le journaliste avait manipulé M. Halet. Au début de l'instruction, soumis à un strict accord de confidentialité avec PwC après avoir été repéré, l'ancien secrétaire avait en effet laissé entendre qu'il avait pu agir en partie sur commande. Mais il est revenu sur ses déclarations lors de son témoignage à la barre, vendredi 29 avril, assurant que le journaliste avait seulement " fait son travail ".

Visiblement énervé par ce revirement, M. Lentz s'est plongé dans les courriels échangés entre les deux hommes. " Dans certains e-mails, vous demandez des informations précises sur certaines sociétés ", assure-t-il. Il cite un message où M. Perrin évoque une filiale d'ArcelorMittal. " Le 16 octobre - 2012 - , vous dites :“J'ai besoin d'élément tangible.” Le 6 décembre, c'est : “Faites le maximum.” Ce sont clairement des indications précises ", fustige-t-il.

M. Perrin lui rétorque qu'il s'agissait seulement d'une société alors dans l'actualité. Pas suffisant pour M. Lentz, qui, avant de se rasseoir, tente une ultime insinuation : " Etes-vous intervenu pour que M. Halet vous disculpe ? " " Le simple fait de poser cette question est une information en soi, la réponse est clairement non ", répond, amusé, le journaliste. Le réquisitoire du procureur est attendu pour mardi 10 mai.

Jean-Baptiste Chastand

Rédigé par Philippe NOVIANT

Publié dans #Informations

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