Quand un organisme public oublie de servir le citoyen
Publié le 30 Décembre 2016
Les organismes financés par l'argent public, se doivent de servir le citoyen et l'intérêt général.
Il est donc particulièrement choquant que certains s'en s'abstiennent. L'office HLM de Puteaux est de ceux-là.
La maire de Puteaux (Les Républicains) Joëlle Ceccaldi-Raynaud, est directement responsable de graves erreurs de gestion car elle préside l'organisme. Une sombre histoire de parking entrave gravement l'action de gestion publique de l'office HLM, et par la même, sa crédibilité vis à vis de l'intérêt général.
Ces organismes ont été punis et c'est une bonne chose.
Il ne reste plus qu'à sanctionner leurs auteurs quand ils ont oublié sciemment de servir leurs concitoyens.
Un article du journal 'Le Monde' daté du 5 août 2016
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Les offices HLM désormais objets de sanctions
Le gouvernement a infligé une amende de 1 million d'euros à l'office de Puteaux pour irrégularités
La sanction est quasi inédite dans son principe, et exceptionnelle pour son montant. Une amende de 1 081 822 euros a été infligée, mardi 2 août, à l'office HLM de Puteaux (Hauts-de-Seine) par trois ministères – intérieur, logement et collectivités territoriales. C'est une conséquence de la loi pour l'accès au logement et un urbanisme rénové (loi ALUR du 24 mars 2014), qui, au 1er janvier 2015, a créé l'Agence nationale de contrôle du logement social (Ancols), une nouvelle instance chargée d'examiner les activités des organismes HLM et des collecteurs du 1 % logement auprès des entreprises. Elle dispose d'un budget de 19 millions d'euros et emploie 150 personnes.
L'agence peut publier ses rapports in extenso, en nommant les organismes concernés – ce qui était interdit à l'ancienne Mission interministérielle d'inspection du logement social (Miilos) – et proposer aux ministères compétents une palette de sanctions : amendes jusqu'à 2 millions d'euros, suspension d'administrateurs ou de dirigeants, retrait de l'agrément d'organisme HLM voire dissolution, privation du concours financier de l'Etat… Ce qu'elle a fait.
Faute de gestion grave
Dans un rapport publié le 11 juillet, l'Ancols a reproché à l'office public HLM (OPH) de la ville de Puteaux, présidé par la maire (Les Républicains) Joëlle Ceccaldi-Raynaud, une faute de gestion grave. L'office s'est engagé dans la construction, hors de son objet social, d'un parking partiellement commercial de 246 places, sans étude préalable ni décision explicite de son conseil d'administration. L'objectif, si l'Ancols ne s'en était pas mêlée, était de le revendre, à perte, à la municipalité, pour 6 millions d'euros de moins que son coût.
L'Ancols pointe " un ouvrage surdimensionné " dont le prix (près de 10 millions d'euros) a -dérapé de 2,67 millions d'euros, et " une source de perte caractérisée ". Sont aussi dénoncés " des manquements graves dans le processus d'attribution des logements. A maintes reprises, sur la période 2010-2013, l'OPH de Puteaux a omis de signaler la vacance de logements aux réservataires, préfet et Action logement - nouveau nom du 1 % logement - , et y a positionné ses candidats propres ou ceux de la ville ". Onze logements soustraits du contingent préfectoral valent à l'office de Puteaux une amende de 42 822 euros, et la non-application du supplément de loyer de solidarité (SLS) aux locataires qui dépassent les plafonds réglementaires est sanctionnée par une troisième amende de 39 000 euros.
Le cabinet de la maire de Puteaux a annoncé, à l'Agence France-Presse, " une action en justice pour obtenir réparation " et Mme Ceccaldi-Raynaud, dans une lettre du 29 juillet adressée à Emmanuelle Cosse, ministre du logement, minimise la faute qui ne concerne, selon elle, " que onze logements préfectoraux sur 1 500 ", affirmant que la cession du parking à la municipalité n'a pas eu lieu et concluant par le souhait que " la proportion des sanctions appliquées soit bien la même dans tous les offices HLM des villes proches du gouvernement, cette sanction étant de toute évidence éminemment politique ".
L'office HLM de Puteaux n'est cependant pas le seul à se voir sanctionné. Le 24 juin, toujours sur proposition de l'Ancols, Mme Cosse a infligé à la société HLM Promocil de Maubeuge (Nord), une sanction financière de 36 625 euros pour, notamment, attributions irrégulières. Promocil, à la tête d'un parc de 11 000 logements, filiale du groupe -Sambre Avesnois Immobilier, émanation du patronat local, avait proposé six appartements à des locataires dont les ressources dépassent, parfois largement, les plafonds légaux. La sanction pouvait, théoriquement, aller jusqu'à 75 000 euros, soit dix-huit mois des loyers contestés.
Cinq autres organismes ont aussi fait l'objet de propositions de sanctions par l'Ancols. Les dossiers sont en cours d'examen au ministère. " On sent un contrôle plus serré sur les attributions de logements, sujet très sensible, mais aussi sur le bon usage de l'argent et de la trésorerie des HLM ", analyse Jean-Christophe Margelidon, directeur général adjoint de la Fédération des offices publics HLM. Cette dernière se désolidarise d'ailleurs nettement d'un de ses membres : " L'OPH de Puteaux ne remplit pas sa mission et sa gouvernance locale porte une lourde responsabilité ", assène-t-elle dans un communiqué mardi 2 août. " Nous avons un dialogue constructif avec l'Ancols et insistons sur la formation des administrateurs d'offices ", se félicite M. Margelidon.
A lire les 53 rapports publiés par l'Ancols depuis sa création, trois critiques reviennent fréquemment : une gouvernance déficiente, des attributions irrégulières de logements – notamment à des personnes qui dépassent les plafonds de revenus, au détriment de bénéficiaires du Droit au logement opposable (DALO) –, des coûts de gestion trop élevés et un train de vie dispendieux.
Attributions illégales
Douarnenez Habitat (Finistère), par exemple, se fait épingler pour l'attribution d'un logement hors des normes (7 416 euros d'amende suggérée par l'Ancols), Noisy-le-Sec (Seine-Saint-Denis) pour deux cas (14 000 euros demandés) et l'Office public de l'habitat des Hautes-Pyrénées, à Tarbes, risque 25 226 euros d'amende pour quatre dossiers litigieux.
Terres du Sud Habitat, office public de La Seyne-sur-Mer (Var), en grande difficulté et sous le coup d'une procédure de redressement, cumule les reproches, dont neuf attributions illégales, pour -lesquelles une amende de 57 000 euros a été demandée. Sont aussi pointés des coûts de gestion élevés (1 285 euros par logement et par an, en 2012), un absentéisme important du personnel, l'oubli de facturation du supplément de loyer, un niveau record d'impayés (9 % à 11 %), des attributions de marchés litigieuses…
Dans un de ses rapports, l'Ancols souligne aussi que les organismes collecteurs du 1 %, censés consacrer 25 % de leurs réservations aux " DALO ", se sont contentés d'en moyenne 3,1 % en 2015 (7,6 % en Ile-de-France). La ministre du logement s'est déclarée déterminée à sanctionner tous les manquements.
Isabelle Rey-Lefebvre