Le problème toujours pas résolu des algues vertes

Publié le 2 Octobre 2012

Algues-vertes-mains_pics_390.jpgC'est inquiétant, car récurrent. Plus on avance, et moins on avance... Ca fait des années que ce problème et là et perdure et on est toujours au même point : on paie pour nettoyer, on paie des amendes à l'Europe et on ne fait rien pour changer les choses.

La justice ne sait pas qui elle doit protéger, se faisant très régulièrement les défenseurs des pollueurs. Tout cela vient d'une certaine médiocrité, y compris judiciaire donc, et d'un attentisme qui va forcément nous mener à toujours plus de problèmes sur ces belles plages bretonnes.

Honteux ? Assurément !

Car il serait si simple de montrer aux véritables responsables qui est vraiment le patron en favorisant l'intérêt général et des côtes au détriment des cultures envahissantes ! Mais vous n'y pensez pas, mon bon Monsieur, si je rentre dans le lard des pollueurs, ils ne voteront plus pour moi ! Et si c'était cela le problème ? Et si défendre l'intérêt général était la véritable preuve du courage politique ?

Un article du journal 'Le Monde' daté du 30 Août 2012

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REPORTAGE
La Bretagne échoue à endiguer les marées vertes
La ministre de l'écologie veut promouvoir " un nouveau modèle agricole " pour lutter contre les ulves
Douarnenez (Finistère) Envoyée spéciale

Ce matin de la fin août, il n'y en avait pas. A midi, elles étaient de retour en couche fine et moussue, d'un vert cru caractéristique, déjà un peu croûteux et grisonnant sur les bords, recouvrant partiellement la plage du Ris, à Douarnenez, dans le Finistère. Certains, en Bretagne, seraient bien tentés de se résigner à vivre avec. Après le répit d'un mois de juillet maussade, Ulva armoricana prospère à nouveau au soleil, mais ne finit-on pas toujours par dénicher un petit coin dégagé pour poser sa serviette de bain ?

Dans la belle baie vallonnée de Douarnenez, le littoral alterne sites épargnés ou fraîchement nettoyés, anses tachées d'un tapis couleur laitue à l'embouchure d'un petit cours d'eau, et criques totalement recouvertes comme celle de Ty Anquer. Sur le parking, se dresse un panneau que l'on retrouve à plusieurs reprises le long du littoral. Fatalement vert, il alerte sur les dangers des tas d'ulves en décomposition et s'orne d'un curieux jeu graphique réalisé avec les lettres " H2S ", comme hydrogène sulfuré, le gaz accusé d'avoir tué chiens, sangliers et cheval les étés précédents.

Présentée officiellement le 24 juillet, la " charte de territoire " de Douarnenez, censée déterminer les actions de prévention contre cette prolifération nauséabonde - c'est-à-dire réduire les fuites massives d'azote vers la mer - suscite l'opposition unanime des associations régionales de défense de l'environnement qui la jugent insuffisante. Ses financeurs, Etat et collectivités locales, devraient la signer quand même à l'automne. Ce programme fait partie du plan de " reconquête de la qualité de l'eau ", annoncé par le gouvernement de François Fillon en 2010 et mobilisant 134 millions d'euros. Il cible les huit bassins versants les plus touchés. Trois de ces chartes ont été adoptées avant celle de Douarnenez. Les autres se négocient avec la profession agricole.

La ministre de l'écologie, Delphine Batho, menace d'instituer avec autorité des " zones soumises à contraintes environnementales ", à l'encontre de deux bassins récalcitrants, ceux de La Fresnaye (Côtes-d'Armor) et Guillec-Horn (Finistère), qui ne parviennent pas à conclure. Elle assure qu'avec son homologue de l'agriculture, elle va " engager un travail pour aller vers un nouveau modèle agricole en Bretagne. " Etablir de nouvelles règles s'impose, explique-t-elle, puisqu'il " va bien falloir satisfaire à nos obligations européennes ". La ministre annonce la formation d'une " mission parlementaire sur le non-respect de la restauration de la qualité de l'eau à l'horizon 2015 ". Incapable de redresser la situation, la France encourt une sanction de 28 millions d'euros devant la Cour de justice de l'Union européenne.

A lui seul, le ramassage des ulves coûte près de 1,3 million d'euros par an. Sans compter le traitement des tas d'ulves gorgées d'eau et de sable, ni les impacts économiques (tourisme, pêche, conchyliculture, immobilier), ni les problèmes de santé publique qui s'élargissent aux proliférations de micro-algues. La charte de Douarnenez prévoit des subventions pour favoriser plus de cultures biologiques, un peu plus de prairies et de zones humides, et une aide substantielle pour doter quelques exploitations d'unités de méthanisation. Sans convaincre les écologistes.

" Ça fait trente ans que les plans se succèdent, sans résultats, déplore Jean Hascoët, président de l'association Baie de Douarnenez environnement. Le diagnostic est connu, mais les dirigeants de la chambre d'agriculture ont un dogme : on ne diminuera pas la production. Quand ils parlent de "mutualiser" les zones d'épandage, nous savons que cela signifie traquer les derniers espaces indemnes pour y épandre du lisier. "

Pris entre les atermoiements de l'Etat et le refus d'évoluer des élus agricoles - que l'ensemble de la profession ne partage pas -, les militants guettent les augures sur le terrain judiciaire. Lorsque l'autorisation d'agrandir encore un méga-élevage de porcs est annulée, c'est un bon point. Lorsqu'un chercheur de l'Ifremer, Jean-Yves Piriou, est condamné pour avoir qualifié de charlatan le seul scientifique niant le rapport entre les quantités massives d'azote rejetées par l'agriculture intensive et les marées vertes, c'est mauvais signe. Et lorsque le syndicat agricole majoritaire attaque avec succès la réglementation protégeant les captages d'eau potable, c'est inquiétant.

" Depuis quinze ans, nous avons beaucoup évolué. Ceux qui viennent nous donner des leçons sont des égoïstes ", assène le vice-président de la chambre d'agriculture du Finistère, André Sergent. Il admet du bout des lèvres le lien entre son activité et les rejets d'azote, dont le dernier rapport ministériel conclut qu'ils proviennent à 90 % au moins de l'agriculture. Mais il se trouve toujours, selon lui, une baie qui permet de douter.

En tant qu'éleveur bien installé (100 vaches, 325 truies soit 8 700 porcs par an), il est sûr que la méthanisation réglera le problème : une fois réduit en digestat, l'azote sera bien plus facile à exporter que sous forme de lisier. Cette nouvelle technologie lui permettra, en plus, de produire de l'énergie et du chauffage. Quant aux difficultés de cohabitation, André Sergent a quelques idées pour les résoudre : " Tout le monde rêve d'avoir deux ou trois hectares autour de chez lui. Il faut arrêter de rêver, stopper les constructions diffuses et regrouper les gens dans des zones urbanisables. " Sans maisons dans la campagne, ni campings aux abords du littoral, il est sûr que les cultures pourraient déborder plus à l'aise...

Martine Valo

Rédigé par Philippe NOVIANT

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