Nicolas Sarkozy ne pouvait être qu'au courant dans l'affaire Bygmalion

Publié le 24 Décembre 2014

Sarkozy-RolexOn le voit et on le constate aujourd'hui : M. Nicolas Sarkozy ne pouvait être qu'au courant concernant les fausses factures éditées par Bygmalion. A ce titre, il doit être condamné pour ses dépassements de frais de campagne. Il doit aussi être condamné pour faux et usage de faux.

Un article du journal 'Le Monde' daté du 25 Septembre 2014

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Nicolas Sarkozy au cœur de l'affaire Bygmalion
L'enquête préliminaire révèle comment les proches du président-candidat ont truqué les comptes de campagne

Le scandale Bygmalion constitue bien une menace pour Nicolas Sarkozy. C'est en tout cas ce qui ressort de l'enquête préliminaire menée par les policiers, du 5 mars au 27 juin, et portant sur un système de fausse facturation mis en place par la société Bygmalion à la demande de l'UMP. Leurs investigations confirment que ces fausses factures, évaluées par la police à plus de 18,5 millions d'euros, étaient destinées à couvrir les dépenses pharaoniques de la campagne de M. Sarkozy, en 2012.

Dans un procès-verbal de synthèse du 24 juin 2014, la patronne de l'Office central de lutte contre la corruption et les infractions financières et fiscales (OCLCIFF), Christine Dufau, conclut : " La société Event et Cie - filiale de Bygmalion - , en accord avec plusieurs responsables de l'UMP, a adressé au parti des fausses factures à hauteur de 18 556 175,95 euros TTC courant 2012, faisant référence à des prestations liées notamment à des conventions, alors que les prestations réelles correspondaient à l'organisation de meetings pour la campagne présidentielle de Nicolas Sarkozy. Ces fausses factures étaient confectionnées à la demande de l'UMP, en raison de l'impossibilité de faire figurer le coût réel de ces meetings dans le compte de campagne de Nicolas Sarkozy. Les participants à ces faits, les responsables d'Event et Cie, de l'UMP et de la campagne présidentielle de Nicolas Sarkozy, semblent inextricablement liés les uns aux autres dans la décision d'établir ces fausses factures. "

Mme Dufau propose de mener des " investigations complémentaires ", qui vont notamment porter sur la connaissance qu'avait M. Sarkozy de ces artifices comptables. L'enquête préliminaire semble attester qu'il en savait beaucoup. Les enquêteurs ont saisi une note de Pierre Godet, l'expert-comptable signataire du compte de campagne, adressée le 26 avril 2012 au " candidat Nicolas Sarkozy ". Il donne le chiffre des dépenses prévisionnelles ou engagées à la date du premier tour, quatre jours plus tôt : 18 399 000 euros.

Pour M. Godet, " ce montant est supérieur à celui budgété dernièrement (16 243 000 euros) et au plafond des dépenses requises pour le premier tour (16 851 000 euros) ". Selon lui, " ce dépassement résulte principalement des coûts engagés au titre des réunions publiques, en particulier celles de Villepinte et de la place de la Concorde ". Pour ce dernier grand meeting sarkozyste, le " coût complet dépasse la prévision budgétaire de plus de 1 800 000 euros ". Il n'existait donc plus, selon M. Godet, " aucune marge de sécurité " en vue du second tour, le comptable soulignant " les conséquences extrêmement graves d'un éventuel dépassement du plafond des dépenses électorales ".

Outre l'expert-comptable, le président de l'UMP, Jean-François Copé, s'est entretenu de la situation financière de la campagne avec le candidat. En témoigne ce SMS, envoyé à Guillaume Lambert, directeur de la campagne présidentielle, par Jérôme Lavrilleux, son adjoint. Le 28 avril 2012, à 12 h 19, à quelques heures d'un meeting à Clermont-Ferrand, M. Lavrilleux écrit : " JFC - Jean-François Copé - ne vient pas à Clermont, il y est allé la semaine dernière. Louer et équiper un deuxième hall est une question de coût. Nous n'avons plus d'argent. JFC en a parlé au PR - président de la République - . "

" Je me souviens avoir rencontré, début avril, à l'UMP, Fabienne Liadzé, Jérôme Lavrilleux et Eric Cesari à ce sujet ", a raconté Franck Attal, directeur adjoint d'Event et Cie aux policiers. Mme Liadzé était la directrice des ressources de l'UMP et M. Cesari, proche de M. Sarkozy, le directeur général. " Et c'est là qu'ils me disent que le rythme des meetings va encore s'accélérer mais qu'il y a un problème d'ordre financier lié au plafond de campagne qui va être complètement dépassé, ajoute M. Attal. Jérôme Lavrilleux propose alors de facturer des prestations relatives aux meetings de campagne sur des conventions UMP. Il me demande donc de faire des fausses factures. J'ai l'impression que tous les participants à cette réunion sont piégés. A partir de ce moment-là, le comptable chez nous Matthieu Fay s'est organisé avec Fabienne Liadzé. "

M. Lavrilleux estime, lui, que les irrégularités ont été décidées après l'élection, en mai 2012, au moment de clôturer les comptes. Assurant ne pas avoir été à l'origine des fausses factures, il accuse M. Cesari : " Fin mai 2012, je crois, Eric Cesari et Fabienne Liadzé sont venus me voir dans mon bureau, à l'UMP, à l'issue d'une réunion qu'ils ont tenue avec Guillaume Lambert et Franck Attal pour parler des comptes de campagne ", a-t-il déclaré. " Ils m'ont indiqué alors qu'il était impossible de mettre toutes les dépenses dans les comptes de campagne et qu'il faudrait donc ventiler le surplus des dépenses sur le compte de l'UMP. Je ne peux pas vous dire si c'était l'idée de M. Cesari ou s'il me transmettait la décision prise par un tiers. "

Ce tiers pourrait-il être M. Copé ? Voire M. Sarkozy, averti des difficultés financières lors d'une réunion stratégique ? M. Lavrilleux assure qu'il n'en est rien : " Je n'ai jamais évoqué ce sujet avec Nicolas Sarkozy. A mon avis, il est impossible qu'il en ait été informé. " Dubitatifs, les policiers ont observé : " Comment expliquez-vous que les deux personnes principalement concernées, au vu des dispositions rigoureuses liées au financement des campagnes des partis politiques, n'aient pas été informées, alors même que cela pouvait remettre en cause le résultat des élections, par son annulation, et le devenir d'un parti, par sa déstabilisation, voire sa dissolution ? " Réponse de M. Lavrilleux : " C'est justement pour éviter les conséquences politiques prévisibles que je n'en ai pas informé Jean-François Copé et que je n'ai jamais abordé ce sujet avec l'ancien président Nicolas Sarkozy. "

Mis en cause, les sarkozystes ont suggéré l'existence d'une caisse noire mise en place par les proches de M. Copé. Celui-ci, interrogé durant l'enquête préliminaire, s'est vigoureusement défendu, assurant n'avoir jamais entendu parler de quoi que ce soit. " Tout ceci a été une révélation sidérante, a-t-il affirmé aux policiers, le 26 mai. Je n'avais jamais été informé d'irrégularités dans les dépenses et les procédures de l'UMP. "

Gérard Davet et Fabrice Lhomme

    L'enquête sur le trafic d'influence est suspendue

    L'enquête sur l'affaire de trafic d'influence à la Cour de cassation dans laquelle Nicolas Sarkozy est mis en examen a été suspendue mardi 23 septembre, le temps que soient examinées les requêtes en nullité déposées par l'ex-président et son avocat. La cour d'appel de Paris a demandé aux juges d'instruction de ne pas réaliser d'actes d'enquête tant qu'elle ne se sera pas prononcée sur les demandes d'annulation. M. Sarkozy conteste la légalité des écoutes téléphoniques dont il a été l'objet.

Rédigé par Philippe NOVIANT

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