On ne peut pas faire n'importe quoi en matière de la loi sur l'eau !

Publié le 30 Octobre 2015

On ne peut pas faire n'importe quoi en matière de la loi sur l'eau !

Roybon est dans l'impasse et c'est une bonne chose. Toutes les petites conjectures économiques ne peuvent être prises pour argent comptant quand il s'agit de protéger la nature. Aujourd'hui on dit et on affirme que l'on ne peut pas violer impunément la Loi sur l'eau pour construire des parcs de loisirs : c'est une sage décision pour l'Homme et pour la nature.

La Loi sur l'eau a été faite pour protéger la nature qui ne peut être bétonnée ad-vitam. C'est sur ce principe qu'a été posé le jugement du tribunal administratif de Grenoble.

La Nature n'est pas le paillasson de l'économie car, lorsque l'on se comporte comme tel avec elle, elle a tendance à le faire payer cher. N'oublions pas que l'Homme n'est que le locataire de la Nature. En l'oubliant, on risque de rendre notre Planète comme un lieu particulièrement hostile. L'oeuvre a déjà commencé.

Définitivement, la maison continue à brûler, cessons donc de regarder ailleurs, même et surtout par principe économique.

Un article du journal 'Le Monde' daté du 18 Juillet 2015

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Coup de frein pour le Center Parcs de Roybon
La justice a annulé un arrêté préfectoral autorisant le chantier
Le Center Parcs de Roybon (Isère) va devoir attendre. Le tribunal administratif de Grenoble a annulé, jeudi 16 juillet, un arrêté préfectoral autorisant la destruction de zones humides dans la forêt de Chambaran, pris le 3 octobre 2014, préalable au démarrage du chantier de construction de ce centre de loisirs. Les opposants – la Fédération Rhône-Alpes de protection de la nature (Frapna), adhérente de France nature environnement (FNE), l'association Pour les Chambaran sans Center Parcs (PCSCP), la Fédération de la Drôme pour la pêche et la protection du milieu aquatique… – ont accueilli favorablement cette décision, qui leur donne satisfaction sur l'un des recours déposés.

La direction du groupe Pierre & Vacances, promotrice des Center Parcs en France, a annoncé, elle, son intention de faire appel, et confirmé sa volonté de mener à bien ce projet de " dôme tropical " et de village vacances (près de 1 000 cottages), sur plus de 200 hectares, destinés à accueillir de 5 000 à 6 000 personnes.

Le tribunal a estimé que les mesures compensatoires pour " la destruction autorisée, concentrée sur une superficie d'un seul tenant de 76 hectares de zone humide forestière " n'étaient pas conformes au schéma directeur d'aménagement et de gestion des eaux du bassin Rhône-Méditerranée. Il était en effet prévu une " dispersion et un morcellement de seize sites de compensation, situés sur cinq départements, de l'Ardèche à l'Ain et au nord de la Haute-Savoie ". La loi sur l'eau instaure l'obligation de compenser – en créant ou en restaurant un milieu naturel comparable à celui détruit – toute destruction de zone humide, à raison de deux fois la superficie détruite. Pour 76 hectares détruits – à Sivens (Tarn), le projet de barrage en menaçait 13 –, le porteur du projet, la SNC Roybon Cottages, doit donc trouver 152 hectares, alors que l'arrêté préfectoral n'en avait prévu que 140. Ces zones de compensation ne doivent pas être dispersées ni éloignées du site prévu pour le Center Parcs.

" Décision incompréhensible "
" C'est une victoire pour les zones humides ; la loi sur l'eau - décembre 2006 - a des effets concrets et les promoteurs devront faire attention s'ils ne veulent pas voir leurs projets menacés, avance Stéphane Peron, président de PCSCP. La loi instaure le principe “ERC”, pour “éviter” de détruire, “réduire” l'impact et “compenser”. La compensation intervient en dernier recours, alors Pierre & Vacances n'a cherché qu'à compenser et au moindre coût. "

Cette victoire des opposants concernant la loi sur l'eau s'accompagne néanmoins d'une défaite. Ils n'ont pas obtenu gain de cause sur la défense des espèces protégées, le tribunal jugeant que l'arrêté pris " ne mettait pas en péril les espèces concernées compte tenu de la très faible superficie du projet rapportée à la surface totale de la forêt de Chambaran ". La Frapna et PCSCP vont étudier dans les prochains jours la possibilité de faire appel. " La décision du tribunal est incompréhensible : elle est basée sur une expertise qui a été réalisée par un bureau d'études payé par Pierre & Vacances, explique Stéphane Peron. Certaines espèces ne sont pas prises en compte. "

" Nous ne sommes pas satisfaits par la décision judiciaire sur les espèces protégées, commente Olivier Waille, de la Frapna. Mais, au-delà de ce jugement, on n'évoque pas le problème de l'artificialisation des terres. En décembre 2012, le préfet avait indiqué sa volonté de la diminuer de 50 % dans la décennie. On en est loin : ce Center Parcs représente 200 hectares, c'est énorme. "

Le jugement est-il de nature à bloquer définitivement le projet, devenu sensible, notamment avec la constitution d'une ZAD, zone à défendre, fin novembre 2014 ? Après la décision du tribunal administratif de Grenoble, le 11 décembre 2014, de suspendre les travaux, la ministre de l'écologie, Ségolène Royal, avait alors déclaré sur BFM-TV : " S'il faut réajuster le projet, on le fera. " Le 1er avril, le préfet avait confirmé qu'il n'y aurait pas d'évacuation de la zone tant que les recours déposés devant le tribunal ne seraient pas examinés.

Malgré l'annulation du décret, la direction de Pierre & Vacances ne compte pas renoncer à son projet. " Il y a deux jugements : l'un, favorable, sur les espèces protégées, qui reconnaît l'intérêt social et économique du projet ; l'autre, moins positif, qui nous oblige à revoir la compensation, affirme au Monde Gérard Bremond, le PDG du groupe. Nous allons continuer à rechercher un site conforme aux décisions judiciaires, notamment dans la Drôme, comme le tribunal nous y engage. " Selon lui, ce jugement n'interdit pas le Center Parcs. " Nous pourrions commencer à défricher - 40 hectares ont déjà été déboisés - , puisque l'arrêté sur les espèces a été validé, mais nous ne pourrions pas construire, à cause de celui sur l'eau, alors nous n'avons pas intérêt à nous précipiter ", a ajouté M. Bremond.

Pierre & Vacances estime qu'il faudra de douze à dix-huit mois pour valider l'ensemble du dossier au niveau juridique, puis trois ans pour construire le Center Parcs. L'ouverture initialement prévue en 2011 ne pourrait pas intervenir avant 2020.

" C'est le modèle des Center Parcs qui est remis en question, estime au contraire Benoît Hartmann, porte-parole de FNE. Est-il nécessaire d'artificialiser la nature pour la faire aimer ? " A ces arguments, la direction de Pierre & Vacances répond par un chiffre : " On vient d'ouvrir un centre dans la Vienne et le taux d'occupation est de 100 %, ce qui prouve le bien-fondé de ces projets ", fait valoir Gérard Brémond.

Rémi Barroux

Rédigé par Philippe NOVIANT

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