Publié le 31 Octobre 2016
La France a du mal à convaincre qu'elle peut être un lieu idéal pour investir. Las, cette situation risque de devenir encore plus problématique dans le futur : quand la CGT refuse toute réforme en matière de droit du travail en bloquant le pays, elle donne une image désastreuse de la France, ce qui conduira à coups sûrs à ce que des investisseurs soient encore plus frileux à l'idée de monter une entreprise en France !
La mondialisation est une réalité et personne n'y peut rien, pas même la CGT ! Il faut donc savoir vivre avec son temps et bloquer encore et toujours toutes les réformes ne peut qu'aboutir à ce que notre pays continue à dégringoler en matière économique !
Quand on traite les patrons comme des voyous, ils vont voir ailleurs : c'est normal car c'est humain !
Il faut donc lutter contre ces syndicats contestataires qui offrent une image d'immobilisme permanent de notre pays : en voulant garder leurs acquis dans un monde qui bouge, ils n'aboutissent qu'au fait que la France se mette en permanence une balle dans le pied !
Un article du journal 'Le Monde' daté du 25 mai 2016
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Investissements étrangers : le décrochage français
Jamais l'Europe n'a accueilli autant de projets internationaux. Mais l'Hexagone reste à l'écart de la vague
Emilian Bera est un homme heureux. " C'est un moment historique pour notre ville ", exulte le maire de Jawor, en Pologne. Jusqu'à présent, Jawor n'était connue que pour son église de la Paix, un grand bâtiment à charpente de bois inscrit au Patrimoine mondial de l'Unesco. Une cathédrale industrielle s'y ajoutera bientôt : le 4 mai, Daimler a choisi cette ville de Silésie pour y implanter sa prochaine usine. Elle produira des moteurs Mercedes dès 2019. Un investissement de 500 millions d'euros, rien que pour la première tranche. A la clé, des centaines d'emplois.
Des investissements de ce type, petits ou grands, l'Europe en compte de plus en plus. En 2015, pas moins de 5 083 projets de construction ou d'extension d'entrepôts, de sièges sociaux, de centres de recherche… y ont été annoncés par des groupes internationaux, selon une étude publiée mardi 24 mai par le cabinet de conseil EY. C'est 14 % de plus qu'en 2014. " Jamais l'Europe n'avait accueilli autant d'implantations internationales, précise Marc Lhermitte, l'un des auteurs de l'étude. Clairement, l'Europe attire et rassure. "
La moitié des projets provient de groupes européens qui se développent dans un autre pays du continent. L'autre moitié, d'investisseurs américains, chinois, etc. L'ensemble devrait aboutir à la création de 218 000 emplois, un record.
Qui profite de cette spectaculaire vague d'investissements ? La Grande-Bretagne fait la course en tête, et creuse l'écart avec les autres Etats. A elle seule, elle concentre un nouveau projet sur cinq, avec un succès spécial pour le Grand Londres. Un pied dans l'Europe, un pied en dehors, le pays aimante particulièrement le monde de la finance. Un élan que l'éventuelle sortie de l'Union européenne pourrait toutefois remettre en cause.
Deuxième grande terre d'accueil des investissements étrangers, l'Allemagne poursuit elle aussi sa trajectoire ascendante. " Elle bénéficie de son statut de première économie européenne, et de porte d'entrée pour l'est de l'Europe et la Russie ", analyse M. Lhermitte.
La Pologne, la Hongrie et la Roumanie font également partie des grands gagnants du mouvement actuel. Le cas Daimler est exemplaire. Pour sa nouvelle usine de moteurs, le constructeur de voitures de luxe en plein essor a hésité entre ces trois pays et quelques autres, comme la Russie et la Slovaquie. Il a finalement choisi Jawor, une ville située à seulement 100 kilomètres de la frontière allemande, mais où la main-d'œuvre revient trois ou quatre fois moins cher qu'en Allemagne.
Une tendance lourde
Du personnel qualifié peu coûteux, des routes et des chemins de fer de qualité, un tissu de fournisseurs assez dense : au-delà de Jawor, toute la Pologne attire de plus en plus. Le nombre de projets d'implantation étrangère y a grimpé de… 60 % en 2015, passant de 132 à 211, selon les pointages d'EY. La Pologne est désormais le septième pays d'Europe en nombre de projets étrangers, et le deuxième en termes d'emplois créés par ces investissements, derrière le Royaume-Uni. " C'est une sorte de nouvelle Espagne, commentent les experts d'EY. Le pays prend son envol, comme l'Espagne après Franco. "
La France, elle, ne bénéficie pas du mouvement. Le nombre de projets s'y est même tassé de 2 % en 2015, à 598. Des 15 pays européens recevant le plus d'implantations étrangères, c'est le seul à faire du sur-place.
L'année 2015 le confirme : malgré les efforts des pouvoirs publics, les " J'aime l'entreprise " répétés en toutes les langues par le premier ministre, Manuel Valls, les investisseurs étrangers privilégient de plus en plus d'autres destinations. Une tendance lourde. En 2006, la France représentait encore 16 % des implantations étrangères recensées par EY en Europe. Sa " part de marché " est tombée en 2015 à 12 %, son plus bas niveau historique. En nombre d'emplois, la part de l'Hexagone n'est même plus que de 6 %.
Car si elle demeure au troisième rang européen en nombre de projets, la France concentre désormais surtout des investissements de petite taille. Des agences commerciales. Des bureaux de représentation. Très peu de nouvelles usines : plutôt des extensions de sites existants, à l'image de ce qu'ont prévu le laboratoire danois Novo Nordisk à Chartres (Eure-et-Loir) et le suisse Novartis à Huningue (Haut-Rhin). " La perception de notre compétitivité-prix reste très dégradée, explique M. Lhermitte. Les décideurs internationaux sont rebutés par nos impôts et charges, sans compter un droit du travail jugé trop lourd. "
La France conserve des atouts. Elle demeure le premier pays européen en nombre d'implantations industrielles étrangères, même si l'emploi ne suit pas. Et le nombre de centres de recherche et développement accueillis en 2015 a presque doublé, grâce au canadien Oxy'Nov, à l'américain Datalog et quelques autres. Alors qu'elle décrochait, la France rattrape ici une partie de son retard sur le Royaume-Uni et l'Allemagne. Le crédit d'impôt recherche y est sans doute pour quelque chose.
En ce qui concerne les sièges sociaux et les centres de décision, en revanche, la France est en train de perdre pied. Elle attire dix fois moins de sièges que la Grande-Bretagne et ne fait désormais plus partie des cinq premiers pays d'accueil en Europe. Les experts d'EY se montrent pressants : " Il faut construire un plan d'urgence. " La balle est dans le camp de l'Etat.
Denis Cosnard
Publié le 28 Octobre 2016
Votre vote au Sénat Philippe Noviant 22 mai 2016 à 17:16 À : CHIRON Jacques
J'ai appris aujourd'hui que vous vous étiez abstenus lors d'un vote concernant l'interdiction des pesticides au Sénat.
Qu'est-ce qui peut justifier un tel vote quand on parle de santé humaine liée à la présence de molécules dont le soupçon cancérigène est fortement avéré ?
Qu'est-ce qui peut justifier un tel vote quand on parle de la santé des abeilles dont ces substances sont fortement suspectées comme participant à leur destruction ?
Le principe de précaution élémentaire aurait du vous conduire à préserver l'intérêt général et voter pour l'interdiction de molécules ayant de tels soupçons.
Vous n'en avez rien fait.
Je vous soupçonne fortement d'avoir oublié l'intérêt général lors de ce vote. Je vous rappelle que vous êtes élus par le peuple et avez le devoir, de par vos fonctions, de mettre l'intérêt général en priorité de vos attributions.
Je surveillerai attentivement vos actions dans le futur...
Cordialement,
Philippe NOVIANT
Publié le 27 Octobre 2016
Messieurs les pourris, merci !
Philippe Noviant 22 mai 2016 à 17:10
À : SAVIN Michel <m.savin@senat.fr>, SAUGEY Bernard <bernard.saugey@wanadoo.fr>
Ne cherchez pas un bonsoir dans ma missive, il n'y en a pas...
J'ai appris aujourd'hui que vous aviez voté contre l'interdiction des pesticides lors d'un vote au sénat.
Qu'est-ce qui peut justifier un tel vote quand on parle de santé humaine liée à la présence de molécules dont le soupçon cancérigène est fortement avéré ?
Qu'est-ce qui peut justifier un tel vote quand on parle de la santé des abeilles dont ces substances sont fortement suspectées comme participant à leur destruction ?
Le principe de précaution élémentaire aurait du vous conduire à préserver l'intérêt général.
Vous n'en avez rien fait.
VOUS ETES DES POURRITURES ET FAITES HONTE A VOS FONCTIONS !
VOUS ETES DES SOUS MERDE (...je tiens à m'excuser auprès de la merde, qui elle, est utile dans l'évacuation des déchets humains, de l'avoir comparée à des moins que rien de sénateurs ayant oublié l'intérêt général...).
Je ne vous salue, bien entendu, pas...
Philippe NOVIANT
Publié le 26 Octobre 2016
Je suis frappé de l'incompétence généralisée de tous ces ex-ministres qui nous ont gouvernés récemment...
Et si c'était cela la cause du déclin de la France ?
Et si ce déclin était motivé par un manque total de connaissances de ces ministres ?
Et si ce déclin était dû à la totale déconnexion d'avec la réalité de ces personnes qui ont prétendu gouverner le pays ?
Je reprendrai leur propos et démontrerai que leur travail n'a pas été au niveau de celui exigé pour diriger un pays comme le nôtre...
1. " Ce qu'on paie aujourd'hui, c'est ni plus ni moins quinze ans d'absence de réflexion idéologique au sens noble du terme, estime ainsi Dominique Bertinotti, ministre déléguée à la famille de mai 2012 à mars 2014 : il n'y a rien de plus faux... Ce n'est pas l'idéologie qui doit être au coeur d'une action, mais le pragmatisme... Le pragmatisme doit dominer en ce sens qu'une politique ne peut être que la somme d'actions équilibrées... Le manque idéologique n'est pas la cause de l'échec, c'est cette volonté d'aller vers une idéologie de gauche ou de droite qui l'est, car on oublie le citoyen pour se fier uniquement à ses idées...
2. "Or, pendant la campagne présidentielle, on n'en a pas tiré toutes les conséquences ; on n'a pas -intégré la réflexion de Blum sur l'articulation entre conquête et exercice du pouvoir.". On laisse entendre que l'échec est dû au fait qu'on n'ait pas lu Blum et que l'on n'ait pas suffisamment dit que l'on assume l'économie de marché. Mais que veut dire "assumer l'économie de marché " ? Ca ne veut rien dire du tout, hormis le fait que l'on s'enferme encore et toujours dans une idéologie économique néfaste à tous ! De nouveau, Mme Nicole Bricq est totalement hors sujet !
3. M. Benoit Hamon s'est aussi laissé enfermé dans ses attributions car le programme de M. François Hollande ne mentionnait pas la manière de faire de l'économie sociale et solidaire... Et alors ? Il n'avait qu'à prendre ses dossiers et les traiter ! Il lui faut un texte pour qu'il puisse le traiter ? Il n'y a pas suffisamment de problèmes en France ? Ca ne lui serait pas venu à l'idée de faire un tour de France pour poser la question aux Français pour savoir de quoi ils manquaient ? C'est sûr que c'est très difficile de travailler pour l'intérêt général quand on reste enfermé dans son ministère et que l'on oublie le peuple !
4. M. Thierry Repentin regrette d'avoir eu à s'occuper de formation professionnelle à la place du logement. Et alors ? Il n'y a rien à faire en formation professionnelle ? Tous les acteurs économiques disent que la France a un vrai retard en la matière et M. Thierry Repentin s'apitoie sur son sort ? Si il faut deux ou trois mois pour s'accaparer un dossier, qu'il les prenne ! Personne ne lui a demandé d'ouvrir sa bouche sans maîtriser son dossier ! Qu'il travaille en silence mais qu'il travaille ! Franchement, je ne vois pas où réside le problème quand il s'agit de travailler des nouveaux dossiers... On les prend et on les traite et s'il faut du temps pour les maitriser, qu'on prenne ce temps car on a 5 ans pour produire des résultats... Après, je rejoins sa façon de voir sur sa perte de fonctions au bout de 9 mois... Quand on est nommé ministre, il faut le temps pour gérer les dossiers. La faute politique en revient donc à M. François Hollande concernant son changement d'affectation. Après, concernant le fait que l'administration prenne ses marques par rapport aux politiques, il faut savoir taper du poing sur la table en montrant qui est le patron...
5. Mme Marylise Lebranchu prend les gens pour des imbéciles ! Tous les Français savent que la France est dans une mouise noire en matière économique ! Le pourcentage de son endettement représente près de 97% de son PIB ! Tout le monde sait ça et Mme Marylise Lebranchu déplore que l'on ne l'ait pas dit aux Français ? Les Français n'ont pas accepté la hausse d'impôt non pas parce qu'ils ne connaissaient pas la situation mais parce que la situation a été faite par des politiques qui sortent des mêmes écoles et ont eu la même formation ! A quoi sert d'avoir des gens qui font tant d'études s'ils ne savent pas gérer un budget et qu'ils ne savent que demander du fric aux Français suite à leur décisions désastreuses ? Là aussi, Mme Marylise Lebranchu a une bien mauvaise analyse de la situation !
6. Pareil pour Mme Nicole Bricq : expliquer ne sert à rien ! Il faut engager des réformes ! A la limite, on peut expliquer que des réformes économiques de grande ampleur sont nécessaires : il faut faire en sorte que les patrons embauchent et, pour cela, freiner leur charge et fournir du personnel qualifié... Pour faciliter l'embauche, il faut écouter les patrons : il faut rendre les coûts salariaux moins importants à la fois en réduisant fortement les charges et à la fois en gagnant sur les temps de formation des salariés... S'il doit y avoir une explication à fournir aux Français, ça doit être celle-là et elle doit obligatoirement avoir lieu en début de mandat car ce genre de décisions économiques commencent à porter leur fruit au bout de 2 ans au minimum...
7. Hors sujet complet aussi concernant Mme Michèle Delaunay : la priorité des réformes ce n'était pas la réforme des régions... Il fallait faire des réformes pour la lutte contre le chômage : c'était cela la priorité !
8. Mme Marylise Lebranchu n'avait pas forcément tort d'insister sur le fait de parler d'Europe et du monde pour expliquer que notre pays était dans une obligation de bouger dans un contexte de mondialisation à la concurrence économique exacerbée... Las, l'incompétence de notre président qui lui aurait répondu "ça n'intéresse personne" est prouvée : on ne donne pas un discours pour intéresser mais pour informer ! C'est aussi par cette conception surannée de la politique que nos dirigeants faillissent !
9. Mme Nicole Bricq a plutôt raison de fustiger la présence de deux têtes pensantes à l'économie. Néanmoins son analyse n'est pas complète : c'est parce que ces deux têtes ont une vision idéologique opposée en matière économique que l'échec est présent ! Ce n'est pas la présence des deux têtes qui est néfaste, mais bel et bien le fait que ces deux têtes ne fonctionnent pas de manière pragmatique, qui a immobilisé notre pays en matière économique ! Le simple fait que M. Arnaud Montebourg aille faire des études d'économie à la sortie de ses fonctions est la preuve de la pertinence de ces propos ! Quand on recrute des incompétents, rien d'étonnant à ce que notre pays ne progresse pas !
10. Mme Marylise Lebranchu oublie aussi joyeusement que son budget ne lui appartient pas. La politique est réalisée dans l'intérêt général et s'il faut plus de moyens dans un ministère que dans un autre, tout le monde doit l'accepter et doit savoir jouer collectif. Mme Aurélie Filippetti et M. Frédéric Cuvillier ont donc tort de critiquer le système bicéphale de l'exécutif. Ce n'est pas lui qui est en cause mais uniquement le fait que les ministres veuillent jouer perso en voulant faire croire que ce sont eux qui dépensent alors qu'ils ne que gérer l'argent public !
11. Même hors sujet idéologique pour M. Dominique Bertinotti et Mme Christiane Taubira : les sujets de société doivent être gérés par les Français eux-mêmes et non pas par une idéologie fondée sur telle ou telle valeur. Dans le cadre du "mariage pour tous", un référendum aurait du avoir lieu car seul celui-ci est garant de la pérennité du "vivre-ensemble". En ce sens, les valeurs idéologiques "gauche" contre "droite" sont purement et simplement dépassées...
12. Mme Aurélie Filippetti pointe une trahison sur les engagements de l'exécutif. Ce n'est qu'en partie vrai, car on oublie que la politique consiste d'abord à gérer des situations actuelles. Ainsi, le programme doit devenir accessoire : on doit plus s'attacher au monde de gouvernance que de savoir si on va faire telle ou telle action. En politique comme en toutes choses, la réalité d'aujourd'hui n'est pas nécessairement celle de demain. Il faut donc savoir sortir de cette logique du "Père-Noël" qui nous enferme dans une sorte de liste de cadeaux et où la prime va à celui qui promet le plus. La politique Française vaut plus que de simples souhaits couchés sur le papier où le populisme et la démagogie priment sur une saine gestion de notre pays. Là aussi, la posture idéologique néfaste à la gestion de notre pays est patente...
13. M. Benoit Hamon, M. François Lamy et Mme Michèle Delaunay, en parlant de valeurs de gauche, en reviennent à l'idéologie qui mine encore et toujours l'action politique.
Pour toutes ces raisons, notre gouvernement a été et reste foncièrement mauvais car lourdement incompétent. Il est juste dommage que ces anciens ministres n'aient pas progressé lors de leur passage à ces hontes fonctions...
Un article du journal 'Le Monde' daté du 21 mai 2016
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Fin de règne
Politique Dix anciens ministres dressent, à un an de la fin du quinquennat, un bilan sans pitié du mandat de François Hollande
Il n'y a pas si longtemps, quand ils recevaient la presse dans leur -ministère et consentaient à s'épancher, c'était toujours à une condition : que leurs doutes, leurs états d'âme, leurs frustrations ou leurs agacements ne se voient pas -relatés, le lendemain, dans les -colonnes des journaux. " Ce que je vous dis là est évidemment off " : tel était le prix, à l'époque, de leurs confidences.
Depuis, ils ont quitté le gouvernement, et c'est à la buvette de l'Assemblée ou du Sénat, dans leur bureau de parlementaire ou au -bistro qu'ils donnent désormais rendez-vous. Et ce qui frappe, d'emblée, c'est la liberté de parole qu'ils ont retrouvée pour répondre à une question qu'ils n'imaginaient pas devoir se poser, il y a quatre ans presque jour pour jour, le 16 mai 2012, lors de leur entrée au premier gouvernement de François -Hollande : " Comment en est-on arrivé là ? " Autrement dit, comment expliquent-ils, -quatre ans plus tard, que le président de la -République -n'apparaisse même pas en -mesure de se -qualifier pour le second tour de la prochaine élection présidentielle, que le Parti -socialiste soit en miettes, et que la -défiance de l'électorat de gauche à l'égard du gouvernement -atteigne des records ?
A écouter ces ex-ministres qui, à la différence de leurs anciennes collègues Cécile Duflot, -Delphine Batho ou Christiane Taubira, n'ont pas (encore) consacré de livre à leur passage au gouvernement, le malentendu date bien d'avant 2012. " Ce qu'on paie aujourd'hui, c'est ni plus ni moins quinze ans d'absence de réflexion idéologique au sens noble du terme, estime ainsi Dominique Bertinotti, ministre déléguée à la famille de mai 2012 à mars 2014. Il y a dix ans, quand Ségolène Royal a essayé de réinventer quelque chose autour de “l'ordre juste” et de la “démocratie participative”, toute la direction du PS l'a moquée. Après sa défaite, en 2007, on a mis le couvercle sur toutes les idées nouvelles, on est revenu à un discours très traditionnel et au fond très paresseux. On a pris collectivement des années de retard sur l'évolution de la société ", ajoute l'ancienne maire socialiste du 4e arrondissement de Paris, aujourd'hui membre du Conseil d'Etat.
Chargée de l'écologie, puis du commerce -extérieur, sous Jean-Marc Ayrault, Nicole Bricq porte elle aussi un regard fort critique sur la longue cure d'opposition traversée par le PS après la défaite de Lionel Jospin à la présidentielle de 2002. " Nous, socialistes, devons -reconnaître que nous n'avons pas assez travaillé avant 2012. Regardez la déclaration de principes que le PS a publiée en 2008 : pour la première fois, il est dit très clairement que nous assumons l'économie de marché. Or, pendant la campagne présidentielle, on n'en a pas tiré toutes les conséquences ; on n'a pas -intégré la réflexion de Blum sur l'articulation entre conquête et exercice du pouvoir. Si tout avait été clair au moment de l'élection, les frondeurs n'auraient pas existé, et ça nous aurait évité tout un tas de problèmes -depuis quatre ans ", explique cette proche de Pierre Moscovici, redevenue sénatrice de Seine-et-Marne depuis sa sortie du gouvernement, en mars 2014.
Rétrospectivement, beaucoup sont convaincus que ce manque de préparation à l'exercice du pouvoir a lourdement pesé sur les débuts du quinquennat, marqué par un procès -précoce en amateurisme. A les écouter, cela a joué à plusieurs niveaux. Celui des compétences, d'abord. Certains le reconnaissent aujourd'hui : au moment de leur entrée au gouvernement, ils étaient peu armés pour les dossiers qui leur furent confiés. C'est le cas de Benoît Hamon. " En 2012, on me charge de l'économie sociale et solidaire et de la consommation. Or, en tout et pour tout, c'était trois -lignes dans le programme de François -Hollande. Bref, je me retrouve sans feuille de route précise et avec une besace, au départ, très légère. Sauf dans certains domaines, comme l'éducation nationale, où on avait vraiment bossé sur des idées précises, tout ou presque était à inventer ", admet aujourd'hui le -député des Yvelines.
Thierry Repentin garde, lui aussi, un souvenir compliqué de ses débuts au gouvernement. Contrairement à d'autres, il avait, avant 2012, un vrai champ d'expertise, en l'occurrence celui du logement, secteur dont il était responsable dans l'équipe de campagne de François Hollande après avoir été, pendant quatre ans, président de l'Union sociale pour l'habitat. Pourtant, lors de la constitution du premier gouvernement de Jean-Marc Ayrault, pour des raisons d'équilibre politique, le portefeuille lui échappe au profit de l'écologiste Cécile Duflot. Et c'est finalement la formation professionnelle qu'il récupère, un mois plus tard, après les élections -législatives de juin 2012. " J'avais travaillé pendant des mois sur la politique du logement, et je me retrouve du jour au lendemain chargé d'un autre dossier d'une très grande complexité. Forcément, dans ce genre de situation, même en bossant nuit et jour, il vous faut au moins deux ou trois mois pour commencer à maîtriser le sujet ", raconte l'ancien sénateur de Savoie, pour qui ces premiers mois ont été d'autant plus difficiles que l'appareil du PS était à l'époque défaillant. " Dans cette première période, le PS était totalement absent pour accompagner le gouvernement auprès de l'opinion. Ça a mis les ministres seuls face à l'opinion, les obligeant à monter en première ligne sur tout un tas de sujets sur lesquels ils n'étaient pas censés intervenir. "
Erreurs dans la dramaturgie
Pour Thierry Repentin, l'histoire ne s'arrête pas là. En mars 2013, neuf mois après avoir -décroché son premier maroquin, le départ de Jérôme Cahuzac le propulse aux affaires européennes, où il doit remplacer au pied levé Bernard Cazeneuve, lui-même nommé à Bercy pour succéder au ministre délégué au budget débarqué pour cause d'évasion fiscale. " J'étais en pleine réunion de cabinet sur -la finalisation de la réforme de la formation professionnelle et de l'apprentissage quand on m'a appelé pour me demander de bouger. J'ai tout laissé en plan, et j'ai atterri aux affaires européennes avec une nouvelle fois des dossiers hypertechniques à récupérer, sur les OGM, le traité de libre-échange transatlantique, etc. Une fois de plus, je suis reparti de zéro, avec des réseaux à constituer et une administration à découvrir. "
L'expérience durera cette fois un an : au lendemain de la débâcle socialiste aux municipales de mars 2014, Thierry Repentin doit laisser la place à Harlem Désir, exfiltré de la direction du PS, et recasé aux affaires européennes. Aujourd'hui moins exposé mais plus à l'aise dans ses petits bureaux de délégué interministériel à la mixité sociale dans l'habitat, poste qu'il occupe depuis avril 2015, l'ancien sénateur le reconnaît volontiers : " C'est très difficile, quand vous êtes ministre dans ces -conditions, de réformer en profondeur. Si vous n'êtes de passage que pour quelques mois et que vous n'avez pas, en arrivant, une bonne connaissance de -votre sujet, l'administration prend très vite le dessus et, comme ministre, vous ne faites au fond que courir après un monde qui change. "
Comme au théâtre, si le casting est essentiel, la dramaturgie l'est tout autant. Or, sur ce point aussi, plusieurs anciens ministres -reconnaissent aujourd'hui des erreurs dont ils considèrent, avec le recul, qu'elles jouèrent un rôle central dans le fossé qui se creusa, dès les premiers mois, entre le gouvernement et les Français. Première de ces erreurs : ne pas avoir, d'emblée, dit la " vérité " sur la situation du pays. " La décision prise en juillet 2012 de ne pas nous appuyer sur le rapport extrêmement sombre publié à l'époque par la Cour des comptes continue de nous coûter très cher quatre ans après ", estime ainsi Marylise Lebranchu.
Comme d'autres, l'ancienne ministre de la -décentralisation, de la fonction publique et de la réforme de l'Etat, débarquée du gouvernement lors du dernier remaniement, en février, se dit aujourd'hui " étonnée " par un tel choix, lequel fut d'ailleurs plus celui de François -Hollande que de Jean-Marc Ayrault. " Il ne s'agissait pas de dramatiser car la situation était en soi dramatique. Il suffisait de dire la -vérité de façon quelque peu solennelle, à savoir que, vu l'état des comptes publics, on ne pouvait rien faire sans augmenter les impôts. Si on avait joué cartes sur table, les Français auraient -accepté les hausses d'impôts. C'est comme dans une -famille : quand on est à découvert, on comprend qu'il faut se serrer la ceinture. A la place, on n'a ni expliqué la société dans laquelle on se trouvait ni parlé de la société à laquelle on -rêvait. Du coup, personne n'a vraiment compris pourquoi nous avons fait tel ou tel choix. "
Pour Nicole Bricq, là réside également l'erreur originelle du quinquennat. Comme -Marylise Lebranchu et bien d'autres, la sénatrice de Seine-et-Marne regrette l'absence de " discours fondateur " au début du quinquennat. " Les Français n'aiment pas qu'on leur -raconte des histoires, mais ils veulent qu'on leur raconte une histoire. Or, ce récit du quinquennat, qui aurait dû partir de la situation de la France telle que nous l'avons trouvée, n'a été fait ni par François Hollande, qui n'est pas un théoricien, ni par Jean-Marc Ayrault, qui n'est pas un communicant. Du coup, à la place de ce récit fondateur, qu'avons-nous retenu du premier été ? L'image d'un président se voulant -ordinaire et partant en vacances avec sa valise à roulettes. Bref, quelque chose qui ne collait pas avec la situation extrêmement difficile dans laquelle était la France à l'époque. Or, c'est dommage, car quand vous regardez rétrospectivement les choses, il y a une cohérence dans la politique qui a été menée. Seulement, il aurait fallu l'expliciter… "
A écouter d'autres anciens ministres, une deuxième erreur, en termes de pure dramaturgie politique, aurait plombé les débuts du -quinquennat. Celle-ci concerne l'agenda des -réformes, un agenda que l'ancienne ministre déléguée aux personnes âgées, Michèle Delaunay, n'hésite pas aujourd'hui à qualifier de -" catastrophique ". Elle aussi estime qu'il aurait fallu, en début de mandat, " un vrai discours d'appel à l'effort national à la Mendès France ". Mais elle va plus loin : " Il aurait fallu prendre au tout -début quatre ou cinq décisions à la fois -ambitieuses et simples à comprendre, par exemple dire d'emblée qu'on allait créer dix grandes régions sur le modèle des Länder allemands. Or, à la place, qu'a-t-on fait ? D'un côté, en matière de lutte contre la pauvreté, on a saupoudré des milliards à droite et à gauche, au lieu de les -concentrer sur une mesure forte qui change la vie quotidienne, et, de l'autre, on a parlé pendant des mois de réformes, comme le crédit d'impôt pour la compétitivité et l'emploi - CICE - , dont le nom et le fonctionnement étaient totalement -incompréhensibles pour la plupart des gens. "
" Des réunions de comptables "
Ministre délégué puis secrétaire d'Etat chargé des transports de 2012 à 2014, Frédéric -Cuvillier est du même avis : " En réalité, on a fait énormément de choses, mais on a oublié de les hiérarchiser et de montrer l'impact qu'elles allaient avoir dans la vie quotidienne de nos concitoyens. " Marylise Lebranchu va dans le même sens : " Le problème du vocabulaire est essentiel : on a dit à longueur de discours qu'on était désormais pour la “politique de l'offre”. Mais une telle expression ne dit rien à personne. Inversement, il y a des sujets dont on a refusé de parler. Beaucoup, comme moi, ont pendant des mois poussé le président de la -République à parler de l'Europe et du monde, afin d'expliquer nos choix, notamment en -matière de politique économique, dans le -contexte de la mondialisation. Il nous répondait : “Ça n'intéresse personne.” "
La politique économique. Sur ce point, la -plupart reconnaissent aujourd'hui que les -débuts furent difficilement compréhensibles. " A Bercy, tout le monde a vu qu'il y avait deux -lignes politiques : Montebourg était le ministre de la démondialisation, et Moscovici et moi, nous étions les ministres de la mondialisation, résume aujourd'hui Nicole Bricq. Selon l'étage auquel on se trouvait, on entendait une chose et son contraire. " Fleur Pellerin, elle--même à Bercy de 2012 à 2014, garde également un souvenir particulier de ses années de ministre -déléguée chargée des PME, de l'innovation et de l'économie numérique : " Les acteurs économiques ont besoin de clarté et de visibilité, ce qui est difficilement compatible avec le fait d'avoir à Bercy des gens qui ont une vision totalement opposée de l'économie. On ne peut pas avoir un social-libéral aux finances comme Moscovici et un colbertiste opposé à la mondialisation à l'économie. Les gens n'ont rien compris. Comment voulez-vous, ensuite, qu'ils nous fassent confiance ? "
Pourquoi cette " politique des deux fers au feu ", pour reprendre l'expression de François Lamy, ministre délégué à la ville de 2012 à 2014 ? Son analyse rejoint celle de la plupart de ses ex-collègues : ce manque de -cohérence dans l'action du gouvernement à ses débuts serait lié à la fois aux conséquences de la primaire socialiste de 2011, au choix de Jean-Marc Ayrault comme premier ministre et à la façon même dont s'est organisée la gouvernance dans les premiers mois du quinquennat. " Face à une personnalité forte comme Montebourg, qui se sentait protégé par son score à la primaire, -Ayrault a très vite souffert d'un manque de poids politique, et ça s'est ressenti dans les arbitrages, explique le député de l'Essonne, proche de Martine Aubry. Il faut ajouter à cela la personnalité du président de la République, dont il est souvent difficile de -savoir ce qu'il pense réellement et qui sème -volontiers le doute sur ses -intentions, ce qui complique les choses. "
Plusieurs anciens ministres voient aussi le manque d'esprit collectif au sein du gouvernement comme une source essentielle des problèmes rencontrés depuis 2012. " Dès le début, ce qui m'a frappé, c'est l'absence de -ciment politique dans l'équipe, raconte Benoît Hamon. Chacun y allait avec ses notes, on parlait les uns après les autres, on ne s'interpellait pas, on ne discutait pas. Chacun était dans son couloir de nage, sans aucun sens de la collégialité. Avec un tel fonctionnement, quand on vous assène à longueur de journée le même discours sur les déficits publics en vous expliquant à coups de graphiques qu'on ne peut rien faire, eh bien, on clôt le débat avant même qu'il n'ait lieu. C'est la -tyrannie du PowerPoint qui tue l'action politique. "
Marylise Lebranchu, avec d'autres mots, ne dit pas autre chose quand elle compare sa dernière expérience de ministre aux précédentes, secrétaire d'Etat au PME, de 1997 à 2000, puis garde des sceaux, de 2000 à 2002, pendant la cohabitation. " Je me souviens de nos réunions, le samedi matin, au début du quinquennat, sur la stratégie de dépense publique : c'était des réunions de comptables, on n'était que dans l'obsession de dépenser moins. Du coup chacun se faisait tout petit en se -disant : “Pourvu qu'on ne me sucre pas 1 milliard par-ci ou 2 milliards par-là.” Ce genre de situation ne peut pas créer du collectif. C'était très différent sous Jospin : on discutait, on s'engueulait, mais au final, on faisait tous bloc -derrière le premier ministre. "
" Impuissance volontaire "
Dans un tel contexte de pénurie budgétaire, plusieurs anciens ministres estiment que la structure même des institutions a aggravé la -situation. Chargée de la culture de 2012 à 2014, Aurélie Filippetti décrit ainsi les choses : " Pour négocier son budget, le ministre de la culture, qui est par définition vu comme un ministre -dépensier, essaie de sauver les meubles en allant voir le premier ministre ou le président de la -République. Il peut arriver qu'on -contourne l'un pour obtenir un bon arbitrage de l'autre. En réalité, ce système dyarchique est -absurde, parce qu'il crée forcément des rivalités et des tensions entre Matignon et l'Elysée. " -Frédéric Cuvillier, redevenu député du Pas-de-Calais et maire de Boulogne-sur-Mer après deux ans passés au gouvernement, en vient aujourd'hui à la même -conclusion : " Le bicéphalisme de l'exécutif pose un vrai problème. Soit il faut supprimer le premier ministre, soit il faut affaiblir le président de la -République, mais on ne peut pas continuer dans cet entre-deux ", estime-t-il. Pour l'ancien ministre des transports, cette " clarification " est d'autant plus nécessaire que le passage au quinquennat a raccourci le temps dont dispose l'exécutif pour mener à bien son agenda de -réformes. " La France est un pays -extrêmement difficile à réformer en raison de pesanteurs et de conservatismes en tout genre. On l'a vu avec la réforme territoriale. Il faut donc de la clarté dans les institutions ", estime-t-il.
Chargée, aux côtés de Christiane Taubira, de la mise en œuvre du mariage pour tous, -Dominique Bertinotti analyse le cheminement long et chaotique de cette réforme à l'aune de ces différents problèmes de gouvernance. L'obsession pour les questions économiques et budgétaires, d'abord. " En conseil des -ministres, on ne parlait que d'économie et un peu de politique étrangère, jamais nous n'avons abordé en profondeur les questions de société comme celle de la famille. J'ai très vite ressenti que, à l'Elysée et à Matignon, le mariage pour tous était un simple marqueur politique, qu'il fallait le faire parce que cela montrait qu'on -cochait en quelque sorte une case de notre programme, mais il n'y avait pas, derrière tout cela, de réflexion approfondie. " S'est ajoutée, selon elle, une seconde obsession qui, rétrospectivement, a coûté cher au gouvernement auprès de son propre électorat, sans pour autant lui apporter quoi que ce soit dans le camp d'en face. " Le président de la République a pensé que sur les questions -sociétales, on pouvait avancer par consensus. Donc, on a écouté et reçu tout le monde. Mais la politique, ça ne peut pas toujours être la synthèse. C'est une lecture du monde et de l'avenir qui n'est pas la même selon qu'on est à droite ou à gauche. Pour moi, nous avions été élus avec un engagement très clair qui, par -nature, ne pouvait pas déboucher sur un -compromis qui plaise à tout le monde. "
Ce que pointe ici l'ancienne ministre déléguée à la famille fait écho, en réalité, à un problème plus général, que la plupart des anciens ministres que nous avons interrogés mettent, chacun à sa façon, en lumière : une progressive prise de distance, au fil des mois, vis-à-vis des engagements de la campagne présidentielle. Pour les anciens ministres les plus identifiés à l'aile gauche du PS, le constat s'énonce sur le mode de la trahison. C'est le cas d'Aurélie Filippetti : " Le gouvernement s'est peu à peu aligné sur une ligne libérale-sécuritaire qui est aux antipodes de ce que François Hollande avait promis en 2012. Le président qui n'aimait pas les riches, en fait, n'aime que les riches. Je suis consternée de la manière dont François Hollande et Manuel Valls se sont fondus dans les intérêts de la classe dominante ", explique la députée de la Moselle.
Ce constat est partagé, sans surprise, par Benoît Hamon, figure de l'aile gauche du PS. " On a fait des choses, notamment dans le -domaine de la santé et de l'éducation. Mais pour le reste, on a renoncé aux transformations essentielles qui auraient pu nous faire basculer dans un autre monde. L'histoire de ce quinquennat, au fond, est celle d'une impuissance volontaire ", estime le député des -Yvelines. Pour François Lamy, ce renoncement date d'avant même le début du quinquennat et il a un -visage, celui de Manuel Valls : " En réalité, tout a commencé dès avant la présidentielle, quand Valls, qui n'avait fait que 5 % à la primaire, est -devenu l'homme fort de la campagne auprès du candidat. Ensuite, sa place a été grandissante. Tout le problème est là : l'homme fort du quinquennat, celui qui lui a donné son empreinte, est celui qui a fait 5 % à la primaire. "
Quoique en termes plus mesurés, d'anciens ministres de sensibilité plus modérée au sein du PS ne disent pas fondamentalement autre chose. " Il faut avoir le courage de le reconnaître : nous n'avons pas assez donné de gages à la gauche. Or, un électorat, il faut lui donner des preuves d'amour, regrette Michèle -Delaunay. Au-delà, ce qui me crève le cœur, c'est de constater qu'il n'y a pas eu, ces derniers mois, un grand discours sur les réfugiés. Nous sommes de gauche, et nous n'avons même pas été capables de rappeler ce qui a fait la tradition d'accueil séculaire de la France. C'est tout de même incroyable de penser que c'est une chancelière allemande élue par la droite qui a tenu ce discours. "
thomas wieder, Thomas Wieder
Publié le 25 Octobre 2016
La Russie a toujours utilisé le sport dans un but politique et géostratégique. Ainsi, il est toujours entré dans la culture sportive Russe que tout était bon pour que les athlètes ramènent le plus de médailles possible au bercail, quel que soit le prix à payer...
Les soupçons de dopage de grande ampleur ont toujours été ancrés dans le mouvement sportif Russe.
On sous-entend aujourd'hui que rien n'a changé : on continue à doper les athlètes de façon massive, et tant pis sur leur santé en pâtit... Seule compte la gloire du pays à l'échelon international.
Cela jette de façon crue la notion même de démocratie en Russie : quand la vie humaine passe après l'image d'un état, cet état n'en sort certainement pas grandi...
Un article du journal 'Le Monde' daté du 21 mai 2016
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Un labo au-dessus de tout soupçon
Le laboratoire de Moscou s'est vu confier les contrôles des Jeux de Sotchi en 2014. Notre enquête montre qu'il était pourtant loin de réunir toutes les garanties
Il n'est pas sûr que Grigory Rodchenkov soit un lecteur assidu de John Le Carré. L'histoire que l'ancien patron du laboratoire antidopage de Moscou a racontée aux journalistes du New York Times, publiée le 12 mai, aurait pourtant pu constituer un excellent scénario pour le spécialiste britannique des romans d'espionnage.
Des trafics nocturnes d'échantillons d'urine en plein Jeux de Sotchi, en 2014. Des agents des services secrets impliqués. Le patron d'un laboratoire antidopage chargé de " préparer " certains athlètes, listés par le ministère des sports, au moyen de cocktails à base de stéroïdes anabolisants et d'alcool. Et, au terme de la compétition, une Russie triomphante, avec 33 médailles, dont 13 d'or. S'il est avéré, le stratagème décrit par M. Rodchenkov, désormais exilé à Los Angeles, apparaît comme le plus gros scandale de dopage de l'histoire des Jeux olympiques.
Ces révélations soulèvent une question qui dépasse les frontières russes. Comment le laboratoire antidopage de Moscou, délocalisé à Sotchi durant les Jeux, a-t-il pu recevoir un blanc-seing pour tester les échantillons prélevés lors des JO ? La question se pose d'autant plus que l'Agence mondiale antidopage (AMA), qui délivre les accréditations à une trentaine de laboratoires dans le monde, mais peut aussi les leur retirer, était préoccupée, plusieurs mois avant les Jeux, par de nombreux dysfonctionnements au sein de la structure dirigée par M. Rodchenkov.
Un courrier daté du 25 juin 2013, auquel Le Monde a eu accès, en offre une illustration édifiante. Dans cette lettre à Grigory Rodchenkov – adressée en copie au vice-ministre des sports, Youri Nagornykh, et au directeur médical du CIO, Richard Budgett –, le directeur scientifique de l'AMA, Olivier Rabin, souligne le manque de co-opération du laboratoire. " A la suite de nos visites sur place, en janvier et avril 2013, 18 mesures correctives étaient attendues de la part de votre laboratoire et devaient être envoyées à l'AMA au plus tard le 30 mai 2013. A ce jour, l'AMA a seulement reçu cinq mesures correctives qui ne sont pas considérées comme satisfaisantes (…). " Parmi les nombreux manquements, le fait par exemple que les réfrigérateurs servant à stocker les échantillons n'aient pas été connectés à une ligne téléphonique,dispositif censé alerter les " laborantins ", notamment en cas de réchauffement des prélèvements. Embarrassant.
Pour le directeur scientifique de l'AMA, qui déplore la faible collaboration de la structure moscovite, " cette situation démontre l'incapacité - du - laboratoire à remplir ses devoirs et suscite les plus grandes inquiétudes concernant sa capacité à continuer ses activités en accord avec les exigences de l'AMA ". En guise d'ultimatum, le Français ajoute : " Afin de donner à votre laboratoire une opportunité de faire face à la situation actuelle, nous - lui - accordons exceptionnellement un délai jusqu'au 5 juillet 2013 pour fournir à l'AMA toutes les mesures correctives demandées. En l'absence de réponses et de documents satisfaisants à cette date, l'AMA se réserve le droit de prendre des actions immédiates ainsi qu'il est écrit dans l'article 4.4.12.2 du Standard international des laboratoires (SIL). "
L'article évoqué par M. Rabin – qui n'apparaît plus dans la nouvelle version du SIL, entrée en vigueur en 2015 – mentionnait à l'époque que " tout manquement du laboratoire à fournir en temps voulu et à la date spécifiée les informations demandées pour l'évaluation de ses performances sera considéré comme un refus de coopérer et entraînera la suspension ou la révocation de l'accréditation ". Et pourtant. L'accréditation du laboratoire de Moscou n'a pas été suspendue en 2013. Début 2014, Olivier Rabin et le président de l'AMA, Sir Craig Reedie, ont signé un document permettant à la structure dirigée par M. Rodchenkov de conduire les tests à Sotchi, en amont et lors des Jeux.
Quelques mois auparavant, le laboratoire de Moscou avait aussi été chargé de tester les centaines d'échantillons recueillis lors des Mondiaux d'athlétisme dans la capitale russe, du 10 au 18 août 2013. Soit six semaines après le courrier d'Olivier Rabin. Là aussi, la Russie est arrivée en tête du classement des nations, avec 17 médailles dont 7 d'or. Et si plusieurs des médaillés russes ont depuis été pris par la patrouille, aucun n'a été testé positif lors de cette compétition. En cet été 2013, l'antidopage russe fait pourtant déjà l'objet de critiques publiques. Le Mail on Sunday révèle que la sœur de Rodchenkov a été condamnée pour trafic de produits interdits. Grigory, lui-même ancien athlète ayant reconnu s'être dopé, a été inquiété par la justice avant de voir les poursuites à son égard abandonnées.
L'ultimatum fixé par le directeur scientifique de l'AMA concernant l'envoi de " mesures correctives " avant le 5 juillet 2013 a-t-il été respecté ? Dans son rapport de novembre 2015 – qui a conduit à la suspension du labo puis à sa révocation en avril 2016 – sur le dopage organisé en Russie, la commission d'enquête indépendante de l'AMA note, sans mentionner le courrier de M. Rabin, que " malgré les délais supplémentaires accordés par l'AMA, les mesures correctives n'avaient pas été mises en place au 19 juillet 2013 ". La commission " comprend que, malgré les performances du laboratoire ne répondant pas aux normes, il y avait une volonté claire de ne pas révoquer l'accréditation du laboratoire avant les Jeux de Sotchi ".
Contacté par Le Monde au sujet du courrier du 25 juin 2013, Olivier Rabin souligne que " lorsqu'on visite un laboratoire antidopage, on va très en détail sur un certain nombre de choses. Une action corrective, ce n'est pas forcément un problème énorme ". La qualité des analyses du laboratoire n'était pas en cause, assure-t-il. Et celui qui occupe le poste de directeur scientifique de l'AMA depuis 2002 nuance le ton de la lettre, qu'il ne juge " pas alarmant, plutôt incisif. Cela fait partie du jeu de faire monter la pression sur un laboratoire au cas où il n'aurait pas compris.Si on avait eu le moindre doute sur les qualités techniques du laboratoire de Moscou, il aurait été suspendu, même avant les championnats du monde d'athlétisme ".
Une procédure disciplinaire a toutefois été entamée à l'été 2013. En marge de la Conférence mondiale sur le dopage, organisée à Johannesburg du 12 au 15 novembre 2013, le comité disciplinaire de l'AMA a décidé d'envoyer un groupe d'experts indépendants " pour s'assurer de la mise en œuvre de tout le contrôle qualité du laboratoire ", précise le docteur Rabin. " A Johannesburg, le bruit a couru que le labo allait être suspendu, raconte un observateur alors présent en Afrique du Sud. Ça avait été très chaud. " Mais de suspension, il n'y eut pas à l'époque.
Le laboratoire de Moscou a donc pu être déplacé à Sotchi pour les Jeux. Retirer l'accréditation avant la grande fête olympique de 2014 serait apparu comme un affront pour Vladimir Poutine, alors que le président russe s'était beaucoup investi dans la compétition. Pourtant, délocaliser les analyses des échantillons n'a rien d'impossible. En 2013, l'AMA a décidé de suspendre l'accréditation du laboratoire de Rio, à quelques mois du Mondial de football 2014 au Brésil. Les échantillons prélevés durant le tournoi ont été envoyés et analysés à Lausanne. Pourquoi l'agence n'a-t-elle pas fait de même pour Sotchi ? " Le laboratoire de Rio avait été suspendu pour des raisons analytiques, explique le docteur Rabin, des problèmes techniques qui pouvaient interférer avec la qualité analytique des échantillons. On n'était pas sur le même volet avec Moscou. "
A Sotchi, une vingtaine d'observateurs ont été dépêchés pendant les Jeux, dont certains patrons d'autres laboratoires antidopage, à l'instar de Martial Saugy, le directeur de celui de Lausanne. Contacté par Le Monde, M. Saugy n'a pas donné suite à nos sollicitations. Aucun des observateurs n'a tiré la sonnette d'alarme ou vu de trafics d'échantillons nocturnes. Dans son rapport publié juste après les Jeux, l'AMA estime que le bilan est satisfaisant, même s'il est noté qu'il y a eu, pendant la compétition, environ 10 % d'échantillons trop dilués. " Si le laboratoire avait été techniquement mauvais, Rodchenkov n'aurait même pas eu à s'inquiéter, estime le docteur Rabin. Si certaines personnes – et il faudra que ce soit vérifié – ont pris soin d'interférer avec les échantillons avant les analyses, c'est qu'elles savaient bien que la qualité analytique était au rendez-vous. " Le -Comité international olympique (CIO), qui a annoncé le 17 mai les contrôles positifs de 31 sportifs à la suite de nouvelles analyses d'échantillons des Jeux de Pékin, en 2008, a demandé que les échantillons de Sotchi, conservés au laboratoire de Lausanne, soient testés à nouveau. Le CIO a également demandé à l'AMA d'enquêter sur les allégations de M. Rodchenkov qui intéressent aussi désormais la justice américaine.
A l'issue des JO de Sotchi, Grigory Rodchenkov avait pourtant reçu des courriers élogieux. Dans une lettre du 15 avril 2014, le docteur Mario Thevis, " au nom du laboratoire de Cologne ", se réjouissait d'une " collaboration transparente " : " J'ai personnellement beaucoup apprécié le professionnalisme, l'efficacité et le haut niveau du travail analytique qui a permis de dévoiler la présence de substances interdites parmi les échantillons analysés dans votre laboratoire. " Sur les quelque 2 500 contrôles effectués lors de ces Jeux, une poignée de positifs avaient été pris dans les mailles du filet, mais aucun Russe.
Le directeur médical du CIO, Richard Budgett, n'est pas en reste. Ancien champion olympique d'aviron, en 1984, M. Budgett, pourtant destinataire du courrier d'Olivier Rabin en juin 2013, semble avoir oublié les difficultés de l'année précédente. " Cela a été un vrai plaisir de travailler avec vous et votre équipe lors de la préparation et durant les Jeux, écrit-il à M. Rodchenkov, le 4 mars 2014. Merci de transmettre les félicitations et les remerciements du CIO à votre personnel. " Des louanges qui se sont depuis largement dissipées, à en croire la tribune confiée au Monde par le président Thomas Bach, le 18 mai : " Si l'enquête devait confirmer la véracité de ces allégations - à l'encontre du laboratoire de Sotchi - , cela révélerait une nouvelle dimension choquante du dopage, assortie d'un degré de criminalité sans précédent. "
Yann Bouchez
Publié le 24 Octobre 2016
Que les gens de la chimie et des pesticides tentent d'influencer nos élus, c'est de bonne guerre, mais que les commissaires européens les écoutent et aillent dans leur sens, c'est purement et simplement scandaleux !
Comme je l'ai déjà dit, le rôle de la commission Européenne est de protéger les citoyens, pas de favoriser les lobbys.
Le critère de puissance doit donc être écarté car il n'est pas scientifiquement valable pour protéger l'intégrité physique des citoyens.
Les perturbateurs endocriniens doivent être interdits jusqu'à ce que l'on démontre leur totale innocuité : c'est la seule voie possible pour protéger les citoyens et cela ne peut être atténué, quel qu'en soient les principes ou les raisons...
Un article du journal 'Le Monde' daté du 21 mai 2016
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Ultimes manœuvres des scientifiques liés à l'industrie
Pour limiter la réglementation, les géants de la chimie et des pesticides tentent d'imposer un critère de " puissance " des polluants chimiques
Une délégation de scientifiques qui demandent à un commissaire européen d'alléger la protection de la santé publique, ce n'est déjà pas banal. Mais si la raison revendiquée est de faire " barrage " à un " assaut de la pseudoscience ", la démarche est sans précédent. Début mai, sept scientifiques ont rendu visite au commissaire à la santé, Vytenis Andriukaitis. Ils venaient l'avertir, explique un communiqué de l'université de Constance, de la façon " volontairement sélective " dont " certains scientifiques " non nommés présentent la question des perturbateurs endocriniens au public et à la Commission européenne.
Ni le sujet ni le moment ne sont anodins. Alors que la réglementation de cette classe entière de substances chimiques fait l'objet d'une intense bataille de -lobbying depuis près de dix ans, les ultimes réunions ont lieu ces jours-ci au sein de la Commission. C'est la direction générale Santé et sécurité alimentaire (DG santé), chapeautée par le commissaire -lituanien, qui a la responsabilité de décider du degré de sévérité des mesures. Si la Commission a le choix entre quatre -options énoncées dans sa " feuille de route " officielle, seules deux d'entre elles sont véritablement envisagées. Et toutes les tensions sont en fait cristallisées autour d'une seule question : faut-il on non trier les perturbateurs endocriniens en fonction de la puissance de leurs -effets ? Niché dans l'option no 4, ce - " critère de puissance " est en fait une ruse de lobbying mise au point dès 2009 par les industriels de la chimie et des pesticides. En sacrifiant les perturbateurs -endocriniens les plus voyants, elle leur permettrait de limiter les dégâts d'une -réglementation désormais inévitable.
Les scientifiques spécialistes de ce -domaine en rejettent vigoureusement l'idée. " Le critère de puissance n'a aucune justification d'un point de vue scientifique ", explique Andreas Kortenkamp, de l'université de Brunel, à Londres. " C'est un fâcheux mélange de réglementation et d'intérêts commerciaux dans lequel la santé publique est perdante. " Ce -professeur en toxicologie humaine, que la Commission a sollicité à plusieurs -reprises pour son expertise indépendante – il n'a aucun lien avec l'industrie – n'est pas le seul à avoir cette position. Avec d'autres chercheurs réputés du -domaine, il vient de cosigner un article à paraître dans la revue internationale de référence en santé environnementale, Environmental Health Perspectives." Le concept de puissance n'est pas pertinent pour l'identification des dangers des -perturbateurs endocriniens ", écrivent-ils.
" Groupes de pression "
C'est aussi la conclusion d'un document de consensus discuté à la mi-avril à Berlin entre scientifiques artificiellement séparés en deux " camps ". En 2013, la -Commission européenne avait avancé comme prétexte officiel une absence de consensus scientifique pour reporter sa décision. En fait de controverse, il s'agissait des protestations d'une soixantaine de personnalités qui s'étaient plaintes en haut lieu de l'approche de " précaution -infondée " défendue par la DG environnement, depuis dessaisie du dossier. La plupart n'avaient jamais publié de travaux sur les perturbateurs endocriniens. La grande majorité (cinquante sur soixante-huit), en revanche, était liée à l'industrie.
La visite des sept scientifiques à Bruxelles serait-elle une forme de redite de cet épisode ? Car une fois dans le bureau du commissaire à la santé, quinze jours à peine après la discussion de Berlin, à -laquelle trois d'entre eux participaient, les scientifiques en délégation soutiennent exactement le contraire : ils -assènent " l'importance de la puissance et de l'exposition humaine ". Quand un -rapport de référence de l'Organisation mondiale de la santé publié en 2013 parle des perturbateurs endocriniens comme d'une " menace mondiale ", les sept, eux, contestent la possibilité qu'ils aient même un effet sur la santé, parlent de " preuves scientifiques qui manquent de robustesse ", de " positions dogmatiques ", d'" absurdité " et, plus surprenant pour des scientifiques, de " compétitivité de l'économie européenne ".
" Le ton, inutilement agressif, veut donner l'impression qu'il existe plusieurs camps ", regrette Rémy Slama, épidémiologiste à l'Inserm, président du comité scientifique du Programme français de recherche sur les perturbateurs endocriniens et sans liens avec le secteur commercial. " Il laisse entendre que les scientifiques indépendants sont manipulés par des groupes de pression, ce qui est difficile à entendre de la part de chercheurs dont la plupart ne -cachent pas leurs liens avec l'industrie ".
Outre le fait que ce rendez-vous, en date du mardi 3 mai,a eu lieu alors que le document de consensus n'avait pas encore été finalisé (le 4 mai), une question -demeure : au nom de qui ces scientifiques s'exprimaient-ils ? L'institut de -gestion des risques allemands, le BfR, a refusé de communiquer au Monde les -déclarations d'intérêts remplies par tous les participants de la réunion de Berlin. Ces formulaires sont pourtant des documents publics, y compris au BfR. L'enquête du Monde montre que six de ces sept scientifiques sont étroitement liés à l'industrie et collaborent avec des firmes comme BASF, Monsanto, ou encore les -industries de l'amiante et du tabac.
Selon nos informations, la DG santé aurait d'ores et déjà tranché en faveur d'une option la plus favorable à l'industrie et qui laisserait sur le marché la plupart des perturbateurs endocriniens.
St. H.
Publié le 21 Octobre 2016
Est-il normal que la Commission européenne oublie à ce point l'intérêt général en bloquant la réglementation de produits chimiques très fortement soupçonnés d'être responsables de maladies graves ?
Cette situation honteuse doit être dénoncée car elle est plus qu'anormale de la part d'une institution qui se dit démocratique !
Nous ne pouvons tolérer que les intérêts des industriels passent par dessus les intérêts du peuple qui doit être et rester souverain en exigeant que sa vie soit protégée par les institutions qui prétendent les représenter !
Le principe de précaution doit prévaloir : on doit interdire ces produits jusqu'à ce que l'on prouve leur innocuité et non pas les autoriser jusqu'à ce que l'on prouve pleinement leur rôle dans les maladies graves ! Des indices récurrents ont montré qu'ils pouvaient être responsables, en ce sens, le principe de précaution doit s'appliquer !
La commission a donc failli dans ses missions : si des pays veulent quitter l'Europe, elle n'a qu'à poursuivre dans sa voie honteuse...
Un article du journal 'Le Monde' daté du 21 mai 2016
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Perturbateurs endocriniens : l'histoire secrète d'un scandale
La Commission européenne bloque depuis 2013 la réglementation de ces produits chimiques très présents dans l'environnement et responsables de maladies graves
C'est l'un des secrets les mieux gardés d'Europe. Il est enfermé quelque part dans le dédale des couloirs de la Commission européenne, dans une pièce à accès surveillé, où seule une quarantaine de fonctionnaires accrédités ont le droit d'entrer. Avec du papier, un stylo. Les smartphones sont confisqués. Un dispositif de sécurité plus strict encore que pour l'accord de libre-échange transatlantique entre l'Union européenne et les Etats-Unis (ou Tafta) : pour connaître les documents le concernant, les eurodéputés, eux, peuvent pénétrer dans la salle de lecture sans que l'on s'enquière du contenu de leurs poches.
Ce secret, c'est un rapport d'environ 250 pages. Dans le jargon de la Commission, une " étude d'impact ". Celle-là évalue les conséquences " socio-économiques " d'une réglementation visant une famille de polluants chimiques. Capables d'interférer avec les hormones des espèces animales, humains compris, les perturbateurs endocriniens sont soupçonnés d'être à l'origine de nombreuses maladies graves (cancers hormonaux-dépendants, infertilité, obésité, diabète, troubles neuro-comportementaux…). Ces substances se trouvent dans une multitude d'objets de consommation courante, dans les cosmétiques, les pesticides ou les plastiques (à l'instar du bisphénol A). Des secteurs entiers de l'industrie seront concernés à moyen terme par leur réglementation. Des milliards d'euros sont en jeu. La perspective d'éventuelles restrictions, parfois même d'interdictions, suscite de vives inquiétudes chez les industriels. Le secteur des pesticides, en particulier, n'a jamais caché son hostilité à certaines dispositions du règlement européen sur les " produits phytopharmaceutiques ", qui est à l'origine d'un processus de décision aux rebondissements dignes d'une série télévisée. Adopté au Parlement en 2009, ce texte réserve en effet un traitement spécial aux pesticides : ceux reconnus comme perturbateurs endocriniens ne seront plus autorisés sur le marché. Encore faut-il pouvoir les reconnaître.
Définir les critères d'identification
La Commission devait donc trouver le moyen de distinguer les perturbateurs -endocriniens des autres produits chimiques. Très concrètement, son travail consistait à énoncer des critères qui permettraient de les identifier. Sans critères, pas d'application de la loi. Autorités sanitaires nationales, industriels et ONG sont ainsi suspendus à une -décision imminente sur ces critères d'identification – outil réglementaire qui permettra ensuite d'en restreindre l'usage ou, plus -radicalement, d'en interdire certains. Or, sept ans plus tard, les critères n'existent -toujours pas.
C'est cette étude d'impact, aux conclusions apparemment aussi confidentielles que l'adresse de la fontaine de Jouvence, qui en est en grande partie responsable. Elle n'était pas prévue au départ, mais l'industrie l'a réclamée afin d'affaiblir la réglementation, puis l'a obtenue à l'issue d'une offensive éclair de lobbying menée en tandem par les industriels des pesticides et de la chimie au début de l'été 2013. Principalement au travers de leurs organisations de lobbying bruxelloises : l'Association européenne de protection des plantes (ECPA) et le Conseil européen de l'industrie chimique (Cefic).
Mais les géants de l'agrochimie étaient aussi montés au front : les deux poids lourds allemands BASF et Bayer, ainsi que la multinationale suisse Syngenta. L'ancienne secrétaire générale de la Commission, Catherine Day, avait fini par céder à leur requête au nom des " opinions divergentes " dans la communauté scientifique et des " impacts potentiels sur des pans de l'industrie chimique et le commerce international " – une référence directe au Tafta, dont les négociations venaient alors tout juste de commencer. Dans une note interne datée du 2 juillet 2013, la plus haute fonctionnaire européenne qualifiait alors les critères des perturbateurs endocriniens de " sujet sensible ". Sensible, il est resté. Et même hypersensible, il est devenu.
Car le Parlement européen avait donné une date butoir à la Commission pour rédiger ces fameux critères : décembre 2013. Ne voyant rien venir, la Suède avait alors décidé de poursuivre la Commission en justice. Une procédure soutenue par la France, le Danemark, la Finlande et les Pays-Bas et à laquelle s'étaient joints le Parlement et le Conseil – une configuration rare.
Quid du coût des maladies ?
La Cour de justice de l'Union européenne n'a, elle, pas tardé. Juste avant Noël 2015, elle a jugé que la Commission avait " violé le droit de l'Union ", elle qui est pourtant la gardienne des traités. L'arrêt balaye la " prétendue nécessité de procéder à une analyse d'impact des critères scientifiques " que la Commission a placée au cœur de sa défense. Mais le jour même, le porte-parole du commissaire européen à la santé, le Lituanien Vytenis Andriukaitis, annonce tout de go que l'étude d'impact sera malgré tout menée jusqu'au bout. D'hypersensible, le dossier devient inflammable.
Les députés européens sont furieux. Certains ont déjà envoyé plusieurs lettres au président de la Commission. Elles sont restées sans effet. Le 13 janvier, c'est le président du Parlement en personne qui écrit à Jean-Claude Juncker. Le retard de la Commission est " inacceptable ", souligne Martin Schulz. Tout autant que la poursuite de l'étude d'impact " au mépris du jugement " de la plus haute juridiction de l'Union et auquel il lui demande de " se conformer sans délai ". Message répété dans un second courrier, le 10 mars.
La Suède, pour sa part, persiste. Dans un document daté du 13 mai et que Le Monde s'est procuré, les autorités suédoises rappellent sèchement aux services de la Commission que la Cour de justice de l'Union " interdit -l'utilisation de -considérations économiques pour définir les critères ".
Mais de quelle nature sont les " considérations économiques " consignées dans les pages de l'étude d'impact enfermée à double tour ? En sus des conséquences sur l'industrie, prendront-elles en compte le coût des maladies liées à l'exposition aux perturbateurs endocriniens, qui a été estimé par des études indépendantes entre 157 milliards et 288 milliards d'euros par an (Université d'Utrecht, 2016) en Europe ? Fin du suspense le 15 juin. D'après nos informations, la -proposition finale de critères d'identification des perturbateurs endocriniens sera présentée en réunion du collège des -commissaires.
Stéphane Horel
Report d'un vote clé sur le glyphosate
Pour la deuxième fois, l'Union européenne n'est pas parvenue à s'accorder sur la prorogation de l'autorisation du glyphosate, principal ingrédient du Roundup de Monsanto, l'herbicide le plus vendu dans le monde. Jeudi 19 mai, la Commission a reporté sa décision, faute d'une majorité suffisante. L'homologation de ce produit, classé par le Centre international de recherche contre le cancer (un organisme dépendant de l'OMS) " cancérogène probable ", doit expirer au 30 juin. Il reste donc peu de temps aux experts et aux représentants des Etats membres de l'UE pour se mettre d'accord sur une nouvelle prolongation de l'homologation, ramenée dans la dernière proposition de Bruxelles de quinze à neuf ans.
Publié le 20 Octobre 2016
S'il fallait une preuve de l'incompétence manifeste de M. Emmanuel Macron en matière économique, elle tient en ses quelques pensées en la matière...
En matière de création d'une activité artisanale, le stage préalable à l'installation auprès d'une chambre des métiers et de l'artisanat est indispensable ! Je sais de quoi je parle, car, à titre personnel, j'en ai suivi un... Ce stage est indispensable car il ne coûte pas bien cher et est très utile pour savoir à quelle sauce on sera mangé une fois que l'on sera à la tête de son activité.
Une semaine de stage, ce n'est pas la mer à boire et pourtant, les choses que l'on y apprend sont le minimum nécessaire à toute installation. En ce sens, ce stage n'a jamais été un frein à l'installation de l'artisan. Le fait que M. Emmanuel Macron veuille le supprimer prouve qu'il ne sait absolument pas de quoi il parle et qu'il a mis ses petites pensées de néophyte au delà de l'intérêt général.
Pour être artisan, dans certains milieux, il faut des qualifications professionnelles indispensables. En ce sens, là aussi, édulcorer les exigences de qualification des artisans est une faute car cette mesure va à l'encontre du professionnalisme requis par un client envers un fournisseur.
Déverrouiller l'artisanat ne passe pas par enlever une formation ou une exigence professionnelle ! Elle revient d'abord à ce que le Régime Social des Indépendants cesse de prendre les artisans comme des vaches à lait en les considérant comme des patrons de CAC 40 ! C'est cela la réalité !
Il faut arrêter de taxer et taxer toujours plus l'artisan en ne lui donnant aucun droit en matière d'arrêt maladie ! Il faut arrêter de le ponctionner à tout va par un Régime Social des Indépendants qui brise la liberté d'entreprendre !
Encore une fois, M. Emmanuel Macron prouve son incompétence en démontrant qu'il parle sans savoir... Il est temps que ce genre de tocards arrêtent de faire de la politique car cela se révèle néfaste pour tout le monde à terme !
La priorité est dans le coût du travail en cessant de charger à tout va les artisans et en leur facilitant le recrutement par une formation efficace et adéquate de leurs apprentis !
Tout le reste est accessoire !
Un article du journal 'Le Monde' daté du 20 mai 2016
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Macron recadré par les députés socialistes
Le texte sur la transparence de la vie économique était examiné en commission, le 17 mai
Lorsque, début 2015, Emmanuel Macron était venu présenter devant les députés son projet de loi pour la croissance et l'activité, il bénéficiait encore de l'avantage de la nouveauté et de la curiosité. La majorité du groupe socialiste de l'Assemblée nationale s'efforça d'épauler le novice qui effectuait ses premiers pas dans l'arène politique et de l'aider à déjouer les embûches. Même si, à l'arrivée, ce fut un 49.3 qui ponctua les débats.
Privé d'une loi " Macron 2 " – le projet sur les " nouvelles opportunités économiques " qu'il avait mis en chantier –, le ministre de l'économie a dû se contenter de voir certaines de ses propositions intégrées soit dans le projet de loi sur la réforme du travail porté par Myriam El Khomri, soit dans le texte de Michel Sapin sur la transparence de la vie économique, dont l'examen en commission a débuté mardi 17 mai à l'Assemblée nationale. Et c'est précisément de la partie dont M. Macron est l'auteur que la commission des affaires économiques était saisie.
Entre-temps, le ministre de l'économie s'est émancipé, et a créé son propre mouvement, En marche !. Et il a pu constater qu'il n'avait nulle bienveillance à attendre de la part des députés de la majorité.
Deux articles, principalement, ont fait l'objet de sévères critiques. L'article 38, qui prévoyait d'offrir la possibilité au créateur d'une entreprise artisanale de démarrer son activité sans avoir suivi le stage préalable à l'installation auprès d'une chambre des métiers et de l'artisanat. Et l'article 43, qui édulcore les exigences de qualification professionnelle pour exercer certaines activités artisanales.
" On retrouve dans ces propositions la même logique que dans la loi croissance et activité, l'idée qu'il faut “déverrouiller” pour libérer l'activité, note le rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques, Dominique Potier (PS, Meurthe-et-Moselle). Mon rôle, c'est de séparer le bon grain de l'ivraie, les vraies bonnes idées et les idées poisons qui viendraient, mine de rien, casser ce à quoi nous tenons. Le risque du texte gouvernemental était de déstabiliser tout le dispositif, de disqualifier les professions artisanales. "
Une pointe d'agacement
M. Macron a tenté de justifier sa démarche. " Les rigidités professionnelles créent des barrières à la création d'emploi. Il faut aider à l'adaptation de notre économie, développer les potentialités pour les emplois faiblement qualifiés, faciliter le développement et la création d'entreprise ", a-t-il soutenu.
" La souplesse que vous faites entrer dans votre texte risque de tirer vers le bas beaucoup de métiers qui exigent de la qualification ", a estimé André Chassaigne (PCF, Puy-de-Dôme), soulignant " les effets pervers de cette forme de libéralisation de certains métiers ". Pour -Damien Abad (LR, Ain), " la baisse de la courbe des exigences n'entraîne pas forcément celle de la courbe du chômage ". Frédérique Massat (PS, Ariège), n'y est pas allée par quatre chemins. " L'écriture du texte telle qu'elle est ne convient pas, a résumé la présidente de la commission des affaires économiques. Nous ne sommes pas là pour nous opposer de manière dogmatique, nous ne sommes pas contre vous mais nous sommes prêts à retravailler ce texte, car nous devons apaiser ce monde économique artisanal pourvoyeur d'emploi et de -salariat dans nos territoires. "
M. Macron n'a pu s'empêcher de laisser percer une pointe d'agacement. " Nous sommes dans une hypocrisie manifeste, a répondu le ministre. Penser qu'on ne peut en rien infléchir les règles du registre des métiers relève d'une forme de distance avec le réel. " La commission a largement réécrit les deux articles contestés, en adoptant des amendements du rapporteur sur les stages de préparation à l'installation, la validation des acquis de l'expérience (VAE) pour l'accès à certaines activités ou sur l'encadrement des obligations de qualification.
" Il y avait une tentation très forte du groupe de garder les choses en l'état. J'ai voulu éviter une confrontation du type libéral -contre conservateurs, organiser une passerelle entre l'économie informelle et le monde de la qualification, sans disqualifier le monde de l'artisanat, explique M. Potier. Maintenant, si cette ligne-là n'était pas suivie en séance, je ne donne pas cher des propositions du ministre. J'y veillerai. " Voilà M. Macron prévenu.
P. Rr
Publié le 19 Octobre 2016
Mme Anne Lauvergeon, en mettant Areva dans la panade, a entraîné l'Etat avec, in fine, l'ensemble des contribuables qui devront, une fois de plus, mettre la main à la poche...
Quand arrêtera-t-on d'engager des dirigeants qui n'engagent pas la même rigueur à gérer leur budget personnel et le budget de l'entreprise publique qu'ils dirigent ?
Mme Anne Lauvergeon n'a fait que se servir de l'entreprise pour son intérêt propre en oubliant de faire son métier correctement, c'est à dire gérer l'entreprise de façon responsable en ayant en tête que cette entreprise était fortement liée à du financement public.
Le rôle d'une entreprise publique n'est pas de faire en sorte de servir ses dirigeants. Lorsque ceux-ci abusent du système, ils doivent être condamnés !
Je souhaite donc que Mme Anne Lauvergeon paie pour avoir pris Areva pour un prolongement de son porte-monnaie !
Un article du journal 'Le Monde' daté du 15 mai 2016
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UraMin : Anne Lauvergeon mise en examen
L'enquête porte sur le rachat de la société canadienne par Areva en 2007
Après onze heures d'audition, vendredi 13 mai, Anne Lauvergeon, ancienne présidente du directoire d'Areva (2001-2011), est ressortie du bureau des juges Renaud Van Ruymbeke, Claire Thépaut et Charlotte Bilger avec une mise en examen dans l'un des deux volets de l'affaire UraMin, l'acquisition ruineuse de la société canadienne en 2007 par le groupe nucléaire français.
Les trois magistrats du pôle financier lui reprochent une " présentation de comptes inexacts " et la " diffusion de fausses informations ". En revanche, elle a été placée sous le statut moins défavorable de témoin assisté pour le chef d'" abus de pouvoir ". Mme Lauvergeon aurait tenté de minimiser ce qui s'est révélé un fiasco, refusant d'inscrire des dépréciations d'actifs (impairments) trop lourdes dans les comptes 2010 pour conserver une chance d'être reconduite pour un troisième mandat en juin 2011, malgré l'opposition du président de la République, -Nicolas Sarkozy.
La mise en examen de Mme Lauvergeon était requise par le parquet national financier. Il avait été saisi en 2014 par la Cour des comptes, qui jugeait ses responsabilités " incontestables ". " Ces manœuvres contraires à l'intérêt d'Areva et ayant engendré des pertes considérables pour le groupe auraient eu pour objet de permettre à Anne Lauvergeon de tenter de se maintenir à la tête du groupe ", soupçonnaient les magistrats de la Cour. UraMin, le désastreux chantier du réacteur EPR d'Olkiluoto (Finlande) et la catastrophe de Fukushima au Japon ont -conduit Areva à la quasi-faillite et à son démantèlement en cours, EDF reprenant l'activité de fabrication des réacteurs (Areva NP).
Mme Lauvergeon n'a pas tenu compte des alertes de ses propres géologues, qui concluaient que les teneurs en uranium des sites d'UraMin (Afrique du Sud, Namibie et République centrafricaine) étaient plus faibles que ce qu'indiquait la société d'expertise SRK mandatée par le vendeur, UraMin, et que les gisements étaient pratiquement inexploitables de façon rentable à un moment où les cours de l'uranium s'étaient effondrés.
Course en avant
De nombreux courriers électroniques internes, consultés par Le Monde, prouvent que la Business Unit Mines avait alerté Mme Lauvergeon de la situation dès 2008 dans le cadre d'impairment tests destinés à comparer la valeur future d'un actif à sa valeur inscrite au bilan. Notamment sur les gisements d'Afrique du Sud et de Namibie, où elle recommandait la prudence. Elle s'était au -contraire lancée dans une course en avant : l'acquisition d'UraMin pour 1,8 milliard d'euros avait été suivie d'un investissement de 1 milliard en Namibie pour mettre en production la mine de Trekkopje.
En mai 2010, le directeur financier du pôle minier propose une dépréciation de 1,4 milliard à 1,6 milliard d'UraMin. A la fin de l'année, il porte l'impairment à 1,82 milliard d'euros. Le patron des mines, Sébastien de Montessus, qui sera prochainement entendu, prévient alors de " l'incapacité d'amortir le coût d'acquisition d'UraMin ".
Rien n'y fait : Mme Lauvergeon n'inscrira que 426 millions cette année-là. Et son successeur, Luc Oursel, devra ajouter près de 1,5 milliard fin 2011, soit une dépréciation totale équivalent au prix d'achat de ce qui était naguère présenté comme une pépite !
Parallèlement, les mêmes juges mènent une enquête sur l'époux de Mme Lauvergeon, Olivier Fric, mis en examen le 30 mars pour délit d'initié et blanchiment. Selon une note de Tracfin, l'organisme antiblanchiment du ministère des finances, il aurait pu bénéficier d'informations privilégiées pour acheter puis revendre des actions UraMin entre mai et juin 2007, en pleine offre publique d'achat d'Areva sur la -société canadienne. Il avait alors réalisé une plus-value de 300 000 euros. M. Fric a démenti tout délit d'initié.
Jean-Michel Bezat
Publié le 18 Octobre 2016
Rien n'empêche légalement la justice d'intervenir quand et où elle veut ! Quand le citoyen lambda se fait prendre la main dans le pot de confiture, va-t-on regarder sur son planning si la convocation devant la justice l'arrange telle ou telle date ? Non ! Alors pourquoi la justice devrait faire des cadeaux à des politiques, à fortiori quand ils ont oublié l'intérêt général ?
Ces pratiques sont honteuses et ne servent en rien le citoyen : elles doivent donc définitivement abandonnées ! La justice a le droit d'intervenir comme bon et quand bon lui semble, quelles que soient les circonstances temporelles politiques !
La justice a beau jeu de dire et de redire qu'elle est indépendante du pouvoir politique ! Qu'elle le prouve en ne suivant pas le calendrier politique ! Il en va de la légitimité même du pouvoir judiciaire, garant de l'intérêt général !
Un article du journal 'Le Monde' daté du 14 mai 2016
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Pourquoi Sarkozy échappera à un procès avant 2017
La justice rouvre l'instruction dans l'affaire de corruption et de trafic d'influence à la Cour de cassation
Nicolas Sarkozy est convoqué au début du mois de juin par les juges Patricia Simon et Claire Thépaut, qui souhaitent le confronter à son ami, l'avocat Thierry Herzog, et au magistrat Gilbert Azibert, les deux autres protagonistes de l'affaire de " corruption " et de " trafic d'influence ", à la Cour de cassation.
Paradoxalement, pour l'ancien président, mis en examen pour ces faits depuis juillet 2014, il s'agit là d'une excellente nouvelle. Elle vient entériner la réouverture de l'instruction qui avait été clôturée par les juges le 3 février, et donc officialiser la quasi-impossibilité de le voir renvoyé devant le tribunal correctionnel avant les échéances politiques à venir, décisives pour lui - primaire de la droite en novembre, puis présidentielle au printemps 2017.
M. Sarkozy, qui a engagé depuis le déclenchement de cette affaire, révélée par Le Monde le 7 mars 2014, un bras de fer avec ses juges, semble donc avoir gagné son pari. A la course contre la montre opérée par les deux magistrates, manifestement désireuses d'obtenir que leur dossier soit jugé rapidement, M. Sarkozy, qui à l'inverse vivait dans la hantise de comparaître avant les élections devant un tribunal - et a fortiori de s'y faire condamner - a opposé une course de lenteur, dont il est sorti vainqueur. Pour ce faire, le patron des Républicains, lui-même ancien avocat, a habilement usé, avec ses conseils, des moyens de droit dont dispose tout mis en examen.
Irrégularité
Cette guérilla juridique aussi violente que souterraine a définitivement tourné à l'avantage de M. Sarkozy à la faveur de la décision de la chambre d'instruction de la cour d'appel de Paris qui a fait droit le 9 mai, à la requête de -l'ex-chef de l'Etat et de Me Herzog. Ces derniers estimaient que leurs précédentes convocations, respectivement les 8 octobre et 20 novembre 2015, étaient entachées d'irrégularité – ils avaient d'ailleurs refusé de répondre aux questions des juges –, l'instruction étant suspendue depuis plus d'un an.
Dans son arrêt, dont Le Monde a pu prendre connaissance, la cour d'appel estime qu'" en procédant à ces actes, les juges d'instruction ont commis un excès de pouvoir qui fait nécessairement grief aux intérêts des parties ". La cour considère que " la suspension de l'information prise le 23 septembre 2014 (…) a produit ses effets jusqu'au 22 mars 2016, lorsque sont intervenus les arrêts de la chambre criminelle statuant définitivement sur les pourvois contre cet arrêt ".
Tout remonte au 23 septembre 2014, lorsque la doyenne de la chambre de l'instruction, Edith Boizette, saisie d'une première demande d'annulation de la procédure (notamment des écoutes téléphoniques sur laquelle elle repose), décida, à la surprise générale, de suspendre l'instruction le temps d'examiner la requête des mis en examen. Une initiative qui fit perdre un temps considérable à la procédure puisque la décision de la cour d'appel fut rendue le 7 mai 2015. MM. Sarkozy, Herzog et Azibert ayant été déboutés, leurs conseils décidèrent de se pourvoir immédiatement devant la Cour de cassation, dont la décision ne sera rendue qu'un an plus tard, le 22 mars dernier précisément – en faveur des juges, là encore. Sauf que dans l'intervalle, estimant ce pourvoi non suspensif, les deux magistrates avaient repris leur enquête, de toute façon quasi terminée, en convoquant notamment les trois mis en examen afin qu'ils s'expliquent. Une erreur à en croire la cour d'appel, bien que le parquet général ait au contraire estimé que les juges étaient dans leur droit.
Nicolas Sarkozy, qui avait aussi tenté, en vain, d'obtenir la récusation de l'une de ses juges, Claire Thépaut, au motif que son appartenance syndicale aurait entaché son impartialité, avait placé tous ses espoirs dans cette décision de la cour d'appel, décisive à ses yeux. En effet, si son nom est cité dans plusieurs procédures judiciaires (il est notamment mis en examen pour " financement illégal de campagne électorale " dans le dossier Bygmalion), cette affaire était la seule susceptible de lui valoir un renvoi en correctionnelle – voire une condamnation, possiblement assortie d'une peine d'inéligibilité – avant les deux échéances majeures dont il a fait ses objectifs principaux.
La reprise de l'instruction -signifie en effet que, dans le meilleur des cas, les juges pourront -reclôturer leur dossier courant juin, après avoir confronté MM. Sarkozy, Herzog et Azibert. S'ouvrirait alors un délai légal de trois mois durant lequel le parquet peut rédiger son réquisitoire, tandis que les mis en examen sont en droit de formuler des demandes d'actes d'instruction supplémentaires. En cas de refus des juges, ils peuvent faire appel, ralentissant encore la procédure.
" Trêve " électorale
Au terme de cette période, soit au plus tôt courant septembre, les avocats disposeraient d'un nouveau délai d'un mois afin de pouvoir répliquer aux réquisitions du procureur. Dans cette hypothèse haute, les juges pourraient techniquement signer leur ordonnance de renvoi au mieux à partir du mois d'octobre… en pleine campagne pour la primaire. Encore faudrait-il ensuite audiencer le procès, ce qui prendrait plusieurs mois, auquel cas il tomberait en pleine présidentielle. Une perspective totalement inenvisageable : en vertu d'une règle non écrite, s'agissant des dossiers à connotation politique, les magistrats observent généralement une " trêve " au moment des échéances électorales. Selon nos informations, deux dates d'audience possibles qui avaient, au début de l'année, été discrètement " réservées " par la justice en prévision d'un éventuel procès devant le tribunal correctionnel de Paris, ont été récemment libérées pour d'autres audiences…
Un éventuel procès ne pourra donc se tenir qu'après l'élection présidentielle. Mais à cette date, si Nicolas Sarkozy était redevenu chef de l'Etat, il se retrouverait de facto à l'abri de la justice en vertu de l'immunité attachée à sa fonction. Dans le cas contraire, le procès d'un homme probablement retiré de la vie politique ne présenterait évidemment plus pour ce dernier le même enjeu.
Gérard Davet et Fabrice Lhomme
Publié le 17 Octobre 2016
Les réquisitions du procureur, M. David Lentz, dans l'affaire des Luxleaks sont plus qu'honteuses !
Il a oublié que la démocratie est le pouvoir du peuple par le peuple ! Il a oublié que la défense de l'intérêt général est réalisée par la démocratie ! Il a oublié que le droit pénal est là pour lutter contre le trouble manifeste à l'ordre public, in fine, à l'intérêt général ! Il a oublié qu'il était garant, de par sa fonction de l'intérêt général ! Il a oublié que l'intérêt général commande que les citoyens soient informés des préjudices qu'ils subissent ! Il a oublié que dans un fait pénal, il y a hiérarchie des fautes dans le temps : des actions de défense peuvent être menées si il y a eu agression ! Il a oublié que ce dossier est une agression :c'est parce que les banques ont oeuvré à l'encontre des citoyens que des citoyens ont agi pour voler des preuves et les montrer aux citoyens pour défendre l'intérêt général ! Il a oublié que le journalisme sert la démocratie ! Pas les banques ! Il a oublié le mécanisme "principe-exception" de la justice ! Il a oublié que bien que le vol est punissable, si le vol sert à informer les citoyens que des banques agissent à l'encontre de l'intérêt général, le vol ne peut plus l'être !
Le procureur a oublié tous ces principes alors qu'il est un spécialiste du droit. Il a donc requis à l'encontre de l'intérêt général, ce qui est une faute, une trahison d'état.
M. David Lentz est donc une pourriture qui sert les banquiers et non l'intérêt général. Il doit être poursuivi et condamné pour haute trahison !
Un article du journal 'Le Monde' daté du 12 mai 2016
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LuxLeaks : pas de pitié pour les lanceurs d'alerte
Le procureur a requis dix-huit mois de prison contre Antoine Deltour et Raphaël Halet, à l'origine de la fuite
Depuis le début du procès LuxLeaks, il incarne l'intransigeance de l'Etat luxembourgeois. Mardi 10 mai, tout en convenant de multiples circonstances atténuantes, le procureur d'Etat adjoint David Lentz n'a pas changé sa position sur le fond. Oui, Antoine Deltour et Raphaël Halet, les deux " soi-disant lanceurs d'alerte ", comme il les a qualifiés, sont bien des voleurs qui ont " dérobé " des documents à leur employeur, le cabinet PwC, avant de les remettre à un journaliste de " Cash Investigation " (France 2), Edouard Perrin. De son côté, celui-ci a " fait fi des règles déontologiques et morales " du journalisme en cherchant à se les procurer.
Concernant MM. Deltour et Halet, le procureur a retenu l'ensemble des motifs d'inculpation (qui vont du " vol " à la " violation du secret des affaires " et du " secret professionnel "). Il a requis contre eux une " amende " et dix-huit mois de prison, en ne " s'opposant pas " à ce que la peine soit assortie de sursis. Pour M. Perrin, il a requis une simple " amende ", convenant qu'il avait poursuivi un motif d'information légitime, même si c'est en usant de moyens constitutifs d'une " complicité " de violation du secret des affaires et du secret professionnel.
Un journaliste " complice " Les trois hommes étaient jugés depuis le 26 avril au tribunal d'arrondissement de Luxembourg et leurs avocats avaient auparavant tous plaidé la relaxe au nom de la protection des lanceurs d'alerte et du droit à l'information, reconnus par la Cour européenne des droits de l'homme. Revenant longuement sur les faits, M. Lentz a expliqué pourquoi ils méritaient, au contraire, une condamnation.
En " copiant ", la veille de sa démission, des rescrits fiscaux, ces accords secrets d'interprétation de la législation conclus entre le fisc et les filiales des multinationales par le biais de PwC, l'ancien auditeur Antoine Deltour aurait bien commis un vol. D'autant que ces documents étaient " foncièrement légaux ". " Antoine Deltour le dit lui-même. " Les transmettre à un journaliste constitue dès lors une violation du secret des affaires.
Peu importe que la révélation en 2012 et en 2014 par " Cash Investigation "et le Consortium international des journalistes d'investigation de ces documents ait déclenché un vaste scandale. Peu importe que M. Deltour ait été décoré par le Parlement européen et que les Etats membres de l'Union européenne se soient ensuite entendus pour s'échanger automatiquement les rescrits fiscaux. Pour le procureur, " le principe du lanceur d'alerte " ne peut tout simplement " pas s'appliquer lors de la commission d'une infraction ". " Pas question d'ouvrir les portes aux délateurs de tout poil ", a-t-il fustigé, brandissant le risque de " chantage " qui pourrait, sinon, reposer sur toutes les entreprises.
Il s'est montré encore plus sévère pour Raphaël Halet, qui était responsable de l'équipe de scanning des documents chez PwC et a agi séparément de M. Deltour, après avoir vu le premier " Cash Investigation ". " Un lanceur d'alerte, Halet ? Allons donc, qui va y croire ? ", a tancé le procureur, en pointant les changements de version de l'accusé sur ses véritables motivations.
Mais la partie la plus attendue du réquisitoire était celle consacrée au journaliste Edouard Perrin, qu'il avait précédemment accusé d'être le " commanditaire " du " vol " de document commis par M. Halet. L'accusation de complicité de violation du secret des affaires, concernant un journaliste, était fragile. C'est, en effet, l'ex-employé de PwC qui avait pris contact avec le journaliste après la diffusion de l'émission en proposant de fournir de nouveaux documents. M. Halet lui avait ensuite transmis seize déclarations fiscales, dont celles d'Amazon et d'une filiale d'ArcelorMittal.
Mais le procureur n'a pas voulu transiger. Selon lui, " Halet n'a pas assez d'intelligence " pour organiser la fuite, " ses connaissances sont basiques ". S'appuyant sur le fait que la boîte mail centmilledollarsausoleil@gmail.com servant pour échanger les documents était une idée du journaliste, le procureur a estimé qu'Edouard Perrin était intervenu " non pas comme journaliste, mais comme coauteur et complice ". Pour M. Lentz, cela constitue un franchissement des limites autorisées par la déontologie de la profession. " Tous les moyens ne sont pas bons pour arriver aux résultats. La liberté d'expression journalistique " ne doit pas primer sur le respect " du secret professionnel ". Et pas question de s'abriter derrière le droit à l'information. " Il y a des limites " reconnues " par la Convention européenne des droits de l'homme ", qu'il convient d'appliquer " pour éviter de sombrer dans l'anarchie ", a-t-il sermonné.
Après avoir été si sévère sur la constitution des infractions, M. Lentz a ensuite reconnu qu'il existait de nombreuses circonstances atténuantes qui justifiaient de ne pas aller jusqu'à la peine théorique maximale – dix ans pour MM. Halet et Deltour. Les trois accusés ont notamment un casier judiciaire vierge et il est établi qu'ils ont agi de manière totalement désintéressée. L'impact politique considérable de leurs actes ne peut non plus être totalement ignoré, le secret autour de ces rescrits fiscaux étant désormais illégal. Surtout, le procureur d'Etat adjoint en convient : " Certaines pratiques fiscales étaient effectivement douteuses ". Une phrase inédite dans la bouche d'un officiel luxembourgeois, et qui montre que le procès a au moins permis de faire bouger les lignes dans le pays. Une ultime audience est prévue mercredi 11 mai pour les répliques de la défense, le jugement devant ensuite être rendu courant juin.
Jean-Baptiste Chastand
Publié le 14 Octobre 2016
L'affaire des Panama-papers est choquant dans un pays comme le Panama où l'inégalité est la règle : les plus riches cotoient les plus pauvres, cela n'est pas tolérable...
Il serait bon que le peuple se rebelle pour que l'égalité soit la règle dans ce pays et que l'action politique se fasse dans le sens de l'intérêt général.
Il est intolérable de dire que puisque la fraude est légale, on ne peut rien faire. Dans un pays inégalitaire où une partie de la population n'a rien, l'intérêt général commande que l'Etat assiste ces populations. Il n'est pas moral que des gens s'enrichissent alors que d'autres sont dans la misère. Ceci n'est pas moral. Le légal, quand il s'oppose au moral, ne peut avoir lieu dans un pays démocratique. Quand le légal n'est pas moral, il doit être changé.
Alors oui, on dit que ces faits sont motivés par le fait que trop d'impôts sont imposés dans les pays occidentaux. "Trop d'impôts, tue l'impôt" dit l'adage. Il en va donc d'un état démocratique de l'obligation qu'il a de gérer convenablement son budget afin que les riches paient suffisamment d'impôts, mais pas trop, de manière à faire en sorte que l'impôt soit utile.
Ces impôts sont indispensables car ce sont eux, in fine, qui luttent contre l'inégalité. Les gens riches doivent payer beaucoup d'impôt, mais le mérite ne doit pas disparaître dans cette imposition : si une personne a beaucoup travaillé pour gagner son argent, la majeure partie doit lui revenir...
Dans les relations qu'entretient la France avec le Panama, bien entendu, les relations avec Noriega doivent être dénoncées. Si elles ont mené à ce que des gens aient eu un préjudice, il doit être réparé par la France...
La fuite concernant les Panama-papers n'est pas immorale puisqu'elle a contribué à dénoncer l'immoralité qui a eu lieu chronologiquement avant : voler un voleur, est-ce un vol ? Dénoncer des abus par un vol, est-ce condamnable quand ce vol a servi l'intérêt général ? Non !
Un article du journal 'Le Monde' daté du 12 mai 2016
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Le Panama dans l'étau
Le scandale des " Panama papers " a créé une onde de choc dans le pays, qui craint de voir s'effondrer son économie. Mais seule une minorité milite pour moraliser la finance
Pour le défilé traditionnel du 1er-Mai, à Panama, Ronald Adamson et un groupe d'amis se sont déguisés en banquiers et en avocats, avec des liasses de faux billets dépassant de leurs poches et de leurs attachés-cases. L'un d'eux portait un masque à l'effigie d'Eduardo Morgan, le patron de Morgan & Morgan, le plus grand cabinet juridique du pays, et le plus actif dans la vente de sociétés offshore. Les militants voulaient rappeler que Mossack Fonseca n'est qu'un acteur parmi d'autres dans cette industrie – la seule différence étant que les autres ne se sont pas fait voler leurs archives…
A peine un mois après le début de la publication des " Panama papers ", ce militant de Suntracs, le syndicat des ouvriers du bâtiment, est déjà descendu trois fois dans la rue pour protester contre la corruption qui sévit dans son pays : " Dès le 7 avril, j'ai manifesté avec plusieurs centaines de personnes devant les bureaux du cabinet Mossack Fonseca. Il y avait des ouvriers, des fonctionnaires, des médecins… Nous voulions montrer notre colère et notre dégoût face aux activités des cabinets juridiques spécialisés dans l'offshore, et affirmer que le peuple panaméen n'est pas responsable. Les seuls coupables sont une poignée de gens très riches. En fait, le Panama appartient à 115 familles, connues de tous, qui contrôlent à la fois l'appareil d'Etat et l'économie. " Ces temps-ci, cet homme noir, grand, fort et jovial travaille sur un chantier à Punta Pacifica, un quartier du bord de mer couvert de gratte-ciel luxueux serrés les uns contre les autres, dont les appartements sont surtout achetés par des étrangers – c'est ici que se trouve la Trump Tower locale, en forme de voile de navire.
Corruption institutionnelle
Ronald Adamson habite à l'autre bout de la ville, dans l'immense quartier populaire de San Miguelito, insalubre, surpeuplé et délabré – maisons rafistolées avec des matériaux de récupération, dépôts d'ordures sauvages, trous de plusieurs mètres de profondeur dans les routes, fils électriques arrachés pendant de leurs poteaux… Pendant son temps libre, il milite aussi pour le Frenadeso (Front national pour la défense de droits économiques et sociaux), qui fédère diverses organisations de gauche : " Notre deuxième action a eu lieu le 19 avril, nous avons manifesté devant le bureau de la procureure générale, pour exiger qu'elle lance une véritable enquête en profondeur sur Mossack Fonseca. "
Tactiquement, le syndicaliste estime que la publication des " Panama papers " a été bénéfique pour le Frenadeso : " Les médias internationaux sont venus confirmer ce que nous répétions depuis toujours sur ce système de corruption. Cette affaire a renforcé notre crédibilité, beaucoup de gens s'adressent à nous pour obtenir des informations – ils savent que les médias locaux couvrent très mal cette affaire, puisqu'ils font partie de l'establishment. " Pour les satisfaire, Frenadeso fait traduire des articles de la presse étrangère et publie des résumés sur son site d'information et sur les réseaux sociaux. Il a aussi agrégé des données en libre accès trouvées sur un site Internet britannique et publié une liste de 50 000 sociétés panaméennes créées par Mossack Fonseca.
Parallèlement, Suntracs distribue des tracts sur l'affaire et organise des réunions d'information dans son quartier général, un petit bâtiment moderne situé au cœur de San -Miguelito. Le secrétaire général du syndicat, Saul Mendez, souligne la profondeur du problème : " La corruption est institutionnelle, elle est inscrite dans nos lois. L'évasion fiscale, le blanchiment d'argent sale, la création de sociétés bidons, toutes ces activités qui sont considérées comme criminelles dans la plupart des pays sont complètement légales ici. " Selon lui, seule la réunion d'une Assemblée constituante et la réécriture complète de la Constitution pourraient arranger les choses.
En attendant, Frenadeso et Suntracs ont entrepris de créer un parti, le FAD (Front large démocratique). " Encore un scandale institutionnel, s'insurge Saul Mendez. L'enregistrement d'un nouveau parti politique est un parcours du combattant bureaucratique invraisemblable, le pouvoir a inventé une série -infinie de tracasseries administratives et de contraintes. Mais nous allons surmonter ces obstacles, grâce à la mobilisation populaire. Avec la multiplication des affaires, les gens commencent vraiment à être révoltés. "
En fait, l'influence des syndicats reste limitée, même dans les quartiers défavorisés. Lourdes Quijala, dentiste dans un dispensaire municipal de la banlieue populaire de Pacora, est catégorique : " Mes patients ne parlent pas des “Panama papers”, point final. Ils vivent au jour le jour, certains sont dans la misère, ces problèmes de riches ne les concernent absolument pas. " Les habitants de Pacora s'intéressent plutôt à un autre scandale, qui vise l'ex-président de la République, Ricardo Martinelli, et son entourage, accusés d'avoir détourné des millions de dollars à coups de marchés -publics truqués : " L'affaire Martinelli est plus concrète, elle implique un personnage célèbre et concerne l'argent de l'Etat ", ajoute la dentiste. Ricardo Martinelli vit aujourd'hui à Miami, et le Panama n'a pas demandé son extradition.
L'hypocrisie venue du Nord
Lourdes Quijala a aussi des amis qui " s'inté-ressent aux Panama papers " dans la classe moyenne aisée. " Mais, le plus souvent, ils prennent la défense du système. Ils insistent sur le fait que ces pratiques sont légales et que les jugements moraux venus d'ailleurs sont déplacés. Ils font la distinction entre la fraude fiscale, qui est répréhensible, et “l'évitement fiscal”, qui selon eux est justifié pour les gens qui habitent dans des pays comme la France, où les impôts sont trop élevés. " Cet esprit a été fortement encouragé par les chaînes de télévision proches du pouvoir, qui, dès la publication des " Panama papers ", ont lancé une campagne patriotique aux accents virulents. De même, au sein de la jeunesse éduquée, l'affaire a déclenché une réaction nationaliste, qui s'est largement exprimée sur les réseaux sociaux. Pendant des semaines, les jeunes ont proclamé leur amour pour leur pays et ironisé sur l'arrogance et l'hypocrisie des pays du Nord, notamment la France, qui veulent une fois de plus imposer leur loi à un petit pays pauvre du Sud.
Javier Navarro, 24 ans, ingénieur dans une entreprise de travaux publics, s'agace de voir les journalistes étrangers s'ériger en moralisateurs, au nom de ce qu'il appelle une " éthique médiatique ", selon lui très discutable. Sur le fond de l'affaire, il est hostile à des contrôles accrus : " Si un jour je crée mon entreprise et que je gagne beaucoup d'argent, je voudrais pouvoir en disposer librement, le placer et le faire fructifier dans le pays de mon choix, sans que le gouvernement se mêle de ma vie. " Au fond, il n'a pas grand-chose à reprocher à Mossack Fonseca : " On les a diabolisés, c'est ridicule. Je ne dis pas que ce sont des patriotes ou des bienfaiteurs, mais ils font venir de l'argent dans notre pays, qui en a grand besoin. Si des Européens ou des Américains veulent exporter leur fortune, je préfère qu'ils l'envoient au Panama plutôt qu'ailleurs. "
En souriant, il ajoute que, en matière fiscale, la culture locale doit être prise en compte : " Ici, la triche commence au plus bas niveau. Si j'achète quelque chose dans une boutique et que je dis au commerçant que je n'ai pas besoin de reçu, il comprend tout de suite. Il ne sera pas obligé de déclarer cette vente, et en échange il me fera une ristourne. C'est une tradition ici. Alors, qui va donner des leçons à Ramon Fonseca ? " A noter qu'au Panama la fraude fiscale n'est pas un délit pénal, mais une simple irrégularité administrative, traitée par les services fiscaux sans intervention judiciaire.
Ce laxisme se marie bien avec l'ambiance désordonnée de la ville : les casinos et salles de jeux innombrables, la vie nocturne débridée où tout semble permis, les maisons closes installées au milieu des centres commerciaux, le chaos des circulations automobile et piétonne mêlées même sur les voies rapides au péril de la vie de tous, les nouveaux gratte-ciel et galeries commerciales qui se construisent un peu partout sans plan urbanistique très clair… Les " expats " qui ont choisi de vivre ici semblent apprécier cette ambiance à la fois frénétique et décontractée.
Beaucoup tiennent le même discours décomplexé : les sociétés offshore sont utiles, car elles facilitent la gestion et la transmission de patrimoine pour les gens fortunés du monde entier. Elles permettent aux entrepreneurs de certains pays de protéger leurs actifs contre des procédures abusives, par exemple le paiement de dommages et intérêts exorbitants en cas d'accident provoqué par un employé. Elles offrent un minimum de sécurité aux familles riches de pays plus violents, qui sont obligées de cacher leur fortune pour ne pas se faire kidnapper et rançonner… Enfin, du fait que le Panama n'a pas de monnaie nationale et utilise le dollar, il offre aux épargnants des pays voisins une garantie contre les dévaluations – un précieux îlot de stabilité dans une région troublée.
22 500 avocats en activité
De leur côté, les représentants des fameuses " grandes familles ", qui vivent dans des quartiers périphériques vastes, aérés et fortement gardés, espèrent pouvoir préserver le système, en l'aménageant à la marge. Ils ont déjà développé un discours bien rodé et assez uniforme. Ricardo Zubieta, chef de cabinet du ministre de l'économie et des finances, par ailleurs avocat et entrepreneur, affirme que les révélations des " Panama papers " sont caduques : " Elles arrivent un an après le vote par le Parlement d'une nouvelle loi sur la transparence, qui a changé la donne. Désormais, les cabinets juridiques connaissent les bénéficiaires réels des sociétés offshore. Les actions au porteur existent toujours, mais l'avocat qui crée la société a l'obligation de tenir un registre avec la liste nominative de leurs propriétaires. D'ailleurs, depuis cette loi, les actions au porteur sont de moins en moins utilisées, puisque l'anonymat réel n'existe plus. " Mais les noms de ces bénéficiaires ne sont toujours pas inscrits au registre public des sociétés : si les autorités judiciaires veulent connaître un nom, elles doivent en faire la demande, au coup par coup.
Le 9 mai, le gouvernement panaméen a accepté par écrit une exigence de longue date de l'OCDE et du G20 : l'échange automatique de données fiscales, une fois par an, avec les pays qui le souhaitent – mais seulement à partir de 2018, officiellement pour des raisons techniques. Déjà, le Panama était en négociations avec différents pays, dont les Etats-Unis, le -Japon, Singapour, la Colombie et l'Allemagne, pour rédiger de nouveaux traités ou introduire dans les accords existants une clause d'automaticité annuelle. Ricardo Zubieta reconnaît que la publication des " Panama -papers " a fortement incité son gouvernement à accélérer ces diverses négociations, mais rappelle qu'elles étaient déjà en cours.
Une chose est sûre, selon lui : " Les grands pays et l'OCDE sont plus exigeants avec le Panama qu'avec n'importe quel autre pays dans notre situation. Nous nous sommes engagés à surveiller non seulement les institutions financières, mais aussi seize autres secteurs d'activité, y compris les joailleries, les marchands de voitures, etc. C'est injuste, mais nous l'acceptons. " Il craint aussi que, de facto, ces accords soient à sens unique : " Nous nous engageons à envoyer toutes les données requises, mais nous savons que la réciproque ne sera pas vraie. Les grands pays ne nous envoient jamais rien. " Reste à savoir si ces futures informations, transmises une fois par an, seront plus fiables et plus exhaustives que par le passé.
Comme tout le monde dans le pays, Ricardo Zubieta regrette vivement la décision de la France d'avoir replacé le Panama sur sa liste de pays " non coopératifs " : " Le gouvernement français a agi de façon incompréhensible, précipitée et irresponsable, explique-t-il avec un sourire désabusé. Il a fait une opération politique sur notre dos, pour se construire une image vertueuse en pleine campagne électorale. " Et de rappeler que dans ses relations avec le Panama, la France n'a pas toujours eu le beau rôle : " Dans les années 1980, quand le dictateur Noriega a volé l'argent des trafiquants de drogue, il est allé le cacher en France. Or, les Français ne nous ont jamais rien rendu. A l'époque, ça ne les dérangeait pas de voir Noriega acheter un hôtel particulier à -Paris. Mais, bon, c'est le passé. "
Sur le plan judiciaire, l'enquête suit son cours, sans précipitation. Selon Rolando -Rodriguez Cedeno, secrétaire général du bureau de la procureure nationale, elle a été confiée à un procureur spécialiste de la répression du crime organisé, qui pourra travailler aussi longtemps que nécessaire – ce qui laisse présager une procédure longue. Dans un premier temps, la priorité est donnée à l'analyse des documents saisis lors de la perquisition, en avril, des locaux de Mossack Fonseca et de ses serveurs informatiques. " Nous avons des experts en interne, précise M. Rodriguez Cedeno, mais, en cas de besoin, nous pourrons embaucher des consultants extérieurs. Cela dit, à ce jour, personne n'a été -inculpé ni désigné comme suspect. En fait, nous n'avons pas encore établi si un délit a été commis… " Aucun autre cabinet juridique -panaméen n'est visé par cette enquête.
De son côté, Mossack Fonseca a porté plainte pour le vol de ses données informatiques, qu'il avait confiées à un data center géré par la -filiale panaméenne de la compagnie de télécoms internationale Cable & Wireless – un bâtiment gris quasiment désert cerné de hautes grilles, situé dans une ancienne base militaire de l'US Army, transformée en parc d'activités.
En apparence, le cabinet continue à fonctionner comme si de rien n'était. Ses bureaux du centre-ville sont animés, ses parkings sont remplis, les journalistes qui campaient sur le trottoir ont disparu et les gardes en uniforme écartent les intrus, poliment mais fermement. Ramon Fonseca, cofondateur du cabinet, ami intime du président de la République et romancier à succès, communique avec les médias par Whatsapp, mais sans répondre aux questions.
Plus généralement, les cabinets panaméens commencent à organiser leur défense. Ils en ont les moyens : Panama compte 22 500 avocats en activité, soit un pour 180 habitants, un record mondial. Les grands cabinets comptent plusieurs dizaines d'avocats à plein temps (80 pour Morgan & Morgan) et fournissent à la population des dizaines de milliers d'emplois très diversifiés. Dans la tourmente, certains veulent afficher leur sérénité. David Sucre, partenaire du cabinet Sucre, Arias, Reyes, est installé dans un petit immeuble luxueux, richement décoré. Au centre du hall trône une statue grandeur nature de son grand-père, qui fut avocat, diplomate, député et ministre. Très détendu, David Sucre explique qu'il continue à créer des sociétés pour des clients étrangers désireux d'ouvrir un compte en banque dans un autre pays : " Nous domicilions la moitié des sociétés au Panama, le reste aux îles Vierges britanniques et au Belize. Depuis la publication des “Panama papers”, certains clients ont décidé de surseoir, ils veulent d'abord voir comment la situation va évoluer ici. Récemment, j'ai eu le cas d'une compagnie d'assurances. Mais d'autres ont finalisé la création de leur société sans problème. "
Mossack Fonseca peut compter sur le soutien d'une bonne partie de la profession, notamment celui de Jose Alvarez, président de la principale association d'avocats du pays, forte de plus de 10 000 membres, y compris MM. Mossack et Fonseca en personne. Tout en conservant un ton jovial, Jose Alvarez prend leur défense sans hésitation : " L'opération “Panama papers” est à la fois illégale et immorale, puisqu'elle s'appuie sur des documents volés. " Il soutient aussi la dernière initiative de Mossack Fonseca, qui a publié le 5 mai une lettre comminatoire enjoignant aux médias de ne pas reprendre les publications – une démarche juridique chargée de symbole, " pour montrer qu'il n'est pas question de céder sur les principes ".
un scandale chasse l'autre
José Alvarez reconnaît pourtant que l'ambiance est tendue : " Certains de mes clients ont peur, ils me demandent si ce qui est arrivé à Mossack Fonseca pourrait aussi m'arriver. Je leur réponds que je n'en sais rien. " Plus globalement, il craint pour l'avenir de son pays : " Je fais partie d'un comité stratégique de haut niveau, où siègent des membres du gouvernement. Après analyse, nous avons conclu que la situation est préoccupante. " Le Panama était, selon lui, pris entre deux feux.
S'il refusait de signer les traités d'échange automatique d'informations avec les grands pays et l'OCDE, il prenait le risque d'être à nouveau placé sur la liste des pays non coopératifs. Autant dire que, privé des prêts du FMI et de la Banque mondiale, il aurait vu les taux d'intérêt des emprunts bondir. Les banques, elles, n'auraient plus trouvé de correspondants dans certains pays.
A l'inverse, accepter une certaine transparence financière s'annonce lourd de conséquences : " Les capitaux étrangers vont fuir le pays, nos banques vont se retrouver en difficulté, le crédit va s'assécher, les entreprises ne pourront plus fonctionner. Or, au Panama, 90 % des transactions se font à crédit. "
Le secteur bancaire, lui, essaie de se montrer rassurant. Il compte aujourd'hui 90 établissements – dont la moitié travaillent uniquement pour l'étranger–, qui dominent la ville du haut de leurs tours étincelantes aux formes avant-gardistes. Moises Cohen, fondateur et patron de la banque panaméenne Capital Bank, se dit lui aussi contrarié par l'attitude de la France, mais il affirme que la douleur a surtout été morale : " Pour le moment, je ne constate aucun impact négatif sur les activités de Capital Bank. A ce jour, nos clients continuent à nous faire confiance. "
Certains universitaires estiment qu'une crise est inévitable, comme Carlos Guevara-Mann, professeur de sciences politiques dans une université américaine installée au Panama : " Compte tenu des rapports de force internationaux et de la nouvelle baisse de standing subie par le Panama, le “business as usual” assorti de réformes superficielles ne suffira pas. Si les Etats-Unis l'exigent, nous signerons tous les traités d'échange d'informations, et cela aura des conséquences néfastes. Un exemple : les plus gros clients de nos banques sont les Colombiens. Je parie que, avant l'entrée en vigueur de l'accord avec la Colombie, tout leur argent sera parti ailleurs. " Il s'inquiète de la nouvelle vulnérabilité du Panama : " Le secteur tertiaire représente 87 % de notre PNB. -Notre réputation de stabilité et d'efficacité est un élément essentiel de notre survie. Or, ce capital est en train d'être détruit. Si ça continue, le pays sera à genoux. " Comme les militants de Suntracs, dont il est pourtant très éloigné socialement et politiquement, Carlos Guevara-Mann rêve d'une Assemblée constituante qui remettrait à plat le système politique.
Le fait est qu'ici un scandale chasse l'autre : le 5 mai, les Etats-Unis ont officiellement accusé la famille Waked, l'une les plus riches du pays, de trafic de drogue et de blanchiment d'argent. Les autorités américaines affirment posséder des preuves contre neuf hommes d'affaires et un réseau de 68 sociétés, dont une banque, deux journaux, des firmes d'import-export, des grands magasins… Les avoirs de ces entreprises risquent d'être saisis, leurs comptes en banque gelés, leurs contrats avec des sociétés américaines suspendus. Or, si elles ferment, de six mille à huit mille personnes pourraient se retrouver au chômage. A la demande des Etats-Unis, l'un des chefs du clan Waked a été arrêté à -Bogota. De quoi faire oublier les " Panama papers ". Le temps d'un week-end.
Yves Eudes
Publié le 13 Octobre 2016
A quel jeu jouent les sénateurs dans cette histoire ? Ont-ils oublié l'intérêt général et l'intérêt impérieux de préserver la santé des concitoyens ?
Le principe de précaution élémentaire aurait du conduire à ce que des molécules soupçonnées de cancer soient interdites : las, il n'en est rien ! A quoi jouent donc nos élus ?
Quand on va jusqu'à insulter la nature en laissant des pièges mortels aux chouettes, sert-on l'intérêt général ?
Il serait temps que le Sénat s'occupe un peu plus des citoyens et un peu moins des lobbys, car la contestation et le vote vers le Front National est le pendant de ces actions honteuses !
Un article du journal 'Le Monde' daté du 12 mai 2016
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Les sénateurs étrillent le projet de loi sur la biodiversité
Le texte remanié par la commission sénatoriale supprime notamment l'interdiction générale des néonicotinoïdes
Jusqu'à présent, la future loi-cadre en faveur de la biodiversité, déposée par le gouvernement en mars 2014, avançait laborieusement mais plutôt favorablement. Son premier passage devant le Sénat, en janvier 2016, semblait même avoir bénéficié de l'effet COP21. Mais voilà que le projet de texte " Pour la reconquête de la biodiversité, de la nature et des paysages " se confronte à un rude retour à la réalité à l'occasion de sa deuxième lecture par la Haute Assemblée.
Mardi 10 mai, en ouverture des débats, Barbara Pompili, secrétaire d'Etat chargée de la biodiversité, a pointé les avancées " remises en cause " lors du toilettage -sévère auquel s'est livrée la commission de l'aménagement du territoire et du développement durable à la veille de l'examen du texte, qui doit durer jusqu'au 12 mai. Elle a fait part de sa détermination à obtenir un " texte réellement ambitieux, opérationnel et à la hauteur des enjeux ", sous le " sceau de la responsabilité " de la part du Sénat en dépit du - " contexte préélectoral ".
Car, à l'exception notable du chapitre sur le préjudice écologique sur lequel les sénateurs ont eux-mêmes apporté leur expertise juridique, c'est une longue liste de renoncements qui ressort du travail en commission. Outre l'inscription dans la loi du principe de non-régression en matière d'environnement et l'institution d'une taxe sur l'huile de palme, la décision d'interdire les pesticides de la famille des néonicotinoïdes est également abandonnée. Le droit d'engager une procédure en justice dans le but de défendre la nature est limité à certains acteurs ; la possibilité de classer certaines zones en " espaces de continuités écologiques " dans les plans d'urbanisme passe à la trappe.
" Forme de droitisation "
" Ils ont même supprimé l'interdiction des poteaux creux, qui constituent des pièges mortels pour les chouettes, soupire le sénateur écologiste de Loire-Atlantique, Ronan Dantec. Il ne s'agit plus d'une loi de reconquête, mais de simples mesures d'accompagnement de la perte de la biodiversité que connaît le pays ! Les élus de droite se sont ressaisis ", résume-t-il pour expliquer ces ambitions revues à la baisse. " Les lobbys, -notamment ceux très puissants de l'agroalimentaire, sont remontés au créneau ", renchérit son homologue du Morbihan, Joël Labbé. " On assiste surtout à une forme de droitisation en prévision de la -primaire qui suscite le durcissement des positions vis-à-vis de -l'environnement. "
Le président du parti Les Républicains a lui-même donné le ton. Ces dernières semaines, Nicolas Sarkozy a multiplié en public les déclarations-chocs vis-à-vis de l'écologie. Il a ainsi pris position pour le nucléaire – auquel il n'existe " aucune alternative crédible ", selon lui –, s'est dit favorable à la recherche de gaz de schiste, à l'aéroport de Notre-Dame-des-Landes… Quant à la transition vers une agriculture moins destructrice pour l'environnement, l'ancien président de la République a tiré à boulets rouges sur cet objectif, le qualifiant de passe-temps pour " bobos ", " faux nez d'une véritable obsession pour la destruction de notre puissance agricole ".
Or, derrière sa dimension d'inventaire à la Prévert d'une loi-cadre foisonnante, qui porte à la fois des grands principes et des dispositions sur les vieux moulins à l'abandon qui barrent l'écoulement naturel des rivières, par exemple, se cachent des oppositions fondamentales sur les modèles d'agriculture appelés à nourrir la planète.
A quel prix pour l'environnement, la biodiversité et la santé humaine ? C'est précisément sur ce terrain que la société risque d'avoir le plus de mal à comprendre les sénateurs qui s'apprêtent à reculer sur l'interdiction des -néonicotinoïdes.
" J'explique avec pédagogie à mes collègues qu'il va falloir arrêter d'utiliser ces produits, même si on n'est pas à deux ans près pour y parvenir ", assure Jérôme Bignon, le rapporteur du projet de loi biodiversité pour la Haute Assemblée. " J'essaie de les convaincre que ce n'est pas une affaire de quelques écolos contre le reste du monde, mais une préoccupation partagée par l'immense majorité de la société ", observe le sénateur Les Républicains de la Somme, à contre-courant de la majorité de son parti sur cette question.
Après être passé à la moulinette du Sénat, le projet de loi devrait être examiné en commission mixte paritaire le 25 mai. Si les deux Chambres parlementaires ne parviennent pas à un accord, ce qui paraît probable, le dernier mot reviendra à l'Assemblée nationale. Pour l'heure, le gouvernement a déposé vingt-quatre amendements. Sur le dossier emblématique des néonicotinoïdes, celui-ci envisage de venir à bout de ces pesticides en deux temps : d'abord au cas par cas en fonction des alternatives existantes, puis en décrétant une interdiction générale au 1er juillet 2020. Signe de l'intensité des crispations sur cette affaire, la date de leur fin a été repoussée à chaque étape du parcours législatif. Initialement, elle était prévue au 1er janvier 2017.
Martine Valo
Publié le 12 Octobre 2016
On aurait pu penser que les morts de Brétigny puissent agir comme une alerte vis à vis de la SNCF... Las, il n'en est rien... L'incompétence mêlée à la fainéantise aigüe qui est la règle dans la boite, agit contre les victimes.
On cherche donc, une nouvelle fois, à se protéger, et tant pis si la vérité est la victime collatérale dans cette affaire...
Le plus choquant est que nos hommes politiques eux-mêmes se font complices de cette situation : M. Guillaume Pépy aurait dû être démis de ces fonctions dans cette tragédie ! Il ne l'a pas été : honte donc à M. Alain Vidalies qui, par son inaction, a pu rendre possible par la suite les drames de Pau et de Strasbourg...
Il va falloir que la SNCF, M. Guillaume Pépy et M. Alain Vidalies rendent des comptes in fine car ces morts sont honteux et ne sont pas dignes d'un état démocratique !
Un article du journal 'Le Monde' daté du 11 mai 2016
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Brétigny : les juges constatent le défaut de coopération de la SNCF
Les familles des victimes de l'accident ferroviaire de juillet 2013 ont été reçues, lundi 9 mai, par les magistrats chargés de l'instruction
La rencontre de trois heures a mis fin à trois ans d'attente. Les victimes de l'accident ferroviaire survenu le 12 juillet 2013 en gare de Brétigny (Essonne) ont été reçues, lundi 9 mai, au Palais de justice de Paris, un rendez-vous devenu la norme pour les catastrophes de grande ampleur.
Les trois juges d'instruction chargés de l'enquête ont dressé pour la première fois depuis l'accident une synthèse de ce dossier, particulièrement technique, volumineux de dix-huit tomes. S'ils ont constaté que la SNCF entravait l'enquête, les juges laissent les victimes sur leur faim en assurant ne pas disposer d'éléments suffisamment étayés pour engager des poursuites contre des personnes physiques potentiellement responsables de l'accident qui a fait sept morts et des dizaines de blessés.
Comme les soixante-dix victimes de l'accident présentes au Palais de justice, Thierry Gomes, président de l'association Entraide et défense des victimes de la catastrophe de Brétigny (EDVCB), a obtenu " une synthèse neutre et complète " sur les causes du déraillement du train Intercités n°3657 reliant Paris à Limoges. Selon les juges d'instruction, l'accident est imputable à un déficit de maintenance, plus particulièrement à l'état de délabrement d'une éclisse – une pièce servant à joindre deux rails. Cette agrafe métallique de 10 kilogrammes était fissurée, si bien qu'en pivotant sur l'un de ses boulons d'attache qui était dévissé, cette pièce a fonctionné comme un tremplin pour le train, provoquant son déraillement.
Mais pour les 167 victimes qui se sont portées partie civile, ces éléments ne constituent en rien des révélations. Informées par voie de presse et par leurs avocats des derniers rebondissements de l'enquête, elles ont surtout eu confirmation de leur intuition, portant sur le manque, voire l'absence, de coopération de la SNCF. Parmi les obstacles rapportés par les juges : " des communications très tardives et très parcellaires de pièces ", " les suspicions de préparation de faux documents " et " les préparations d'entretiens " avant les auditions, détaille Stéphane Gicquel, secrétaire général de la Fédération nationale des victimes d'attentats et d'accidents collectifs (Fenvac), partie civile.
Des éléments mis au jour par les écoutes judiciaires ordonnées par les juges sur plusieurs cheminots du secteur de Brétigny, et donnant lieu à plus de six cents pages de retranscription. Du jamais-vu dans une enquête sur un accident ferroviaire. " Signe que les juges ont l'intuition que la SNCF ne nous dit pas tout ", confie M. Gicquel au Monde. Dans ce volet du dossier, les juges n'ont pas été saisis par le procureur pour poursuivre leurs investigations sur une éventuelle entrave à la justice ou une subornation de témoins, et les parties civiles n'ont pas porté plainte jusqu'à présent. " Je me pose la question d'engager des poursuites ", a réagi Jean-Luc Marissal, responsable en ressources humaines, l'un des passagers du train, présent au Palais de justice.
" Des portes restent fermées "
Le double discours de la compagnie ferroviaire était en effet au cœur des questions posées lundi par les victimes. D'un côté, la -direction de la SNCF, avec à sa tête Guillaume Pepy, qui reconnaît des problèmes de maintenance des voies ; de l'autre, les avocats qui défendent la thèse de la -rupture brutale de l'éclisse liée à un défaut de l'acier. Une piste jamais confortée par les différentes expertises, et qui ne risque pas de l'être, puisque l'enquête est sur le point d'être bouclée.
M. Gomes, qui a perdu ses deux parents dans l'accident, déplore d'ailleurs n'avoir eu aucun délai concret sur la fin de l'instruction. Victimes et avocats regrettent surtout que les juges n'aient pas prévu de pointer les responsabilités de personnes physiques. " Cette rencontre était décevante, on nous explique que l'enquête touche à sa fin, mais des portes restent fermées ", dit Me Gérard Chemla, avocat d'EDVCB, qui estime qu'une analyse du dossier est à refaire : " Il y a des responsables, qui étaient au courant des problèmes de maintenance et de l'état de délabrement des voies, qui n'ont rien fait et qui pourraient être poursuivis. "
Depuis l'ouverture d'une information judiciaire par le parquet d'Evry le 24 juillet 2013, seules deux personnes morales ont été mises en examen, la SNCF et Réseau ferré de France (RFF), toutes deux mises en cause pour homicides et blessures involontaires. Trois cheminots de la SNCF, chargés de la surveillance des voies au moment du déraillement, ont, eux, été placés sous le statut de témoin assisté.
Si cette réunion constitue donc un soulagement pour les victimes qui attendaient fermement cette rencontre avec les magistrats instructeurs, M. Marissal conclut : " Notre soif de vérité demeure intacte. "
Cécile Bouanchaud
Publié le 11 Octobre 2016
Est-il bien normal que ce pays, qui se dit le plus puissant au monde, traite une partie de sa population de cette manière en leur déniant leur droit le plus fondamental à une bonne santé ?
Sous principe économique, on n'a pas hésité à empoisonner l'eau d'une population pauvre...
Les Etats-Unis sont peut-être puissants, mais leurs dirigeants sont de tout petits hommes qui ne valent rien car ils renient à leurs concitoyens leur droit de vivre dans la dignité...
Honte sur eux !
Un article du journal 'Le Monde' daté du 28 avril 2016
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Du plomb dans les têtes
Les habitants de Flint, dans le Michigan, ont consommé à leur insu, d'avril 2014 à octobre 2015, de l'eau saturée de plomb. Dans cette ville à majorité noire dévastée par la crise, la population a perdu confiance dans les services sanitaires et exige la transparence de la part de ses élus
La jeune femme ne craque pas, mais les larmes ne sont jamais loin lorsqu'elle raconte son quotidien empoisonné. Longs cheveux bruns, maquillage discret, Jennifer Corona se confie dans une salle de l'école élémentaire où sont scolarisés ses jumeaux de 7 ans. A 30 ans, cette jeune mère au foyer a aussi deux filles de 15 et 11 ans. Depuis des mois, elle tremble pour la santé et l'avenir de ses quatre enfants. Depuis des mois, ses journées sont rythmées par une occupation d'un autre âge : récupérer assez d'eau potable pour satisfaire les besoins élémentaires d'une famille de six personnes. " On utilise environ 80 bouteilles d'eau minérale chaque jour, pour boire, se laver, cuisiner… Aller chercher les bouteilles, les stocker au sous-sol, chauffer l'eau pour la toilette : c'est un job à temps complet ", raconte la mère de famille, entre colère et désespoir.
Comme les quelque 100 000 habitants de la ville de Flint, dans le Michigan, une ancienne place forte de l'industrie automobile américaine, la famille Corona est prise au piège d'un scandale sanitaire sans précédent, survenu sur fond de négligences politiques et d'erreurs administratives. A leur insu, les résidents de cette ville à majorité noire dévastée par la crise économique, ont, durant dix-huit mois, consommé de l'eau saturée de plomb. Depuis que l'affaire a éclaté, en septembre 2015, sous la pression d'une pédiatre inquiète des taux de plomb présents dans l'organisme de ses petits patients, les habitants ont basculé dans une autre dimension. Ils sont désormais obsédés par la pureté de l'eau et la transparence politique.
L'origine de ce désastre remonte au printemps 2014, après la décision controversée d'un gestionnaire nommé par l'Etat pour administrer la ville, décrétée en situation " d'urgence financière " depuis 2011. Soucieux de réaliser des économies, il entreprend de changer le système d'alimentation en eau de la ville et débranche les circuits qui la reliaient à Detroit, à une centaine de kilomètres au sud-est, pour pomper l'eau dans la rivière de Flint. Non seulement de sérieux doutes existent sur la qualité de cette eau, mais les autorités sanitaires locales omettent d'y adjoindre les produits destinés à éviter la corrosion des canalisations. D'avril 2014 à octobre 2015, l'eau qui arrive chez bon nombre des résidents charrie donc le plomb d'infrastructures anciennes, laissées en déshérence. Depuis, Flint s'approvisionne de nouveau à Detroit, mais les tuyaux corrodés et plombés sont toujours là.
odeur et couleur suspectes
D'étranges scènes se déroulent désormais dans la ville, jalonnée de maisons abandonnées par des habitants vaincus par la crise économique. Sur le parking de la First Trinity Missionary Baptist Church, à deux pas du centre-ville, sont entassées des dizaines de palettes de bouteilles d'eau. Dans un incessant défilé, des voitures s'arrêtent à la hauteur des volontaires qui remplissent jusqu'à ras bord des coffres grand format. " On reçoit des dons privés de tout le pays ", assure Catrina Tillman, l'énergique jeune épouse du pasteur, dont les équipes distribuent aussi lingettes et liquide antiseptique pour éviter autant que possible d'utiliser l'eau. A la caserne des pompiers, les bouteilles sont payées par l'argent public, et de jeunes soldats les distribuentaux conducteurs pressés.
" Dès les premières semaines après le changement de système, on a arrêté de boire l'eau du robinet : l'odeur, la couleur étaient suspectes ", explique Jennifer Corona en montrant sur son téléphone une vidéo où le liquide marron sort à jet discontinu du robinet de sa cuisine. " Quand on a su qu'ils allaient utiliser l'eau de la rivière, on n'en croyait pas nos oreilles, soupire Rhonda Kelso, native de Flint. Plus personne n'ose s'y baigner depuis des années ! " Appuyée sur une canne, souffrant de multiples pathologies, la quinquagénaire exhibe elle aussi une photo. Un gros plan de la nuque de sa fille. " Elle a 12 ans et a commencé à perdre ses cheveux, quelques mois après le changement ", raconte la mère de famille afro-américaine, contenant difficilement sa colère. " Moi, on m'a trouvé du plomb dans le foie. J'ai payé des impôts pour me faire empoisonner ! " Malgré les filtres distribués depuis des mois, certains foyers continuent de rincer la vaisselle à l'eau minérale, limitent la durée des douches et ont proscrit les bains.
A l'inquiétude des habitants, maintenant très au fait des effets du plomb sur l'organisme – troubles du développement et du comportement pour les enfants exposés avant 6 ans, risques de stérilité… – s'ajoute une immense colère contre les autorités. " On n'aurait jamais imaginé vivre ça dans un pays qui n'est pas dans le tiers-monde ", lance avec amertume Karen Christian, présidente de l'association des enseignants de Flint, qui se bat pour que la ville embauche des infirmières scolaires et que des tests cognitifs soient réalisés sur les enfants touchés.
" Quelques semaines après le changement, quand on a commencé à poser des questions, l'ancien maire - Dayne Walling, battu en novembre 2015 - s'est présenté avec un verre d'eau trouble en nous assurant que l'on pouvait la boire sans crainte ", se souvient Elnora Carthan, une élégante septuagénaire en tailleur noir, partie prenante dans l'une des plaintes ouvertes contre le gouverneur. La mairie se contentait de conseiller aux habitants de laisser couler l'eau une dizaine de minutes avant de la consommer. " Mais elle ne proposait pas de payer la facture ! " Comble de l'impéritie des services de santé, pendant plusieurs semaines les autorités ont recommandé de faire bouillir l'eau, pour reconnaître après-coup que les effets du plomb étaient ainsi pires encore. Depuis, des panneaux d'avertissement rédigés en anglais et en espagnol ont fleuri dans la ville : " Faire bouillir votre eau n'élimine pas le plomb. "
Des interrogations demeurent sur la bonne foi des responsables politiques. L'Etat et la ville assurent avoir suivi les directives des agences sanitaires, sans recevoir les alertes nécessaires ; les agences, elles, reconnaissent tout juste n'avoir pas agi assez vite. Pour l'heure, seuls deux fonctionnaires ont été démis de leurs fonctions. Des enquêtes judiciaires et administratives sont en cours et le gouverneur républicain, Rick Snyder, auditionné mi-mars par le Congrès, a répété qu'il n'avait pas été informé des risques encourus par la population. La commission qu'il a lui-même mise en place a pourtant jugé, le 23 mars, que cette crise relevait " d'erreurs de gouvernance, d'intransigeance, d'impréparation, de retards, d'inaction et d'injustice environnementales ".
" Ils nous ont menti pendant deux ans "
Rick Snyder s'est excusé mais a exclu toute démission, en dépit de pétitions l'exigeant et des appels sans ambiguïté lancés par les deux candidats démocrates à l'investiture pour l'élection présidentielle, Hillary Clinton et Bernie Sanders. Ces derniers sont venus débattre à Flint le 6 mars pour marquer leur solidarité avec la population et donner un coup de projecteur national sur cette crise inédite.
Sur place, les citoyens doutent que les responsables paient un jour. " Personne n'ira en prison ", regrette Paula McGee, une habitante de Flint, ancienne star de basket devenue pasteure. Trachelle Young, une avocate de la ville, consacre bénévolement une partie de son temps à la class action engagée en novembre par des habitants contre le gouverneur. Dans ses locaux défraîchis, où s'empilent, comme partout, des packs de bouteilles d'eau, la jeune femme s'emporte contre un scandale " prévisible et qui aurait pu être évité ". " On va avoir des générations d'enfants malades, et c'est irréversible. Il faut que les responsabilités soient établies et que des fonds soient débloqués pour préparer l'accueil de ces enfants. "
Au fil des mois, une méfiance infinie envers les autorités s'est ancrée dans les esprits à Flint. " Ils nous ont menti pendant deux ans. Comment les croire à nouveau ? ", s'interroge Frances Gilcreast, présidente locale de l'Association nationale pour la promotion des gens de couleur (NAACP). " Ils pourront peut-être réparer les canalisations, mais pas la confiance ", prédit-elle. Certains voient même dans cette affaire un déni de démocratie. " Cette décision catastrophique a été prise par un gestionnaire de crise, pas par un élu. C'est comme si on nous avait privés de notre droit à la parole ", déplore Karen Christian.
A cette défiance s'ajoute la conviction que ce scandale sanitaire n'est pas arrivé à Flint par accident. " On est pauvres, on est noirs, c'est souvent dans ces villes-là qu'est déclaré l'état d'urgence financière et que sont nommés des gestionnaires, qui prennent le pas sur les élus ", dénonce Frances Gilcreast. Sur ces terres démocrates, beaucoup soupçonnent aussi le gouverneur républicain d'avoir détourné les yeux du problème. " C'est vrai qu'on ressent une forme d'irrespect pour ces populations pauvres, qu'elles soient noires ou blanches ", ajoute Paula McGee. " Je ne connais pas de cas semblable dans une ville riche et blanche ", renchérit Paul Mohai, créateur du département de justice environnementale à l'université du Michigan. " Le lien entre les forts taux de pollution et la concentration de populations noires est connu, mais le nombre de victimes potentielles, l'ampleur des dégâts font de Flint un scandale sans précédent ", ajoute l'universitaire qui s'étonne de l'inertie des autorités après les premières plaintes des habitants et les mises en garde de responsables locaux.
L'équipe de la nouvelle maire, Karen Weaver, une pédopsychiatre afro-américaine nouvelle venue en politique, veut croire que " la période de méfiance est révolue ". Ce soir de mars, la jeune femme, juchée sur des talons aiguilles, a, pour une fois, de bonnes nouvelles à annoncer. Dans une salle de basket de la ville, dont une partie croule sous les packs de bouteilles, l'élue explique avoir obtenu de l'Etat 30 millions de dollars (26,5 millions d'euros) pour aider les habitants à payer leur facture d'eau. " Ce n'est pas assez, bien sûr, et nous allons continuer à mettre la pression sur le gouverneur ", lance-t-elle sous les applaudissements d'une salle majoritairement noire. Faute de budget, les travaux de remise aux normes des canalisations ont à peine démarré. Au total, ils pourraient coûter 1,5 milliard de dollars et s'étaler sur plusieurs années. Dans l'immédiat, les multiples associations mobilisées pour aider la population ont déjà prévu de prolonger les " mesures d'urgence " – distribution d'eau, de filtres… – pendant au moins un an.
D'ici là, Jennifer Corona se sera peut-être résolue à faire tester ses enfants. Pour l'instant, elle a trop peur. Peur de découvrir qu'ils ont du plomb dans l'organisme. Peur de devoir admettre qu'elle n'y peut rien.
Stéphanie Le Bars
Publié le 10 Octobre 2016
Je suis partisan de toutes les méthodes quand il s'agit de défendre l'intérêt général... Je crois que la brutalité, la véhémence sont nécessaires quand la diplomatie et la politesse ont révélé leurs limites.
Mais M. Laurent Wauquiez défend-il l'intérêt général par ses méthodes ou juste une ambition personnelle servie par son populisme ?
On est en droit de se poser la question...
La défense de l'intérêt général ne peut être réalisée si toutes les opinions ne peuvent être faites. La liberté d'expression est une des pierres angulaires de notre démocratie, elle ne peut être limitée, ce, à aucun prix et quelles qu'en soient les raisons ! M. Laurent Wauquiez est donc dans une faute politique majeure en empêchant les membres de l'opposition de parler !
En attendant, depuis son arrivée, pas un seul comité de ligne sur les transports TER n'a été organisé : M. Laurent Wauquiez en aurait-il rien à faire des problèmes quotidiens des voyageurs dans les trains ?
Sa politique est faite de précipitation non concertée, de populisme uniquement destinés à servir une ambition démesurée par rapport à ses compétences réelles : celles de servir l'intérêt général...
Nous n'avons pas choisi la bonne personne à la tête de cette région car elle est plus obnubilée par ses intérêts propres que ceux de ses concitoyens...
Un article du journal 'Le Monde' daté du 26 avril 2016
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Wauquiez, la méthode-choc en guise de rupture
Le président LR de la région Auvergne-Rhône-Alpes multiplie les annonces, quitte à réduire le temps du débat
La véhémence avec laquelle ce dernier a fustigé l'attitude des élus absents illustre le climat d'extrême tension régnant entre M. Wauquiez et ses adversaires depuis son accession à la tête de la collectivité, le 4 janvier.
Depuis près de quatre mois, le style de l'ex-ministre de Nicolas Sarkozy irrite les élus de l'opposition. Du PS aux écologistes, en passant par le FN, tous décrivent un homme autoritaire, méprisant, qui coupe la parole et limite au maximum le champ d'expression de ceux qui ne font pas partie de sa majorité LR-UDI-MoDem. " On était prêt à travailler en bonne intelligence avec lui mais nos relations sont déjà catastrophiques, déplore le chef de file du FN dans la région, Christophe Boudot. C'est une question de ton et de personnalité. Il ne peut pas s'empêcher d'avoir un mot de mépris pour l'opposition. "
Ce dernier va même jusqu'à " regretter " la façon dont son prédécesseur, le socialiste Jean-Jack Queyranne, gérait l'Assemblée régionale : " Malgré nos désaccords, il était toujours cordial et laisser tous les groupes d'opposition s'exprimer lors des assemblées plénières. " Pas Laurent Wauquiez. " Il a un fonctionnement autocratique. Il veut être le seul décisionnaire sur tous les sujets, en considérant que l'opposition n'a pas son mot à dire ", peste à son tour le président du groupe PS, Jean-François Debat, alors que le chef de file des écologistes, Jean-Charles Kohlhaas, le brocarde en " monarque napoléonien ", qui " décide seul ". " Laurent Wauquiez est très directif et n'admet pas qu'un engagement pris ne soit pas mis en œuvre ", convient Etienne Blanc, premier vice-président de la région, chargé des finances. " C'est un type très intelligent et très rapide, qui va à l'essentiel et rend les débats plus concis, le défend Patrick Mignola, vice- président MoDem, chargé des transports. L'opposition a tort de l'interpréter comme de la brutalité, car c'est seulement un changement de méthode. "
300 millions d'économies
A 41 ans, cet homme pressé a immédiatement cherché à marquer une " rupture " – un mot sarkozyste qu'il répète inlassablement – avec la gestion de M. Queyranne. Un vrai bulldozer. Pour incarner le changement, il a affiché sa volonté de réaliser plus de 300 millions d'économies sur les dépenses de fonctionnement à l'issue de son mandat – quitte à mettre la collectivité " à la diète " – afin de disposer de davantage de moyens financiers pour investir dans des projets, sans être contraint d'augmenter les impôts.
Mais pour l'instant, celui qui se donnait cent jours pour dessiner une nouvelle région a surtout multiplié les mesures symboliques et les formules-chocs. Laurent Wauquiez a notamment joué sur la fibre populiste, en laissant entendre que les élus ne seraient pas tous exemplaires. " Il faut revenir à quelque chose qui soit intègre et honnête ", a-t-il déclaré fin janvier, en médiatisant à outrance sa décision de baisser de 10 % les indemnités des conseillers régionaux, la suppression des téléphones portables pour tous les élus ou la vente de cinquante voitures du parc de la collectivité…
Car la communication est un -pilier essentiel de la méthode de gouvernement du vice-président délégué des Républicains (LR). Chaque jour, ou presque, ce grand ambitieux présente une nouvelle mesure dans la presse locale pour donner l'impression que son arrivée aux manettes est synonyme de " vrai changement ". L'opposition l'accuse de se laisser aller à des effets d'annonce permanents, sans être assurée de la mise en œuvre concrète des mesures promises. Le 7 avril, le député de -Haute-Loire a par exemple annoncé en fanfare que des bourses au mérite seraient attribuées aux bacheliers, sans délibération du conseil régional et sans avoir prévu cette dépense au budget.
Un mois plus tôt, il avait déjà indiqué que la région allait investir 100 millions d'euros dans la construction d'une autoroute entre Lyon et Saint-Etienne, sans s'accorder avec les autres élus concernés. Lesquels ont vu rouge et l'ont contraint à reporter ce projet. Le 30 mars, il a promis " 100 millions d'euros de plus pour la formation ". Trois jours après, aucune trace de ce choix stratégique dans le budget… " Il fait de la communication mensongère ! ", s'étrangle M. Debat.
Le jeune loup va si vite que, parfois, ses vice-présidents ne sont même pas au courant de ses décisions… dans leurs propres domaines de compétence. C'est ainsi que le 6 avril, M. Wauquiez a tenu une conférence de presse sur la question des lycées, sans même avoir convié sa vice-présidente en charge de cette thématique. " Il va trop vite, tranche M. Kohlhaas. Une collectivité de 8 millions d'habitants, avec 9 000 agents, ça ne se change pas en cent jours ! "" Sous couvert de moderniser le fonctionnement de l'institution, il la maltraite ", en a conclu M. Queyranne dans une tribune au Monde, publiée le 6 avril.
L'équipe du président de région assume ce tempo effréné. " Laurent Wauquiez est un vrai patron. Il veut accélérer la mise en œuvre de notre programme, car la mandature ne dure que six ans et on profite que l'opposition ne soit pas encore en ordre de marche ", confie M. Blanc. M. Mignola relativise à son tour les critiques contre M. Wauquiez : " L'opposition s'attaque à son style car elle peut difficilement remettre en cause le cœur de sa politique, qui consiste à diminuer les dépenses de fonctionnement pour augmenter celles d'investissement. "
Reste que l'ex-ministre de M. Sarkozy – qui n'a pas souhaité répondre aux sollicitations du Monde – a lui-même fait les frais de son empressement, en enregistrant une déconvenue sur la mesure phare de sa campagne. Après les attentats du 13 novembre, il avait promis la mise en place de portiques de sécurité à l'entrée des lycées de sa région mais son idée s'est heurtée au principe de réalité et à la résistance de proviseurs et de parents. Résultat : au lieu des 600 portiques prévus, seule une poignée devrait finalement être installée.
En outre, l'opposition l'accuse de " clientélisme ", en pointant une subvention de 300 000 euros octroyée par la région pour un projet de mise en lumière des -monuments du Puy-en-Velay, la commune qu'il a dirigée de 2008 à 2016, ou une autre de 50 000 euros pour l'UNI, un syndicat étudiant marqué très à droite. Soit le créneau occupé par Patrick Buisson, l'ex-conseiller de M. Sarkozy venu de l'extrême droite, que M. Wauquiez continue de rencontrer. De quoi alimenter l'idée que M. Wauquiez veut faire de ce territoire une machine de guerre au service de ses ambitions nationales. Le recrutement à la région de deux piliers du siège parisien de LR – dont Ange Sitbon, spécialiste de la carte électorale – au nez et à la barbe de M. Sarkozy, n'en est qu'une illustration.
Alexandre Lemarié avec Richard Schittly (à Lyon)
Publié le 7 Octobre 2016
Les lanceurs d'alerte servent la démocratie ! Ils servent l'intérêt général ! Ils doivent donc être protégés et soutenus dans leur combat !
Cela passe par une reconnaissance politique, certes, mais aussi citoyenne, car, dans de trop nombreux cas la population elle-même ne les soutient pas assez, les entraînant dans une spirale dépressive qui nuit à tous...
Dans le combat qu'ils mènent, il faut qu'ils soient soutenus et que leurs frais d'avocat soient remboursés au centimes près : l'intérêt général le commande !
On pourrait aussi penser à la possibilité que ces gens puissent changer d'identité comme les collaborateurs dénonçant des pratiques mafieuses : après tout, là aussi, la défense de l'intérêt général est évidente ! Cela faciliterait grandement leur emploi dans une nouvelle entreprise...
En tout cas, ce sont des héros et ils doivent pouvoir être traités comme tels, à la fois par la loi, les politiques mais aussi de tous les citoyens qui ont bénéficié directement de leur courage.
Ils ne doivent pas être seuls, comme le dit M. Denis Robert, lui aussi, un héros de notre société !
Un grand merci à eux tous !
Un article du journal 'Le Monde' daté du 26 avril 2016
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Les rudes lendemains des lanceurs d'alerte
Du Mediator à UBS, les dénonciateurs de scandales, mal protégés, subissent procès, chômage et intimidations
Les nouveaux héros du quotidien se reconnaissent aux " bravo " et " merci " que leur adressent les passants dans la rue. A cet air ému et à leur allure un peu gauche lorsqu'ils montent sur scène pour recevoir un prix, une Marianne, voire le diplôme de citoyen de l'année. Ces honneurs les portent et les réconfortent, bien sûr. Mais une fois les estrades redescendues, les vivats évanouis, eux seuls, les " lanceurs d'alerte ", connaissent l'envers du décor et les conséquences de leur geste sur leur vie et celle de leurs proches.
Difficile de savoir combien ils sont à payer le prix fort pour avoir dénoncé les dysfonctionnements dont ils ont été témoins dans leur travail. Mais le procès d'Antoine Deltour qui s'ouvre mardi 26 avril au Luxembourg aux côtés d'un de ses ex-collègues, Raphaël Halet, et du journaliste Edouard Perrin, est emblématique de ces lendemains vertigineux. Le père de famille de 30 ans risque dix ans de prison et plus d'un million d'euros d'amende. L'intérêt général retiendra que l'ancien auditeur de PricewaterhouseCoopers a permis la révélation d'un vaste système d'optimisation fiscale établi entre des multinationales et le Grand-Duché. Son ex-employeur bloque sur le vol de données et la divulgation de secrets d'affaires.
L'après est souvent cauchemardesque, mais si c'était à refaire, la quasi-totalité des personnes interrogées par Le Monde recommenceraient. La question se pose d'autant moins chez ceux dont l'alerte constituait le cœur de métier. Nicolas Forissier dirigeait le contrôle interne de la banque UBS France. Au milieu des années 2000, il fait fermer " une soixantaine " de comptes liés au grand banditisme sans que cela ne froisse personne. L'accueil fut tout autre, en 2007, lorsqu'il a rapporté l'existence d'une comptabilité parallèle dissimulant un système d'évasion fiscale en Suisse. " Ils allaient avoir ma peau. Mais si j'avais fermé les yeux, aujourd'hui je pourrais être interdit d'exercer et mis en examen. " La banque suisse UBS AG est poursuivie pour " blanchiment aggravé de fraude fiscale " et " démarchage illicite ".
La réplique fut violente. Passe encore le climat délétère des dix-huit mois qui ont précédé son licenciement. Nettement plus désagréables furent le rat éventré retrouvé sur le climatiseur de sa voiture, les mots sur le pare-brise – " Si tu vas trop loin, on sait où tes enfants vont à l'école " –, son domicile visité, et ces " personnes, dans la rue, qui vous observent en regardant leur montre ". La banque niera toujours être à l'origine de telles intimidations. Hasard ou pas, son ex-collègue Stéphanie Gibaud, qui, elle aussi, a contribué à dénoncer ce système d'évasion fiscale, a retrouvé la porte de son appartement trois fois grande ouverte le matin. Depuis, elle vit avec un chien.
A mesure que la menace s'éloigne, l'usure psychologique s'installe. Le bras de fer entre Nicolas Forissier et son ancien employeur dure depuis neuf ans. Certes, il a gagné 300 000 euros aux prud'hommes, mais UBS a fait appel. " Je ne manque de rien, j'ai un toit, un chauffage, mais ma vie est réduite à sa plus stricte simplicité. Tout mon salaire passe en frais d'avocats : 6 000, 7 000 euros par trimestre. Et je n'ose imaginer si je perds en appel. "
Minima sociaux
L'affaire UBS a rapporté des milliards d'euros à l'Etat grâce à la régularisation de milliers de comptes, mais elle a détruit une femme. Stéphanie Gibaud, licenciée il y a quatre ans, est toujours sans travail. " Qui voudrait de celle qui a parlé ? ", se désole l'ex-responsable événementiel d'UBS France. Aujourd'hui, elle vit des minima sociaux : 450 euros par mois quand on est mère célibataire de deux ados, c'est maigre. Au risque de lasser, elle rappelle les heures passées à renseigner les douanes. Ne comprend pas l'incapacité de l'Etat à indemniser le préjudice. Ses lettres à Bercy, au président de la République, au garde des sceaux, au défenseur des droits sont restées vaines.
Le lanceur d'alerte échappe rarement à une campagne de discrédit. " Après quinze et vingt ans de travail sans histoire à Monaco, nous serions “des gestionnaires indélicats” ", soupirent Céline Martinelli et Mathieu Chérioux, deux des trois anciens employés de la banque Pasche qui, en 2012, ont signalé des remises d'espèces douteuses. Ils ont été mis à la porte un an plus tard. " Alors qu'on aurait très bien pu fermer les yeux, ne rien dire et partir chercher ailleurs, nous voilà sans emploi " – aucune banque n'a répondu à leurs lettres de candidatures –, " déboutés en premier instance " par le tribunal du travail et avec " des amis qui nous ont subitement tourné le dos ".
Inévitablement, la famille trinque. A la maison, le sujet prend toute la place. Vos amis vous trouvent obsessionnel. " Alors que c'est souvent eux qui, par sympathie, demandent des nouvelles de “votre” affaire ", rectifie Daniel Ibanez, organisateur du Salon du livre des lanceurs d'alerte, et ardent détracteur du tunnel Lyon-Turin. Amélie, la petite dernière de la pneumologue Irène Frachon, ne veut plus entendre parler du Mediator ni des laboratoires Servier qui lui ont volé sa mère durant six années. Hervé Falciani, l'informaticien de HSBC parti en 2008 avec des listes d'évadés fiscaux, et désormais conseil " du gouvernement grec, de municipalités Podemos en Espagne, mais aussi de Chypre ", vit toujours sous protection en Espagne.
Le couple d'Olivier Thérondel n'a pas résisté. Lui, c'est l'ancien fonctionnaire de Tracfin, la cellule antiblanchiment de Bercy, qui s'agaçait sur un blog de la lenteur avec laquelle sa direction gérait l'affaire Cahuzac. " Lorsque j'ai reçu ma convocation pour “violation du secret professionnel”, j'ai voulu médiatiser. Pendant des mois, j'ai été absorbé par mon combat, alors que mon amie, le politico-financier c'était pas son univers. " Condamné à deux mois de prison avec sursis, mais sans inscription au casier, il est toujours aux douanes. Il vit mal sa perte d'anonymat et, lors du premier rendez-vous, ne donne pas son nom de peur que la jeune femme ne rappelle pas.
" Il faut casser le mythe du lanceur d'alerte assoiffé de médias. En réalité, il rêve de tranquillité ", confirme Daniel Ibanez. Bernard ne souhaite d'ailleurs ni que l'on donne son nom ni que l'on s'étende trop sur sa nouvelle vie de libraire, pour préserver sa sérénité retrouvée. Il y a dix ans, directeur financier dans le parapétrolier, il s'était ému auprès de sa hiérarchie du système de contournement de l'impôt de la société. Pressions, intimidations, rumeurs, procès, il a tout subi, et n'a jamais retrouvé de travail dans sa branche.
Le seul à regretter son geste est l'ex-commandant de police Philippe Pichon, pourfendeur du fichier de traitement des infractions STICet de ses données erronées. Face à la sourde oreille de sa hiérarchie, il se tourne vers la presse. Le site d'information Bakchich publie, en 2008, les fiches de Johnny Hallyday et Jamel Debbouze. Le ministère de l'intérieur n'apprécie guère. Mise à la retraite d'office de l'indélicat, qui n'a pu conserver sa maison que grâce à la solidarité familiale. En 2014, le médiateur de la police a plaidé pour sa réintégration. Lui qui rêve " de contact humain ", et vivote de missions de conseil juridique, attend toujours.
Seul, on ne tient pas
Un jour, pourtant, les procédures judiciaires s'éteignent et l'ennemi qui vous a tant hanté disparaît. Foi de Denis Robert, l'homme qui s'est battu dix ans contre la société luxembourgeoise Clearstream. Antoine Deltour ne fut pas le premier à lui demander conseil. Seul, on ne tient pas, confirme Denis Robert. Lui a supporté une quarantaine de procédures dans cinq pays grâce à l'ingéniosité d'une bande de copains qui a tout osé – vendre des tee-shirts, transformer un mauvais vin en cuvée " Denis Robert ", organiser un concert à la Cigale – pour payer les plus de 100 000 euros de frais d'avocats.
Antoine Deltour n'a pas encore cette notoriété mais son comité a déjà récolté 18 000 euros. Après l'émission " Cash investigation " sur les " Panama papers ", Stéphanie Gibaud a, elle, reçu 12 000 euros de dons anonymes. En attendant qu'une loi cohérente et adaptée protège les lanceurs d'alerte en France, la société civile soutient comme elle peut ses modèles du moment.
émeline Cazi
Publié le 6 Octobre 2016
Voici une lettre que j'ai envoyée récemment à M. Alain Juppé, candidat déclaré aux primaires de la droite pour les élections présidentielles de 2017...
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Expéditeur
Philippe NOVIANT
Destinataire
M. Alain Juppé
Maire de Bordeaux
Place Pey Berland
33000 Bordeaux
Le 3 mai 2016
Monsieur Alain Juppé,
Tout porte à croire, au vu de la situation actuelle, que vous serez élu Président de la République en Mai 2017. A mon avis, cela ne fait aucun doute : la longévité de votre carrière politique de haut niveau, plaide en cette faveur. De plus, vous avez exercé les plus hautes fonctions, locales et nationales. Le fait, enfin d'avoir une image de victime payant pour la faute d'autres vous apporte indéniablement un critère de sympathie fort, vis à vis de bon nombre de nos compatriotes. Nos citoyens aiment les gens qui ont eu l'humilité de s'exiler après avoir été accusés d'avoir fauté. Certains ont eu Sainte Hélène, d'autres le Canada ;) Il n'est donc pas surprenant qu'un pardon soit donné majoritairement quand la faute n'a nullement impliqué la corruption ou l'enrichissement personnel.
Vous serez donc notre président en 2017, ce, de manière quasi-certaine. C'est un fait. Cependant, cela ne sera pas l'aboutissement de votre carrière, loin s'en faut. Bien au contraire, cela n'en sera que le commencement ! Si vous me permettez une comparaison hasardeuse, l'aboutissement de la carrière de M. Aimé Jacquet n'a pas commencé ce jour d'automne 1993 où il a pris les rênes de l'équipe de France de football ! L'aboutissement de sa carrière a au contraire eu lieu ce jour de juillet 1998 où l'équipe de France est devenue championne du monde ! La nomination ou la sélection à un poste ne peut donc valoir de fin en soi, c'est au contraire le remplissage d'objectifs qui l'est !
Quels sont ces objectifs ? Rendre à la France la place qui est la sienne sur l'échiquier international, c'est une évidence. Dans tous les domaines, nous perdons des places : la compétitivité économique, la santé, l'éducation, notre poids géopolitique, notre défense, n'en sont que quelques criants exemples.
Mais en plus de rendre à la France le lustre qui doit être le sien, la priorité des priorités est de mettre en œuvre des actions au service de l'intérêt général, in fine au service de tous les Français. En ce sens, nos politiques ont énormément perdu de leurs compétences ces 30 dernières années. M. Emmanuel Macron, devenu le symbole de la politique actuelle, a une définition de la politique. Pour lui, ce sont deux choses : de l'idéologie et des discours. Las, la véritable définition de la politique, c'est tout le contraire ! C'est du pragmatisme et des actions ! Cela montre et démontre bien que les choix politiques de ces 30 dernières années ont mené à des actions désastreuses vis à vis de l'intérêt général. L'idéologie et les discours ont mené à une gestion calamiteuse de notre pays où le budget n'est plus géré convenablement. Pire, il est géré comme un ménage gagnant le SMIC, surendetté, qui serait pris à la gorge financièrement à ne plus pouvoir rembourser ses traites, mais qui ne saurait dire non quand ses enfants demandent l'achat de la dernière PlayStation pour Noël ! Nos politiques ont trop souvent confondu leurs désirs et la réalité. Ils ont trop souvent eu une trop grande confiance dans leurs actions et n'ont eu que très rarement l'humilité de pouvoir dire "je ne sais pas, mais on va essayer". Bien au contraire, ils engagent trop souvent des actions rapides et faites en dépit du bon sens et cette rapidité à vouloir réformer contre tous, sans mettre en place les actions pour contrecarrer les peurs au changement, a conduit trop souvent notre pays à un manque de réformes ou à des réformes totalement inefficaces. La priorité des priorités consistant à préserver l'intérêt général ne peut se satisfaire de personnes accaparées par leur idéologie ne se remettant que trop rarement en question.
L'idéologie, les discours doivent prendre fin. Les promesses, les dépenses dispendieuses effectuées pour calmer les plus virulents doivent cesser elles-aussi ! On ne peut plus continuer à dépenser l'argent que l'on n'a pas ! On ne peut plus continuer à payer des chômeurs 6000 Euros par mois pour qu'ils aillent faire les fanfarons sur M6 en disant qu'ils font le tour du monde avec cet argent car ils le méritent et qu'ils ont cotisé pour ça ! Les allocations chômage ne sont pas et n'ont jamais été des salaires de substitution ! Nous ne pouvons plus tolérer des profs de classe prépa payés près de 6000Euros par mois en heure sup' car ils ont le privilège de faire passer 3 élèves à la fois en colle ! Nous ne pouvons plus tolérer des greffiers près les tribunaux de commerce être payés près de 30000Euros par mois pour aucun talent, aucun risque et aucune valeur ajoutée ! Nous ne pouvons plus tolérer de payer 1200Euros des huissiers à violer la vie privée des gens pour constater un adultère ! Nous ne pouvons plus tolérer ces mêmes huissiers être payés 1200Euros pour faire appliquer une décision de justice demandant à un ménage de quitter leur habitation sous motif de loyer non payé ! Nous ne pouvons tolérer de payer toujours ces mêmes huissiers à récupérer 700Euros pour une saisie attribution sur compte bancaire ! L'Etat est responsable des abus des huissiers car c'est l'Etat qui fixe leurs pouvoirs et que ces pouvoirs sont trop souvent mis à leur profit sans respect de l'intérêt général. Tous ces frais, toutes ces dépenses sont injustifiables. Elles le sont vis à vis des citoyens, mais aussi de l'état. Il est donc temps d'y mettre bon ordre.
Le problème, c'est que lorsque l'on s'attaque à des injustices en voulant appliquer des réformes, ceux qui profitent de ces injustices sont rarement coopératifs. On a vu des premiers ministres reculer devant un personnel nanti à la SNCF, alors même que l'intérêt général de la mesure était évident. Les réformes simples sont inefficaces, et les plus efficaces ne sont pas simples car elles impliquent toujours que des gens voient partir certains de leurs avantages, même s'ils sont complètement injustifiés vis à vis de l'intérêt général.
Dans un pays où les réformes sont toujours acceptées lorsqu'elles ne touchent que les autres, il va donc falloir trouver un moyen de mettre en place ces réformes. Les Français veulent des réformes... sans que rien ne change. Les Français jugent toujours que la faute vient des autres : les radars automatiques sont justifiés pour les chauffards dont personne ne fait jamais partie... Les 35h sont un mal pour l'économie pour les autres entreprises. Pour soi, ce n'est jamais le cas car on a toujours une productivité qui fait que l'on compense. Bref, la mauvaise foi Française est prégnante et s'opposera toujours avec force à des réformes d'ampleur, tandis que les mesurettes seront acceptées par tous... mais seront inefficaces... La loi Macron étant le plus formidable exemple d'une réforme acceptée par tous mais dont le seul mérite est de donner le nom de son auteur à un texte de loi. C'était d'ailleurs le seul but recherché.
Pourquoi je me décide à vous écrire aujourd'hui ? Pour deux raisons :
1. Vous avez une énorme responsabilité car vous êtes la dernière personne politique à pouvoir exercer le pouvoir démocratiquement. Après vous, si vous vous décidez à exercer le pouvoir comme on l'a exercé pendant 30 ans, la démocratie s'éteindra et Marine Le Pen prendra votre suite. Vous êtes notre dernier espoir en la matière. Le plafond de verre qui empêche encore Madame Le Pen se brisera si vous ne savez pas réformer la France comme il se doit. On ne peut continuer à gérer indéfiniment un pays à dépenser près de 70 milliards de plus que ce que l'on gagne, surtout quand on ne gagne que 250 milliards.
2. Vous êtes la seule personne à pouvoir avoir suffisamment d'humilité pour savoir les difficultés des tâches qui seront les vôtres l'année prochaine. En ce sens, votre modèle doit être "l'assemblée générale de copropriétaires". Je m'explique. Lorsqu'une assemblée générale de copropriétaires est convoquée, tous ne sont pas d'accord sur les décisions à prendre. Un débat s'installe, les discussions peuvent être vives. Quand vient l'heure du vote, tout le monde fait silence et le résultat s'impose à tous. Tout le monde se calme car tout le monde sait que la majorité s'exprime et que ce résultat doit s'imposer : c'est le principe même de la démocratie. Il faut donc trouver le moyen d'exercer ce principe pour réformer la France. Cela peut se faire avec une politique de volonté forte qui saura mettre les nouvelles technologies au coeur de notre système démocratique. Est-il normal qu'une population de non élus comme le Conseil constitutionnel, la Cour de cassation ou le Conseil d'état imposent à ce point ce qu'il croit être ses normes à l'ensemble des Français ? La démocratie est-elle réellement servie à l'écoute de ces institutions ou ne le serait-elle pas mieux en posant directement la question aux intéressés ? J'ai un moyen, j'ai les idées permettant de remettre les Français au coeur du pouvoir, ce qui est une obligation démocratique car la démocratie en est sa plus simple définition. Nous avons donc deux choix : ou bien changer de constitution pour une VIe république véritablement démocratique, ou bien un statuquo qui continuera à écouter de vieilles institutions qui se disent s'exprimer au nom du peuple mais qui ne font que faire monter un mécontentement général qui mènera Madame Le Pen au pouvoir.
Comme je vous l'ai dit, j'ai des idées concrètes qui permettent de changer notre constitution. Je me tiens à votre disposition pour vous les expliquer de vive voix. Je ne dis pas que je détiens la seule et unique solution. Je dis juste qu'il va falloir trouver le moyen d'engager de véritables réformes et que celles-ci ne pourront être mises en place qu'avec le moyen de faire accepter les mesures à des gens qui seront perdants. De plus, il faudra trouver le moyen d'appliquer des réformes avec l'assentiment de nos institutions de non-élus que sont le Conseil constitutionnel, Conseil d'état et Cour de cassation. Nous n'avons pas le choix. Si nous échouons, il faudra faire la place à Marine Le Pen qui ne s'encombrera pas de la place de ces institutions de non-élus pour exercer un pouvoir autocratique qui mènera notre pays à sa ruine.
Le changement constitutionnel est devenu obligatoire car nos réformes se heurtent trop souvent à des pressions très fortes de catégories de population, toujours minoritaires, qui ont pris l'habitude de s'opposer sans ne rien proposer. Dans le cadre de réformes, ces catégories de population (cheminots, taxis, étudiants, lycéens, fonctionnaires divers et variés) ne cherchent pas à savoir si les mesures correctrices sont utiles à l'intérêt général. Il faudra donc trouver une recette, par un changement constitutionnel fort et démocratique, de contourner ces oppositions constituées par des peurs et craintes légitimes. Cette recette est la seule apte à rétablir une action véritablement efficace au service de l'ensemble des citoyens de France.
Je me tiens à votre disposition et vous apporte mon soutien sans faille dans votre candidature.
Veuillez agréer, Monsieur le futur Président de la République, l'expression de mes salutations distinguées.
Philippe NOVIANT
Publié le 5 Octobre 2016
Nulle entreprise de par le monde ne peut se permettre un turnover de 31%... Pour faire son travail correctement, il faut un minimum de stabilité, seule à même de garantir une certaine continuité dans le travail et une certaine maîtrise des dossiers.
Il est donc une faute majeure d'avoir 31% des personnes bougeant dans une entreprise dans une année !
Quand une personne sur 3 bouge dans une entreprise, le travail s'en ressent forcément car on est obligé de passer du temps à faire passer les dossiers d'un magistrat à un autre, ce qui nuit forcément à la productivité et à la qualité du travail d'investigation des affaires judiciaires.
Il est temps de faire cesser ce mode de fonctionnement en devenant véritablement responsable vis à vis de l'intérêt général ce que la situation actuelle ne permet pas !
Un article du journal 'Le Monde' daté du 7 mai 2016
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L'inquiétant turnover des magistrats
En 2015, 31 % d'entre eux ont été nommés à un nouveau poste. Un phénomène qui nuit au travail des juridictions
Une entreprise ou une administration pourrait-elle fonctionner si près du tiers de ses effectifs changeait de poste chaque année ? La justice le peut ! Ou du moins le pense-t-elle. Selon les chiffres qui devraient être officialisés fin juin par le Conseil supérieur de la magistrature (CSM), 2 251 magistrats ont été nommés à de nouvelles fonctions ou dans une autre juridiction en 2015. Avec les auditeurs de justice (les magistrats sortis d'école) nommés à un premier poste, cela représente 2 576 mouvements dans l'année pour un corps qui comptait 8 215 professionnels en activité.
Ce taux de rotation de 31,4 % des effectifs constitue un record historique, mais pas un accident. " Ces chiffres sont en augmentation constante depuis une décennie ", affirme Daniel Barlow, le secrétaire général du CSM, l'organe constitutionnel chargé de choisir les plus hauts magistrats du siège (ceux qui jugent), et de donner un avis engageant au gouvernement sur ses propositions de nomination des autres magistrats du siège et des hauts gradés du parquet (ceux qui dirigent l'enquête et engagent les poursuites).
Le nombre de postes vacants dans la justice n'arrange pas les choses. " Le ministère utilise cette mobilité pour déplacer la pénurie d'une juridiction à l'autre ", explique Virginie Duval, présidente de l'Union syndicale des magistrats (majoritaire). Alors qu'il criait famine cet hiver, le tribunal de Bobigny, en Seine-Saint-Denis, devrait se faire plus discret en septembre avec un nombre de juges et de parquetiers plus conforme à sa taille. La rentrée sera plus difficile ailleurs.
Eviter les conflits d'intérêts
Les garanties statutaires des magistrats sont élémentaires pour assurer l'indépendance des juges, mais elles compliquent la gestion des ressources humaines. On ne peut pas déplacer un juge qui n'a pas demandé à changer de fonction ou de tribunal, ni le nommer à un autre poste que celui qu'il sollicite. Ainsi, certains peuvent rester longtemps vacants tandis que de nombreux candidats se pressent à des postes qui ne le sont pas. " A peine quelques mois après son arrivée dans une nouvelle fonction, un magistrat a le droit de manifester sa candidature pour un ou plusieurs autres postes ", explique le professeur de droit Jean Danet, une des personnalités extérieures membres du CSM.
Le législateur encourage la mobilité, notamment pour éviter les risques de conflit d'intérêts avec les milieux sociaux-économiques locaux. Depuis 2001, les juges spécialisés (instruction, affaires familiales, etc.) doivent changer d'affectation au bout de dix ans et les chefs de cour au bout de sept ans. C'est ce qui est arrivé à Marc Trévidic, qui a dû quitter l'instruction au pôle antiterroriste en août. Cette culture de la mobilité a été promue pendant des décennies par le ministère, l'Ecole nationale de la magistrature (ENM) et le CSM.
La mobilité est un des facteurs pris en compte dans l'avancement et le passage aux grades supérieurs : plus on bouge, plus on gagne ! Un tourbillon intégré comme un état de fait. Ni les syndicats ni la chancellerie ne s'en plaignent. Pourtant, à ce rythme, le turnover désorganise les juridictions.
A la cour d'appel de Besançon, 60 % des magistrats sont en poste depuis moins de deux ans. Difficile dans ces conditions de mettre en place des actions pluriannuelles. " Ce turnover pose un problème de qualité ", reconnaît Clarisse -Taron, présidente du Syndicat de la magistrature. Sans compter la déperdition d'informations alors que le recul de la collégialité, avec les audiences à juge unique et les magistrats qui fonctionnent en cabinet, complique le " tuilage " entre le sortant et son successeur.
Favoriser la stabilité
A Saint-Etienne ou à Bourg-en-Bresse, il n'y a pas de candidats pour être substitut du procureur. Les jeunes magistrats qui sortent de l'école servent de variable d'ajustement. Ils sont les seuls à ne pas pouvoir choisir librement leur affectation puisqu'elle dépend du classement de sortie. Crise du parquet oblige, plus de 50 % des postes offerts à la sortie de l'ENM cette année sont pour le parquet, alors qu'il ne représente qu'un quart du corps. Très rapidement, et parfois même avant les trois ans minimum imposés pour le premier poste, un grand nombre de jeunes juges demanderont une mutation, souvent pour se rapprocher de la région de leur famille. A l'inverse, si un magistrat choisit de rester vingt ans au même poste, personne ne lui demandera de bouger. La religion de la mobilité serait donc à géométrie variable.
Comble de la situation, ni la -direction des services judiciaires du ministère ni le CSM n'ont d'éléments statistiques précis sur la mobilité. " Nous n'avons pas d'explication au phénomène, juste des hypothèses ", regrette Evelyne Serverin, directrice de recherche au CNRS, membre du CSM qui a plaidé pour le lancement d'une étude.
Au ministère de la justice, on reconnaît aujourd'hui que les chiffres de la mobilité " sont importants et nécessitent que des réflexions soient menées ". " L'importance donnée au critère de mobilité dans l'évolution de la carrière " et des mesures " pour favoriser la stabilité " font partie de ces réflexions " en lien avec le CSM ".
Une chose est sûre, pour freiner le tourbillon, il suffirait que le garde des sceaux décide de proposer moins de noms sur les listes de mobilité qu'il soumet deux fois par an au CSM.
Jean-Baptiste Jacquin
Isabelle Prévost-Desprez nommée à Paris
Parmi les 865 propositions de nomination de magistrats du ministère de la justice qui devraient être confirméesavant la fin mai pour des entrées en fonction en septembre, figure la prochaine arrivée au tribunal de grande instance de Paris d'Isabelle Prévost-Desprez, au rang de première vice-présidente adjointe. C'est l'épilogue de l'affaire qui a valu à cette magistrate, actuellement vice-présidente à Nanterre, d'être poursuivie pour " violation du secret professionnel ", au profit d'un journaliste du Monde, durant l'enquête Bettencourt. Elle a été relaxée en juillet 2015 par le tribunal correctionnel de -Bordeaux, dans cet épisode du long conflit avec Philippe Courroye, aujourd'hui avocat général à la cour d'appel de Paris.
Publié le 4 Octobre 2016
L'EPR est un échec industriel. Il ne marche pas, continue à coûter énormément d'argent et n'est pas encore passé en production. A 24 milliards le risque, sur argent public en grande partie, on ne peut continuer à jouer à la roulette russe ad vitam aeternam. Si on échoue, avec 24 milliards, ça sera la ruine pour l'entreprise publique et les citoyens Français seront invités à éponger le risque.
Trop c'est trop. Il faut savoir, de temps en temps, reculer pour mieux sauter. Il faut savoir arrêter les frais à un moment donné et savoir avouer qu'on s'est trompé. Il faut se retirer du projet Hinkley Point pour en revenir aux fondamentaux : faire des centrales plus petites, éprouvées, de manière à regagner des parts de marché pouvant mener à engranger de l'argent pour engager des recherches pour construire un projet véritablement éprouvé.
L'industrie ne se nourrit pas de 'Yakas' : il faut éprouver les modèles avant de les vendre. Il y a trop d'inconnues dans l'EPR pour continuer aveuglément à produire sans se soucier de la pertinence économique du projet, mais aussi et surtout de la sécurité humaine qui en découle !
Il faut s'opposer au lancement immédiat de ce projet car le risque est trop important actuellement. Réfléchir et se poser doit être la priorité absolue en la matière et engager une étude indépendante en est la clé de voûte !
La survie économique est à ce prix. La sécurité humaine est à ce prix aussi !
Un article du journal 'Le Monde' daté du 6 Mai 2016
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EDF : le " désespoir " de l'ex-directeur financier
Le témoignage de Thomas Piquemal apporte de l'eau au moulin des opposants à l'EPR d'Hinkley Point
"J'ai démissionné en désespoir de cause. En désespoir tout court. Moi, je n'avais pas envie de quitter EDF, une entreprise que j'ai tant aimé défendre. " Thomas Piquemal, l'ancien directeur financier de la compagnie d'électricité, est sorti mercredi 4 mai du silence qu'il s'était imposé depuis son départ, le 1er mars. La voix grave, le visage tendu, l'ex-grand argentier du groupe a livré à l'Assemblée nationale un témoignage édifiant, faisant monter d'un cran la pression déjà forte pour qu'EDF reporte d'au moins quelques années son grand projet nucléaire au Royaume-Uni.
Car l'ex-directeur financier a été clair : sa démission est directement liée aux deux réacteurs nucléaires EPR envisagés à Hinkley Point, en Grande-Bretagne. Un investissement évalué à 24 milliards d'euros, et jugé beaucoup trop risqué. Si M. Piquemal a claqué la porte, après avoir passé six ans au sein du groupe, c'est pour ne pas " cautionner une décision susceptible, en cas de problème, d'amener EDF dans une situation proche de celle d'Areva ", celle d'une grande entreprise publique menacée d'un dépôt de bilan, a-t-il déclaré.
De quoi apporter de l'eau au moulin de tous ceux qui, à l'extérieur et surtout au sein d'EDF, s'opposent au lancement immédiat de cet énorme projet. Devant l'opposition unanime des syndicats et les réserves de plusieurs administrateurs indépendants, le PDG, Jean-Bernard Lévy, a accepté le 22 avril de reporter une nouvelle fois la décision sur le sujet, et de consulter au préalable le comité central d'entreprise (CCE). Celui-ci tiendra une première séance consacrée à ce dossier lundi 9 mai. Il y a toutes les chances qu'il demande une expertise extérieure. Les élus du personnel auraient alors jusqu'au début juillet pour rendre leur avis. En pratique, le choix d'EDF d'investir ou non en Grande-Bretagne sera donc décalé d'au moins quelques mois.
Aux yeux du PDG d'EDF comme du ministre de l'économie, Emmanuel Macron, ce report ne remet pas en cause le lancement rapide d'un chantier présenté comme décisif pour l'ensemble de la filière nucléaire. Le gouvernement est " attaché " à la réalisation d'Hinkley Point, un projet " essentiel " sans lequel il y aura " des centaines de licenciements " chez Areva, a souligné le ministre le 2 mai lors d'une visite dans l'usine du groupe nucléaire au Creusot (Saône-et-Loire).
" Le lancement immédiat de ce projet serait mortifère pour EDF et la filière ", affirment au contraire les syndicats d'EDF. Selon eux, la décision doit être reportée d'au moins trois ans. C'est aussi ce qu'avait proposé M. Piquemal à son PDG dès le début 2015, sans être entendu. " Qu'est-ce que trois ans pour un projet de quatre-vingt-dix ans ? ", argumente aujourd'hui l'ex-directeur financier. Bien sûr, EDF aurait dû renégocier avec son client britannique et avec ses fournisseurs. " Mais comment penser qu'en signant à la va-vite le contrat ne sera jamais renégocié ", et que les Britanniques accepteront de surpayer leur électricité pendant des années ?
En 2013, lorsque EDF a conclu un accord avec les autorités britanniques pour construire deux réacteurs de nouvelle génération dans le Somerset, les syndicats comme M. Piquemal avaient pourtant applaudi. Mais, depuis, la donne a changé du tout au tout, a expliqué mercredi l'ex-directeur financier. Le gouvernement britannique a renoncé à accorder sa garantie financière au projet, considéré comme une tête de série compte tenu du retard pris par les autres EPR en construction en Finlande et à Flamanville (Manche). Areva a sombré dans la crise, et n'est plus en mesure de financer ses 10 % prévus. La situation du groupe EDF lui-même s'est détériorée, en raison des déboires de Flamanville et surtout de l'effondrement des prix de l'électricité en Europe. Cette chute, jugée durable, " change tout le modèle économique d'EDF ", selon M. Piquemal.
Trouver des partenaires
Dans ces conditions, enclencher un investissement aussi massif est devenu très audacieux. D'autant qu'EDF, avec la construction des EPR en Finlande et en France, a déjà beaucoup engagé sur ces réacteurs. " On arrive à fin 2015 à un montant considérable : 14 milliards d'euros ont déjà été investis dans cette technologie, soit 58 % des fonds propres " du groupe, a souligné M. Piquemal. " Rajouter un projet d'EPR me paraissait impossible ", a déclaré l'ex-dirigeant, nommé par l'ex-PDG Henri Proglio. " Qui parierait 60 % ou 70 % de son patrimoine sur une technologie dont on ne sait toujours pas si elle fonctionne ? " Au-delà des contraintes financières, c'est la stratégie du tout-nucléaire, voire du tout-EPR, qui se trouve mise en cause par les défenseurs mêmes de l'atome, qu'il s'agisse d'un " nucléocrate " comme M. Piquemal ou des syndicats d'EDF, très attachés à une production qui a fait la force et la gloire de l'entreprise.
M. Lévy ayant refusé de reporter le projet britannique, M. Piquemal a cherché en 2015 plusieurs solutions pour rendre l'affaire jouable, a-t-il relaté. La première consistait à trouver des partenaires prêts à partager l'investissement. Mais après avoir fait le tour du monde, il est apparu qu'à part les Chinois, partenaires de longue date du groupe, " personne n'acceptait de prendre le risque EPR ".
M. Piquemal a alors suggéré de faire participer la filière nucléaire française elle-même à Hinkley Point, par exemple au travers d'une société d'investissement qui aurait détenu 10 % à la place d'Areva. Cette piste n'a pas été retenue, pas plus qu'un autre projet de financement envisagé par l'ex-directeur financier.
Restait une dernière solution : " Un renforcement significatif des fonds propres. " C'est-à-dire une importante augmentation de capital, du type de celle de 4 milliards d'euros dont le principe vient d'être décidé par l'Etat. Mais, à l'époque, le PDG d'EDF voulait aller vite. Il entendait lancer Hinkley Point dès janvier ou février, sans garantie sur la recapitalisation évoquée. Pour M. Piquemal, ce sujet a constitué le point de rupture. " Qu'est-ce que j'aurais dû faire ? Me taire ? Y aller ? J'aurais commis une faute professionnelle. " En son âme et conscience, il a préféré un geste exceptionnel en pareil cas : la démission.
Denis Cosnard
Le contexte
Hinkley Point
La construction deux réacteurs nucléaires EPR envisagés à Hinkley Point, en Grande-Bretagne, est un projet à la rentabilité assurée, affirme EDF. Selon l'accord passé avec Londres, la production sera vendue à un prix garanti de 92,50 livres sterling (soit 116 euros) par mégawattheure durant les trente-cinq premières années de fonctionnement. EDF en attend une rentabilité d'au moins 9 % par an… sous réserve que ce prix ne soit pas remis en cause, et que l'investissement ne dérape pas. Deux conditions assez aléatoires. Il y a " un risque de construction majeur ", a reconnu l'ex- directeur financier Thomas Piquemal mercredi 4 mai à l'Assemblée nationale.